Le terme toujours usité de « rhume de cerveau »
date de l'époque lointaine où l'on croyait que l'humeur pituitaire des fosses
nasales coulait de la cervelle.
Affection des saisons froides et humides, surtout lors des
changements brusques de température, le coryza, sans être le plus grave des
maux, est certainement le plus fréquent.
Il s'agit d'une petite maladie infectieuse et contagieuse,
dont l'agent microbien n'est pas déterminé ; on a incriminé chacun des
microbes qui se trouvent toujours sur la muqueuse des fosses nasales, dont la
virulence se trouve brusquement augmentée, et l'on a mis en cause un « virus
filtrant », c'est-à-dire un microbe si petit qu'il échappe aux plus forts
grossissements du microscope et qu'il traverse les filtres les plus serrés.
C'est toujours, et avec raison, que l'on accuse le froid
d'être à l'origine de cette infection, qu'il agisse directement par l'air
glacial sur la muqueuse ou que ce soit par voie réflexe, à la suite d'un coup
de froid, par exposition du corps en sueur à un courant d'air froid ou, plus
fréquemment, à la suite du froid aux pieds.
La muqueuse nasale réagit tout d'abord par une dilatation de
ses capillaires ; elle se gonfle, ce qui se traduit par une difficulté de
respiration nasale et une sensation de picotement qui amène des éternuements en
série suivis d'un écoulement, assez clair au début, mais ne tardant pas à
prendre un aspect muco-purulent.
Le début est brusque et s'accompagne souvent de malaises divers,
de fièvre légère, de maux de tête, qui diminuent habituellement lorsque
l'écoulement est devenu plus abondant ; l'odorat, toujours diminué ou même
supprimé, se rétablit peu à peu.
Dans les cas bénins, le coryza guérit en quelques jours, quel
que soit le traitement employé ou même sans traitement mais que ce ne soit pas
une raison pour négliger tout traitement, car les complications ne sont pas
rares. Le mal de tête, la « céphalalgie » du début, est dû à la
congestion de la muqueuse des sinus, particulièrement des sinus frontaux,
muqueuse en contiguïté avec la muqueuse pituitaire ; les fosses nasales
sont encore en rapport assez étroit avec l'orbite par le canal lacrymal, avec
l'oreille moyenne par la trompe d'Eustache, qui s'abouche dans le rhino-pharynx,
qui fait encore communiquer la cavité nasale avec les voies aériennes
supérieures : larynx, trachée et bronches. Ceci explique les complications
de sinusites, d'otites, de conjonctivites, puis de laryngite, de trachéite, de
bronchite, lorsque le rhume « tombe sur la poitrine ».
Le diagnostic n'offre guère de difficulté ; tout au
plus peut-on se demander si le coryza n'est pas un précurseur d'une fièvre
éruptive, d'une rougeole, d'une coqueluche, d'une grippe ; encore faut-il
parfois songer à une rhinite médicamenteuse, par exemple en cas de traitement
par un iodure.
Comme traitement prophylactique, on conseille de s'endurcir
au froid par l'hydrothérapie froide et de se couvrir de lainages lorsqu'on doit
sortir par le froid, surtout le froid humide ; de ne pas manquer de porter
des chaussettes de laine, dans de bons souliers, et de ne pas négliger d'en
changer si l'on a été mouillé, surtout par la neige.
Si le coryza s'est déclaré, il faut rester au chaud, comme
on le prescrivait déjà au XVIe siècle ; Marguerite d'Angoulême écrivait :
« J'ai un reume si grand que j'en ai resté enfrénée
et de vray je n'en ousé saillir de la chambre », précaution qu'on doit
employer comme au temps de la sœur de François 1er.
La médication, à la période de début, se résume sensiblement
dans l'absorption fréquente de boissons chaudes, infusions aromatiques ou, ce
que préfèrent nombre de gens, grogs au rhum, bien sucrés. On utilise aussi
parfois l'aspirine ou un de ses dérivés contre la douleur ; un médicament,
combinaison d'aspirine et d'un dérivé lévogyre de l'éphédrine (spécialisé sous
le nom de coryphédrine), a produit quelquefois un traitement abortif, sous la
condition que les cachets aient été pris dès le premier signe de picotement du
nez.
Le coryza une fois établi, le traitement vise, tout d'abord,
à rétablir la perméabilité du nez ; l'adrénaline ou l'éphédrine (en
instillations nasales) produisent la vaso-constriction de la muqueuse, mais,
comme cet effet utile est presque toujours suivi d'une vaso-dilatation
secondaire, on emploie plutôt certains dérivés de l'éphédrine, dont l'un est
spécialisé sous le nom d'aleudrine, ou encore, plus récemment, d'un dérivé de
l'imidazoline, spécialisé sous le nom de privine, qui ne donnent pas lieu à une
réaction secondaire fâcheuse.
La perméabilité nasale une fois rétablie, on s'efforce de
neutraliser les microbes qui entretiennent l'écoulement ; il ne faut pas
compter sur les médicaments pris par voie digestive ou en injections
sous-cutanées et se contenter des applications locales d'antiseptiques, sous
forme de pommades nasales à base d'un sel d'argent (collargol, protargol ou
analogue) ou d'un antibiotique comme la pénicilline ; il existe de
nombreuses spécialités de ce genre, parmi lesquelles il faut préférer celles
qui ne sont pas grasses ; la pénicilline peut aussi s'employer sous forme
d'aérosols, en inhalations.
Les ferments lactiques ont aussi une action en quelque sorte
antibiotique (sous forme d'aspiration de poudre de lactéol, par exemple).
Il faut, par contre, éviter les procédés susceptibles de
favoriser les complications, telles les douches nasales sous pression et les
badigeonnages, même avec des solutions antiseptiques, comme certains l'ont
proposé.
L'emploi de poudres serait fort commode, les prises
s'aspirant comme celle du tabac, mais beaucoup de médicaments souvent proposés
sont inefficaces et il en est de nuisibles ; il faut, entre autres, éviter
les poudres à base de cocaïne, et le menthol est bien souvent mal supporté,
surtout par les enfants.
Dr A. GOTTSCHALK.
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