Belette contre vipère.
— Pêchant l'été dernier en bateau sur les bords de la Vie,
petite rivière côtière de la Vendée, mon attention fut attirée par un
bruissement de feuilles mortes venant d'un roncier comblant en partie une
vieille carrière dont les éboulis de pierraille descendent en pente douce
jusque dans l'eau.
Délaissant pour un instant la contemplation de mon bouchon —
au risque de voir un gardon profiter de l'aubaine, — je tournai la tête juste
pour voir sortir du fourré et dévaler la pente une vipère fuyant de toute la
vitesse de ses ... anneaux.
Elle avait à peine fait deux mètres que l'ennemi surgit à
son tour. C'était une belette qui, chassant à la trace tel un chien, précipita
sa course en voyant la vipère à découvert et ne vint s'arrêter, si je puis
m'exprimer ainsi, que le bec dans l'eau, où la vipère avait effectué un
plongeon désespéré. Conservant une immobilité complète, j'observai, assez
intrigué, le manège de la belette, qui, en dépit de ma présence à 3 ou 4 mètres
d'elle, inspectait minutieusement tous les interstices des pierres susceptibles
de lui cacher sa proie. Ce n'est qu'au bout d'un certain temps et après s'être
assuré que vraiment la vipère avait plongé et qu'il lui fallait en faire son
deuil que le petit carnassier se résolut à abandonner la chasse et à s'en
retourner vers son domaine, le roncier.
1° La belette détruit-elle les vipères ? Car je suis
bien certain d'avoir assisté là à une chasse véritable, l'attitude des deux
antagonistes n'ayant là-dessus rien d'équivoque ; du reste, la vipère
paraissait parfaitement se rendre compte du danger qui la menaçait et employait
tous les moyens en son pouvoir pour lui échapper. Pourtant, sur tout ce que
j'ai lu sur la belette, il ne me semble pas avoir vu qu'elle jouissait, à
l'égard du venin, de l'immunité qui caractérise son compère le hérisson.
2° En ce cas, la belette, si chargée d'opprobre par
ailleurs, mériterait quelques circonstances atténuantes, du moins en ce qui
concerne les régions infestées de vipères.
Ceci prouve qu'il n'y a pas, à proprement parler, d'animaux
spécifiquement utiles et d'autres uniquement inutiles. Le tout est une question
de dosage, et les animaux sauvages vivent avec leurs qualités et leurs défauts
qui leur sont propres, et dont nous devons nous-mêmes nous accommoder.
A. CAUDAL, abonné de Vendée.
Une belle réussite.
— A Gouzon, dans la Creuse, le jour de Noël 1950,
j'effectuais, avec mon frère et un ami, le tour de l'étang des Landes (130 ha.)
dans le but bien déterminé de descendre quelques-uns des magnifiques canards
qui volaient de toutes parts.
Soudain, à quelque 50 mètres et avant que nous ayons eu le
temps de réaliser, trois magnifiques oies sauvages s'envolaient et piquaient
aussitôt vers l'étang pour se poser sur l'épaisse couche de glace, à environ
250 mètres.
Mon frère, toujours farci d'idées sans queue ni tête,
éprouve le besoin de les déranger, bien persuadé qu'elles reviendront vers
nous. Une balle « Hélice » remplace dans son « coup choké »
la cartouche de 2. Et pan ! Bien cachés, nous attendons. Stupéfaction
générale : deux oies s'envolent (d'un autre côté d'ailleurs !), la
troisième, après un essai de déploiement d'ailes, s'affaisse. Touchée ! Un
quart d'heure d'attente nous confirme la mort du bel oiseau cendré. Le plus
difficile n'est d'ailleurs pas fait. Un essai infructueux avec une barque et
des masses pour casser la glace ne rebute pas mon frère, qui revient bientôt
avec une échelle et deux « tiers points » et s'engage résolument à
plat ventre sur la glace. Plus d'une heure d'efforts lui sera nécessaire pour
toucher enfin le bord, exténué, mais aussi heureux et combien soulagé.
L'oie pesait cinq livres et avait eu le cou sectionné par la
balle. Mon frère a bien juré ses grands dieux qu'il ne renouvellerait pas son
exploit.
R. LABARRE, abonné.
N. D. L. R. — Le fait signalé mérite quelque réflexion :
il convient de souligner qu’à 250 mètres, une balle a causé une blessure mortelle
à un gros volatile. Chasseurs, assurez-vous bien du champ libre avant de tirer
inconsidérément !
L'alouette.
— J'ai lu l'article de M. Jean Guiraud concernant
l'alouette, qu’il dit être de plus en plus rare dans certaines régions où,
autrefois, elle nichait et constituait une distraction pour le chasseur, qui
pouvait s'exercer au tir. M. Guiraud se demande les motifs de la rareté de
l'alouette sur certains points du territoire ; je vais peut-être lui
révéler l'une des causes.
Ce gibier a été chassé de tout temps dans les parties rases
des Landes, avant la constitution uniforme de la forêt, avec des lacets de crin,
tendus par milliers par certains spécialistes de cette chasse.
Depuis, l'alouette, émigrant vers les pays chauds du Sud de
l'Europe en octobre et novembre, passe par vols nombreux tant en bordure de
l'océan Atlantique que dans tout le Sud-Ouest de la France.
Comme elle aime les espaces dénudés et les champs, des
chasses au filet sont installées un peu partout, particulièrement dans les
départements des Landes et de la Gironde, où l'on capture ces oiseaux souvent
par milliers, dans une même journée de passage.
Ce gibier, tué sur le champ, est expédié principalement sur
Marseille et sur les marchés des villes importantes de la région ; sa
chasse devient une entreprise industrielle autant qu'une distraction et est
réglementée par des arrêtés préfectoraux.
L'alouette est également chassée au retour, en février-mars,
mais beaucoup moins intensément, car elle est moins en chair à ce moment et
moins appréciée.
Si cet oiseau charmant est un granivore, en principe, il est
aussi insectivore, et l'on peut se demander dès lors pourquoi ce genre de
chasse est toléré, qui en détruit des milliers.
Si vraiment l'agriculture constate que la disparition
partielle de l'alouette est nuisible, elle pourrait faire abolir ce genre de
chasse.
M ..., abonné du Sud-Ouest.
Tularémie.
— En tant que vétérinaire d'abord, en tant que président du Saint-Hubert-Club
Béarnais également, je considère de mon devoir de répondre à l'avis émis par M.
le Dr Vœrther sur la tularémie (Chasseur Français de février 1951). Mon
confrère en médecine humaine prétend que quelques cas de maladie à peine ont
été signalés par la presse, alors que des milliers de lièvres sont mangés tous
les ans.
Or il est bon de dire qu'à la date du 3 février 1950, 131
cas de tularémie humaine ont été contrôlés par M. Girard, de l'institut
Pasteur.
M. le Dr Vœrther indique d'autre part une durée d'incubation
de deux à neuf jours. En principe, oui, mais cette incubation peut néanmoins
varier de deux heures à quatorze jours. Il ajoute que la guérison s'obtient
spontanément en six semaines et que la maladie est extrêmement bénigne. Je suis
obligé de le contredire, car le pronostic est grave, bien que la guérison soit
presque toujours la règle.
La maladie est longue, les récidives fréquentes ; si la
période d'état dure effectivement, d'ordinaire, de trois à quatre semaines,
parfois davantage (deux mois), la convalescence se poursuit durant de longs
mois. L'inflammation ganglionnaire, (dans le type ganglionnaire qui n'est pas
le seul) rétrocède très lentement et s'accompagne souvent de suppuration avec
fistulisation consécutive. De plus, des complications peuvent survenir
(gastro-intestinales ou pulmonaires).
C'est assez dire que cette maladie n'est pas bénigne du
tout, il s'en faut. Et il faut toujours penser à la contamination d'un
organisme fatigué (vieillard, convalescent, enfant débile, etc.).
Si les antibiotiques permettent à l'heure actuelle de
réduire sensiblement le temps de convalescence, il n'en convient pas moins de
mettre en garde les chasseurs contre les imprudences dangereuses qu'un excès
d'optimisme ne peut manquer de favoriser.
Dr Pierre CASTAY,
Vétérinaire,
président du Saint-Hubert-Club Béarnais.
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