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Pisciculture

Fécondation artificielle

La méthode de fécondation artificielle dite « sèche » étant actuellement, et de beaucoup, la plus utilisée, nous passerons très rapidement sur la méthode de fécondation « humide » actuellement bien délaissée.

La méthode de fécondation artificielle humide consiste à opérer la fécondation dans l'eau. Les œufs de la femelle sont exprimés de l'oviducte, comme dans le cas de fécondation sèche, mais tombent directement dans une cuvette d'eau. Le sperme du mâle est alors versé dans l'eau de la cuvette où se fait la fécondation.

Avec les salmonidés, la réussite de la fécondation humide est faible et n'atteint pas 50.p. 100. La raison de cet échec partiel est que le micropyle, c'est-à-dire le petit trou par où doit passer obligatoirement le spermatozoïde, laisse passer l'eau et l'œuf, au lieu de rester flasque, se gonfle et la pression osmotique est telle que, pour des raisons purement physiques, le spermatozoïde ne peut plus pénétrer. Seuls quelques spermatozoïdes, les premiers arrivés, peuvent féconder les œufs encore incomplètement gonflés.

La fécondation humide est donc, en principe, à prohiber sauf dans le cas de certains cyprinidés où elle donne des résultats encore suffisants étant donné le grand nombre d'œufs qu'ils émettent.

Passons maintenant à la méthode suisse, ou « extra-sèche », décrite pour la première fois par Vouga, il y a une vingtaine d'années.

Voici ce que Vouga avait constaté, si, après la fécondation sèche, les œufs étaient mis à gonfler, leur transport dans un récipient d'eau non renouvelée, du lieu de la fécondation à la pisciculture, après plus d'une heure, s'accompagnait d'une grande mortalité due à l'asphyxie dans une eau privée d'oxygène. C'est alors qu'il mit au point la fécondation extra-sèche qu'il décrit ainsi :

« Prendre la femelle, l'essuyer avec un linge, se sécher de même les mains et recueillir complètement à sec dans une passoire ou une cuvette toute sa ponte (prendre de préférence une passoire à une cuvette pour éviter que l'urine ou le sérum ne se mêle aux œufs). Agir de même pour les autres femelles. Ensuite verser tous les œufs obtenus dans un bocal ou une cuvette. Puis se saisir d'un mâle ; l'essuyer, exprimer sa laitance sur les œufs ; répéter l'opération avec un deuxième mâle, voire même un troisième. Mêler ensuite avec une plume d'oie œufs et laitance. La première partie de l'opération est terminée.

Ce mélange d'œufs et laitance, sans eau, est alors transporté dans un bocal, lui-même dans une caisse à couvercle, dans une pisciculture. Ce voyage prendra une, deux, trois, quatre, et même cinq heures si c'est nécessaire. Cependant, il est évident que, plus vite on sera à destination, mieux cela vaudra.

Arrivé à la pisciculture, on prépare un vase de Zug ou une cuvette à demi remplie d'eau fraîche et on verse les œufs et la laitance dans l'eau. Donc, en copiant ce qui se passe dans la nature : les œufs dans l'eau et non l'eau dans les œufs. On remue. On ouvre ensuite le robinet pour renouveler l'eau constamment ».

Cette méthode donne des résultats supérieurs à la méthode sèche proprement dite, en particulier pour les poissons dont les œufs collent, notamment pour le brochet ; c'est ainsi qu'on réussit à féconder 95 p. 100 des œufs de brochet, alors qu'avec la méthode sèche on arrive à peine à 50 p. 100 et à beaucoup moins avec la méthode humide.

Un mot enfin sur la fécondation des œufs de reproducteurs morts (morts évidemment depuis quelques heures à peine). Il arrive souvent, en effet, que des reproducteurs mis en stabulation, soit sauvages, soit péchés au filet, soient trouvés mourants ou morts dans les bassins ou dans les filets tendus pendant la nuit. Si le géniteur est mort, ses produits génitaux vivent encore huit à dix heures. On peut parfaitement réussir la fécondation artificielle, avec un pourcentage raisonnable de succès, avec des œufs de salmonidés et de brochets fraîchement décédés. Il faut simplement noter que, si l'œuf est vivant quelques heures post mortem dans la cavité abdominale de la femelle, les spermatozoïdes ne survivent guère plus de une à deux heures dans le testicule du mâle. On peut donc récupérer des femelles mortes, mais leur fécondation doit se faire, si possible, avec du spermatozoïde de mâle vivant.

DELAPRADE.

Le Chasseur Français N°652 Juin 1951 Page 343