Les murs du jardin, presque toujours inutilisés à la
campagne, constituent cependant les meilleurs abris pour les arbres. Ils
permettent de produire certains fruits qu'on ne pourrait pas obtenir en plein
vent, soit parce qu'ils n'y pourraient acquérir toute la finesse nécessaire,
soit parce que les maladies, la tavelure par exemple, en rendraient le plus
souvent la récolte fort incertaine, soit encore parce que la violence des vents
d'automne ne permettrait pas de laisser ces fruits sur les arbres aussi
longtemps qu'il le faudrait pour qu'ils soient bien achevés dans leur chair
lors de la récolte et puissent ainsi se conserver jusqu'à l'époque, souvent
éloignée, de leur maturité.
Lorsque l'on veut cultiver des arbres fruitiers le long des
murs (en espalier, comme on dit en terme de jardinier), il est nécessaire,
avant de planter les arbres, et même avant de défoncer le sol, d'installer,
contre ces murs, des treillages sur lesquels il sera ensuite facile, au fur et
à mesure de la formation, de conduire les branches de charpente, et même, dans
certains cas, les branches fruitières des arbres.
Comment construire les treillages.
— Pour établir un treillage, on commence par tendre
horizontalement, sur le mur à garnir, des fils de fer. Puis, sur ces fils de
fer, on fixe des lattes de bois, verticalement ou obliquement, suivant la forme
à obtenir, en écartant plus ou moins ces lattes selon l'essence cultivée.
Les fils de fer sont maintenus, aux deux bouts, par des
crochets en fer dont les plus employés sont ceux que les serruriers appellent
des queues de cochon et qui sont terminés, à l'extrémité pénétrant dans
le mur, par une patte à scellement. Ils peuvent également s'attacher sur des
barres verticales formées d'un fer à T avec pattes à scellement aux deux
extrémités et collier au milieu.
Ces crochets ou ces barres sont scellés au ciment de telle
façon que les fils de fer tendus soient à 3 ou 4 centimètres du mur. Les lattes
étant posées au-dessus des fils de fer, on n'aura ainsi aucune difficulté pour
passer les attaches nécessaires au palissage. S'il s'agit d'un mur de terrasse
en plein midi, il faut même davantage d'espace entre le treillage et le mur, et
on met alors 10 ou 15 centimètres, à moins qu'il ne s'agisse d'y cultiver la
vigne qui supporte fort bien des températures très élevées.
Un raidisseur permet d'obtenir la tension voulue et de
rétablir celle-ci si, parfois, le fil de fer vient à fléchir quelque temps
après la pose du treillage. Il est nécessaire de proportionner la force du raidisseur
à celle du fil de fer et, en conséquence, de demander au quincaillier le raidisseur
convenable pour le fil de fer n° 16 qu'il est à conseiller d'employer, les
numéros plus faibles n'ayant pas la durée voulue.
Les lattes nécessaires peuvent être faites, sur commande,
par n'importe quelle scierie. Elles n'ont pas besoin d'être très fortes
puisqu'elles sont destinées seulement à la conduite des jeunes pousses qui, si
l'on s'y prend à temps, alors qu'elles sont encore herbacées, n'offrent pas une
grande résistance à la contrainte qu'on veut leur imprimer. Aussi, des lattes
carrées de 12 à 13 millimètres de côté conviennent fort bien. On peut les faire
faire en chêne ; elles ont alors longue durée, mais coûtent cher. On peut
également les faire faire en sapin ou en pin sylvestre ; leur prix de revient
est alors moins élevé et leur durée presque aussi longue si l'on a soin de les
faire, tremper dans un bain de sulfate de cuivre pendant quelques jours et si,
après séchage, on leur donne une couche de peinture ou deux. La longueur des
lattes correspondra à la hauteur du mur s'il s'agit de lattes verticales. Si
cette hauteur doit être considérable, on raccorde deux lattes, bout à bout, pour
avoir la longueur voulue.
Voici comment on établit les treillages pour les différentes
essences fruitières :
Pour poiriers, pommiers ou cerisiers à conduire à
branches verticales ou obliques.
— On tend horizontalement, tous les 60 centimètres, des fils
de fer n° 16, le fil du bas se trouvant à 30 centimètres du sol. Les lattes
sont attachées verticalement tous les 30 centimètres.
S'il s'agit de faire des cordons obliques, la distance entre
les lattes est calculée de telle façon que les pieds des arbres puissent être
distancés d'environ 45 centimètres.
Pour pêchers à branches verticales ou obliques.
— Les fils de fer sont tendus de la même façon et aux mêmes
intervalles ; on utilise des lattes un peu plus fortes, sur lesquelles
seront conduites les branches de charpente, et on les distance de 50
centimètres. De chaque côté de ces lattes fortes, on place, à 12 centimètres,
une latte un peu plus faible qui servira au palissage des ramifications
fruitières, puisque celles-ci sont également palissées, lorsqu'il s'agit du
pêcher.
Pour vignes en treilles à la Thomery.
— Les fils de fer n° 16 sont tendus horizontalement, le
premier à 40 centimètres du sol, les autres de 50 en 50 centimètres, de telle
façon que le plus élevé se trouve à environ 25 centimètres du sommet du mur.
Entre deux de ces fils n° 16, et parallèlement à eux, on en
tend un autre un peu plus fin. Le mur se trouve ainsi garni de fils tendus
horizontalement tous les 25 centimètres.
Pour faciliter la formation, on place seulement une forte latte
à l'emplacement où l'on aura un cep et on lui donne la longueur que devra avoir
la partie verticale de la tige avant de se diviser en deux bras pour former le
cordon. Chaque cordon est conduit sur le fit de fer n° 16 et ses coursons sont
accolés au fil de fer plus fin placé à 25 centimètres au-dessus.
Pour vignes en cordons verticaux.
— Le treillage est fait de façon un peu différente. Les fils
de fer horizontaux sont distancés de 60 centimètres ; sur eux, on attache
une latte verticale assez forte à chaque emplacement du cordon, puis une autre
latte plus faible de part et d'autre, et à 20 centimètres de la première.
Nous disions, au début de cette causerie, que l’établissement
du treillage devait toujours précéder la préparation du sol et la
plantation. Il importe donc d'entreprendre ce travail suffisamment à temps pour
pouvoir ensuite défoncer et fumer le terrain et le laisser se rasseoir quelque
temps avant d'effectuer la mise en place des arbres. Celle-ci pourra s'exécuter
sans aucune difficulté et sans risque de fausses manœuvres si la pose du
treillage a été elle-même faite avec toute la correction voulue. D'autre part,
si la personne qui organise la plantation vient à disparaître, celle qui lui
succédera, pourra sans hésiter assurer à celle-ci la continuité des soins qui
permettra d'arriver au résultat cherché.
E. DELPLACE.
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