Accueil  > Années 1951  > N°652 Juin 1951  > Page 381 Tous droits réservés

Tornades et cyclones

Chaque année, la presse quotidienne nous annonce au moins une fois ou deux qu'un cyclone a ravagé tel petit village de l'intérieur ou du littoral ... Les dégâts sont certes toujours élevés, toujours trop élevés, mais il n'y a aucun rapport entre les dégâts causés par une tornade (ou une trombe) et les dégâts causés par un cyclone, pas plus qu'il ne pourrait y en avoir entre l'accident causé par un vélomoteur renversant un piéton et le désastre causé par un camion de 15 tonnes fonçant dans la foule des promeneurs.

Les cyclones sont des tempêtes à mouvement tourbillonnaire rapide, qui intéressent une région très étendue puisque la zone couverte par ce phénomène est d'un diamètre de 200 à 1.000 kilomètres. De plus, un cyclone ne stationne pas dans une région déterminée, il se déplace suivant une trajectoire approximativement parabolique, dont la convexité est tournée vers l'ouest. Ces perturbations sont presque toujours localisées dans les zones subtropicales, et leur trajectoire se poursuit sur des milliers de kilomètres.

Il ne faut pas confondre la vitesse de déplacement du météore et celle du vent dans son corps. Cette dernière est extrêmement rapide et, près du centre, est voisine de 180 ou 200 kilomètres à l'heure. La vitesse de déplacement est beaucoup plus faible, ce qui fait qu'un cyclone met plusieurs jours à parcourir toute sa trajectoire, et que, depuis le moment où il commence à sévir en un point jusqu'à l'instant où son « bord » postérieur balaie le même point, il s'écoule facilement une trentaine d'heures.

Mes lecteurs connaissent les termes « front », « surface de discontinuité », etc., qui se rapportent toujours aux perturbations et aux tempêtes de nos régions et d'ailleurs. Les cyclones tropicaux ont ceci de particulier qu'ils ne présentent pas de front, ni froid ni chaud.

Si le diamètre des cyclones est assez considérable, leur hauteur est proportionnellement faible, car, si le diamètre est de plusieurs centaines de kilomètres, la hauteur est en général inférieure à 10 kilomètres.

N'entrons pas dans la théorie des cyclones, car mon seul but aujourd'hui est de vous montrer quelle différence il y a entre les cyclones et les trombes (ou les tornades).

Les noms « trombe » et « tornade » qualifient le même phénomène, seulement le premier se rapporte à ce phénomène lorsqu'il se produit sur mer, le second, au même phénomène lorsqu'il se produit sur terre.

Les trombes et tornades naissent par temps chaud, orageux et presque calme en général (peu de vent).

La formation d'une trombe est plus facilement observable que celle d'une tornade, d'abord parce que l'horizon marin est beaucoup plus vaste, beaucoup plus dégagé que l'horizon terrestre, et ensuite parce que la partie inférieure de la trombe est mise en évidence par la formation d'un cône d'eau de mer bien visible, ce qui ne peut évidemment pas se produire sur terre.

Voici comment on peut observer une formation de « trombe » :

Sous un nuage d'orage (cumulo-nimbus) se forment subitement une ou plusieurs poches de forme conique, la pointe en bas; une de ces protubérances prend de l'importance par rapport aux autres et descend, s'allonge de plus en plus vers la mer. Alors la surface de l'eau commence à s'agiter ; on distingue très nettement aux jumelles un bouillonnement caractéristique tandis qu'un nuage se forme à la surface de l'eau, dans le prolongement du cône descendant. Ce brouillard, ces « bulles d'eau » sont le « buisson ». Peu à peu, le buisson s'élève à la rencontre de la poche descendante, puis prend lui aussi la forme d'un cône, pointe en haut, les deux sommets finissent par se rencontrer et la trombe est constituée.

Une trombe n'est presque jamais rectiligne ni verticale. Cela se comprend parce que, formée de deux cônes opposés par le sommet elle est toujours amincie au milieu ; quant à son obliquité, elle se comprend aussi puisque la partie supérieure suit le nuage d'où elle sort et « traîne », en quelque sorte, en remorque la partie inférieure qui fait corps avec la mer.

La vitesse de déplacement d'une trombe est en général lente, car ce phénomène se déplace à la vitesse du nuage et celle-ci est faible puisque les trombes se produisent par temps presque calme, mais la vitesse du vent à l'intérieur, ou pour être plus clair et surtout plus précis, la vitesse tourbillonnaire de l'air au sein de la trombe est beaucoup plus considérable puisqu'elle peut atteindre 50 ou 60 mètres à la seconde.

Les trombes font entendre un sifflement assez fort qu'on peut percevoir à plusieurs centaines de mètres, mais il est remarquable qu'à cette même distance, ni devant, ni derrière, ni sur les côtés, l'état de la mer n'est modifié, pas plus que la direction ou la force du vent.

La prochaine fois, nous parlerons plus spécialement des tornades, puis nous ferons des comparaisons entre ces trois phénomènes (baromètre, vitesse du vent, durée, zone de dévastation, etc.)

PYX.

Le Chasseur Français N°652 Juin 1951 Page 381