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La perdrix chukar

I. Morphologie.

— La description qui va suivre est due à la plume particulièrement autorisée et précise du savant américain David B. Greenberg et se rapporterait à l’Alectoris graeca Chukar.

Longueur de l'oiseau 37 centimètres.
Poids du mâle 650 grammes.
Poids de la femelle 500 ==

Plumage. — Tête rougeâtre au-dessus, chamois sur les côtés, poitrine et épaules brun vert ou gris, ailes marron et chamois à leurs extrémités, queue grise et chamois à son extrémité.

Ergot. — Le mâle seul en serait pourvu. L'auteur insiste particulièrement, et à juste titre, pour distinguer le type sur une bande noire qui, partant de la caroncule de chaque œil, descend le long du cou en une bande continue pour former, sur la poitrine, comme un collier. Cette bande est appelée « bavette » par les auteurs français. Elle est caractéristique, en France, d'une seule espèce de perdrix, la perdrix bartavelle, qui, comme nous l'avons exposé plus haut, est d'une parenté assez proche du chukar.

II. Origine.

— La perdrix chukar, et tous les auteurs sont d'accord sur ce point, est asiatique par ses origines. Il en existe toujours aux Indes, comme en Chine, comme en Afghanistan, où elle serait par excellence l'oiseau gibier de montagne et, en particulier, des monts Himalaya.

Importée en Amérique, d'abord dans l'État de San Francisco, elle ne trouve pas dans ce district côtier les conditions adéquates à ses habitudes.

Acclimatée ensuite par Auguste Bade, directeur de l'une des fermes nationales d'élevage en Californie, elle a donné lieu aux plus grands espoirs pour le repeuplement cynégétique des étendues semi-arides ou désertiques qui, à partir de 600 ou 700 mètres, sont fréquentes en Californie comme dans les États voisins.

Il n'existe pas moins, à l'heure présente, de vingt fermes qui élèvent les chukars aux États-unis ; c'est de celles-ci que nous sont parvenus des œufs d'abord, puis des oiseaux ensuite.

III. Habitudes de la perdrix chukar.

— Voici la description qu'en donne David B. Greenberg :

« Le chukar a des habitats très variés, pourvu qu'il y trouve tranquillité et altitude. On le trouve dans les lieux les plus chauds et les plus arides ; ce qui fait penser aux indigènes qu'il se nourrit de pierres. »

Dans le massif de l'Himalaya, la perdrix chukar est aussi bien l'oiseau des collines couvertes d'une riche végétation que des versants montagneux arides couverts d'une végétation xérophile très clairsemée. Elle ne craint pas la neige, jusqu'à 12.000 ou 13.000 pieds de hauteur.

Cette diversité dans l'habitat est rare chez les oiseaux. Il faut cependant préciser que le chukar redoute l'humidité ou les fortes pluies.

Le chukar est omnivore, avec prédominance de grains de toutes sortes, d'herbes, d'insectes et de larves, dont il est très friand ; il ne néglige pas pour autant les racines de certaines graminées !

La femelle fait son nid à même le sol, dans une légère dépression, à l'abri d'une pierre, d'une touffe d'herbe ou d'une cépée. Elle le tapisse de feuilles ou d'herbes sèches. Le nid ne comporte pas plus de 14 œufs, avec un minimum de 5 et une moyenne générale oscillant de 8 à 12 œufs. Ceux-ci sont de couleur jaune pâle ou gris verdâtre, avec quelques pigmentations roses ou rouges.

Dès la naissance, la compagnie, composée des parents et de leur progéniture, est constituée. Il en est ainsi jusqu'au début de l'hiver, où plusieurs compagnies se rassemblent par groupes de 30 ou de 50, pour passer les moments difficiles dans des lieux plus abrités et plus cléments. Au printemps, les groupes se dissocient, les pariades se constituent, et la période des amours commence.

La compagnie ou le groupe, surpris par l'homme, piète pendant quelques dizaines de mètres avant de prendre son essor. Son vol bruyant est puissant et rapide ; en terrain accidenté, la ligne de plus grande pente est sa défense naturelle pour rejoindre un autre versant. Dans cette nouvelle remise, la compagnie s'éparpille quelque peu ; ses unités cherchent individuellement un refuge au hasard de ses instincts.

La relève, qui a lieu par éléments plus ou moins isolés, s'avère plus difficile dans un pays où le chien de chasse n'est que l'exception.

L'appel du chukar est bruyant, très bruyant. Sa nature est très batailleuse, ce qui explique peut-être son amour des lieux très solitaires.

Dans le Nord des Indes, sa mise en captivité s'est toujours révélée extrêmement facile.

A côté de l'appréciation de ce savant, donnons maintenant celle d'un chasseur anglais, qui est reproduite par H. L. Betten dans la revue américaine : Field and Stream. On y verra que savants et chasseurs, dans leur amour mutuel de la nature, dans leur recherche de la vérité scientifique ou sportive, sont arrivés à des constatations quasi identiques.

« Le chukar, écrit ce sportsman anglais, est vraiment un excellent oiseau. C'est mon gibier favori, après la grouse de ma terre natale, dans la contrée couverte de pâturages au pied des monts Himalaya, au-dessous de la limite de la végétation forestière ; il ne se tient jamais au bois ni dans les couverts épais. Vous le trouverez le long du lit desséché des torrents et parmi les terrains rocheux hors des cultures, dans les broussailles rabougries, en haut des ravins, sur les pentes herbues, mais rarement dans les terres cultivées. Il est aussi rapide en vol que notre grouse et notre perdrix grise.

» Le chukar est très habile à se dissimuler. La plus petite touffe d'herbe lui suffit, et il se glisse souvent entre les rocs et dans les fissures où peu de chiens sont capables de le sentir. Bien souvent, quand une compagnie se lève, elle s'éparpille dans une vaste zone d'herbe ou de terrains nus. Regardez tant que vous pourrez, vous apercevrez rarement un oiseau blotti : généralement il attend que vous soyez passé et, quand vous lui avez tourné le dos, il fuit à tire-d'aile. Les indigènes croient que ce gibier peut changer de couleur pour se confondre avec les lieux où il se pose, mais c'est inexact.

» À l'approche du froid, les chukars s'assemblent, comme les poules de prairie au Canada, en bandes de cent et davantage. J'ai vu plus de 200 oiseaux dans un même volier. Après les pluies d'automne et le froid vif, ils deviennent sauvages ; ils sont alors disposés à courir. Une décharge au départ, quelle que soit la distance, est un bon remède, cela les amène à tenir comme des pieux.

» De quelle façon ce gibier se comporterait-il s'il était beaucoup chassé, je n'en sais rien. Là où nous chassons, les chukars sont si nombreux et si prolifiques que nous n'avons pas été amenés à nous poser la question. Réellement je ne crois pas que l'on puisse trouver pour les pays secs de l'Ouest un plus beau gibier que cette perdrix de l'Himalaya, si vous pouvez l'introduire en Amérique. »

F. VIDRON.

Le Chasseur Français N°655 Septembre 1951 Page 518