Les canoéistes comptent dans leurs rangs de nombreux et
fervents pêcheurs qui pratiquent le plus souvent la mouche ou le lancer léger
et peuvent, avec autant de succès, s'adonner à d'autres pêches, suivant leur
tempérament.
Descendant des rivières accidentées, peu fréquentées et dont
certaines parties ne peuvent être atteintes qu'en bateau, le canoéiste est à
même de poursuivre le poisson jusque dans ses retraites les plus cachées. Son
expérience des eaux vives, qui lui indique avec précision la nature des fonds
et leur profondeur, lui a également appris à suivre les moindres caprices du
courant et des remous. Au cours des longues journées passées sur l'eau, il a eu
maintes fois l'occasion d'observer les différentes espèces de poissons, d'étudier
leurs mœurs et d'en déduire de précieux enseignements.
Notons que le canoë retrouve là l'utilisation de ses débuts
puisque à l'origine, au Canada, il servait à rejoindre les meilleurs
territoires de chasse ou de pêche ; l'usage s'en est du reste conservé, et
de nombreux pêcheurs canadiens l'utilisent encore pour les mêmes fins, aucune
embarcation n'étant venue lui enlever sa supériorité dans ce domaine.
Nous voyons donc, avant tout, que le canoë permet au pêcheur
de gagner les emplacements les plus favorables, et ceci d'autant plus
facilement qu'il passe sur les moindres fonds et se faufile parmi les rochers
et la végétation sans le moindre bruit s'il est adroitement conduit. Et, là, le
canoë nous ouvre d'autres possibilités avec la faculté de pêcher à bord, en
nous déplaçant au gré des besoins. Par exemple, sur un lac, un étang ou une
rivière recelant du brochet, il est facile de suivre les herbiers à la cadence
la plus favorable pour pêcher à la traîne ou d'aller prospecter tour à tour les
points susceptibles de réserver d'agréables surprises. N'oublions pas que le
canoë est léger et rapide, et qu'avec lui vous aurez vite traversé une étendue
d'eau importante pour rejoindre la rive qui vous semble la plus favorable.
Les pêches les plus captivantes sont possibles en canoë, et
vous lancerez votre mouche, ou tout autre appât, avec précision si votre canoë
est habilement conduit par l'équipier arrière sachant pagayer sans bruit et
sans heurt en maintenant le canoë à la meilleure distance de la rive. Le mieux
est alors de constituer une équipe de deux pêcheurs lançant et pagayant tour à
tour ; le bateau est dirigé par un équipier averti participant lui-même à
la pêche, capable d'observer, de prévoir et de provoquer les plus heureux
résultats.
Mais, diront certains, tout ceci demande une connaissance
approfondie du canoë et ne peut satisfaire le sédentaire amateur de pêche au
coup qui recherche une embarcation stable dans laquelle il veut passer à l'aise
des heures entières, confortablement assis sur un siège surélevé et stable.
Seulement la barque à fond plat qui répond habituellement à ses désirs est bien
lourde à traîner, l'encombrement des avirons interdit l'accès de certains bras
étroits où le poisson aime se réfugier ; le moulin d'aval et celui d'amont
sont des obstacles infranchissables qui limitent le champ d'action, et,
pourtant, notre pêcheur au coup aimerait parfois changer de secteur.
Le canoë peut lui apporter les avantages de sa légèreté
avec, en plus, une stabilité à toute épreuve. Il suffit d'adopter le principe
très ancien de la pirogue à balancier. Sans chercher à confectionner un
accessoire compliqué, il est facile de faire un flotteur en bois de faible
densité, vaguement profilé aux extrémités, en s'inspirant du modèle des
pirogues les plus rustiques. Deux traverses le relieront aux barreaux du canoë,
à l'aide de sandows, et vous serez étonnés de la facilité avec laquelle vous
déplacerez votre engin. Du reste, il sera toujours facile de rentrer le
flotteur à bord et de rendre au canoë ses qualités intégrales. L'épuisette, la canne
de rechange trouveront place sur les traverses sans que vous risquiez jamais de
marcher dessus, car vous aurez la possibilité de vous tenir debout et de vous
déplacer dans un tel canoë.
Le canoë peut être également un auxiliaire utile pour la
petite pêche en mer. Avec lui, il est possible, sans trop s'éloigner du rivage,
d'aller poser ou relever des lignes par temps calme. Il permet de gagner
aisément une pointe rocheuse qui demanderait une longue et fatigante marche d'approche,
ou de débarquer sur un îlot où la pêche est généralement profitable.
De toutes les pêches maritimes possibles en canoë, la
palangrotte, pratiquée surtout en Méditerranée, est certainement la plus
amusante ; elle demande une surveillance continuelle des lignes déplacées
au gré du vent et des vagues, et les facilités d'évolution du canoë facilitent
grandement la tâche en rendant la pêche plus attrayante.
Dans ce domaine marin, le balancier peut rendre de grands
services grâce à la stabilité, donc à la sécurité, qu'il procure. On peut alors
pêcher du bord, soit sur place ou en traînant une ligne, cette dernière pêche
étant facilitée par l'emploi d'une petite voile.
Les chasseurs sous-marins qui utilisent le canoë connaissent
les avantages que celui-ci leur apporte pour gagner des lieux de chasse
éloignés, transporter leur matériel ou le produit de leur pêche et prendre un
repos qui leur permet d'opérer plus longtemps aux points inaccessibles aux
chasseurs retenus au rivage, faute d'une embarcation leur assurant, en outre,
une très grande sécurité dans la pratique d'un sport non exempt de danger.
G. NOËL.
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