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Les élevages familiaux

Les situations oblitérées.

— Les citadins retirés des affaires, dont les ressources se composent uniquement du rapport de leurs économies placées en titres de rente ou encore de modestes retraites dont la valeur intrinsèque diminue de plus en plus, et qui ne trouvent pas à s'employer dans des occupations subsidiaires, ont intérêt à se retirer à la campagne dans le but d'équilibrer leur budget devenu décadent.

Mais il ne faut pas croire qu'un simple changement de résidence déclenchera les écluses du Pactole si on se lance dans des entreprises qui ne sont pas en rapport avec les aptitudes et les disponibilités que l'on peut y consacrer. Avant de décider quoi que ce soit, on devra tenir compte de l'âge, c'est-à-dire des moyens physiques, générateurs de main-d'œuvre, des connaissances professionnelles que l'on possède, ainsi que des capitaux dont on peut disposer, sans jamais s'engager à fond.

Il va sans dire que les ex-campagnards, surtout ceux qui ont conservé au village un modeste héritage et ceux qui se sont rendus acquéreurs d'une petite propriété rurale, seront avantagés. Ils auront moins de dépenses à faire pour y créer un élevage de rapport que les citadins dans l'obligation d'acheter ou de louer un domaine à leur convenance. Toutefois, s'il est toujours possible de trouver une solution pour chaque cas particulier, une étude préalable et attentive est de rigueur, si on veut éviter de se fourvoyer dans des entreprises pour lesquelles on ne possède pas les capacités nécessaires.

Quoi qu'il en soit, en s'inspirant des bons ouvrages, avec du travail et de la bonne volonté, il est toujours possible de produire les œufs, les poulets, les lapins, les pigeonneaux, le lait, le miel, etc., rentrant dans les menus familiaux, en vendant le surplus pour augmenter ses ressources en numéraire.

Mise en valeur des domaines.

— Bien que l'état actuel des propriétés de campagne laisse souvent à désirer, elles comportent presque toujours des dépendances pouvant être aménagées à peu de frais, pour y installer de petits élevages, en plus de la maison d'habitation. En premier lieu, on arrêtera son attention sur les dépendances (remises, logettes, appentis, etc.) pouvant être restaurées pour servir de logement aux animaux de basse-cour, ainsi que sur le terrain attenant, permettant l'installation des parquets et les cultures de circonstance. Dans le cas où les constructions annexes manqueraient, si on ne pouvait pas les édifier en neuf, à grands frais, on les établirait en rustique, pisé, clayonnage, torchis, chaume, etc., ou bien on s'adonnerait à des élevages de plein air (porcs, abeilles, escargots, palmipèdes logés dans des huttes, dindons, etc.).

C'est donc d'après les disponibilités de locaux et de terrain que l'on décidera du choix des élevages, et l'on admettra que, si l'on veut se spécialiser du côté de la production des œufs, de grands parcours herbeux seront très utiles aux pondeuses, tandis que l'élevage des poulets et des canetons peut être entrepris pour ainsi dire en chambre, par les méthodes américaines des batteries et des breeder houses.

La situation de la propriété, la nature du terrain, le climat, etc., sont également à prendre en considération. Si on se trouve à proximité d'un ruisseau ou d'une pièce d'eau, les canards et les oies s'y trouveront bien, et l'on pourra y faire de la pisciculture ou de l'élevage d'écrevisses. En terrain sec, avoisinant les friches, l'élevage demi-libre des lapins et celui des dindons, qui trouveront sur leur parcours une partie de leur nourriture, devront donner de bons résultats.

Les installations familiales.

— Dans le cas où les élevages seraient simplement orientés du côté de l'approvisionnement familial en œufs, poulets, lapins, lait, fromages, miel, etc., les peuplements se feraient à une densité en rapport avec le nombre de convives à sustenter.

En partant d'un ménage de deux personnes désirant disposer, bon an mal an, d'autant d'œufs qu'il y a de jours, d'un poulet et d'un lapin alternativement chaque semaine, d'un couple de pigeonneaux également chaque semaine, d'un litre de lait par jour et d'une quinzaine de kilogrammes de miel tous les ans, on porterait l'effectif des divers élevages à trois poules, une lapine portière, sept à huit couples de pigeons, une chèvre laitière et une ruche à cadres. Enfin, on élèverait tous les ans deux ou trois couvées de poussins avec des oeufs provenant de poulaillers contenant des coqs.

Dans les familles de quatre personnes, on doublerait les effectifs, et l'on élèverait tous les ans cinq couvées de poussins. Avec deux bonnes ruches à cadres, on disposerait du miel nécessaire à la consommation sur table et à la fabrication du pain d'épice et des bonbons. Les deux chèvres, au rendement de 700 à 800 litres, suffiraient pour la consommation en nature et la fabrication des fromages.

Pour loger tout ce petit bétail, à défaut d'une construction existante, aménagée pour cet objet, en édifierait une bâtisse mesurant 4 mètres de long sur 3 mètres de large, en utilisant comme matériaux la brique, les parpaings, le béton coulé ou le ciment armé. Cette logette se composerait au rez-de-chaussée, à droite et à gauche, de deux locaux de 1m,50 sur 3 mètres, à usage de poulailler et de chèvrerie, avec au centre, en retrait, un clapier comprenant plusieurs cases superposées en plaques de fibrociment. Dans le grenier, sur le pignon face à l'est, on placerait le pigeonnier, et le reste servirait au logement des denrées, fourrages et grains destinés aux animaux.

Telles sont les grandes lignes à adopter lorsqu'on a uniquement en vue l'approvisionnement familial, ce qui n'empêche pas de donner un peu plus d'extension aux élevages, si on voulait, avec le surplus, s'assurer quelques ressources pécuniaires supplémentaires.

En produisant une partie des denrées consommées par le bétail, on augmenterait le bénéfice réalisé sur les élevages entrepris, lesquels varieraient à l'infini avec les différentes branches de la basse-cour.

C. ARNOULD.

Le Chasseur Français N°655 Septembre 1951 Page 554