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La Crèvecoeur et la Coucou de Rennes

La race de Crèvecœur doit son appellation au village qui porte ce nom, dans le Calvados.

Elle existe en noire, blanche, et en ardoisée, mais c'est la variété noire qui constitue le type de la race, et c'est du standard de cette variété que nous parlerons aujourd'hui.

Le corps est assez volumineux, avec une poitrine proéminente, le dos large, les ailes fortes ainsi que la queue, qui doit être portée perpendiculairement au dos. Les tarses sont courts et nus, de couleur gris sombre ; les doigts sont au nombre de quatre, de la même couleur que les tarses.

La tête, forte et longue, comporte un attribut caractéristique de la race : au milieu d'une forte huppe, la crête s'élève en forme de corne double, bien détachée et sans ramifications, ce qui donne une physionomie tout à fait particulière à l'animal. Celui-ci porte également une cravate descendant jusqu'au niveau inférieur des barbillons, qui doivent être ronds et rouges.

Enfin le plumage doit être entièrement noir, avec des reflets verts.

Les poids moyens sont de 2kg,500 à 3kg,500, et même exceptionnellement 4 kilogrammes chez le coq, et 2kg,500 à 3 kilogrammes chez la poule.

Cette dernière est assez bonne pondeuse, les moyennes officielles donnent 150 œufs par an, mais aucun éleveur n’a pratiqué jusqu'à ce jour, à ma connaissance, le contrôle au nid-trappe et la sélection dans le but d'améliorer cette production. L'œuf est blanc et assez fort.

La Crèvecœur n'a pas la réputation d'être une bonne couveuse, mais sa qualité essentielle réside dans la finesse de sa chair. Pendant des siècles, les poulets de la vallée d'Auge et des régions avoisinantes ont eu une juste renommée. Il est regrettable que la race de Crèvecœur, après avoir connu une vogue méritée, ne figure pas plus souvent dans les grandes expositions, où son apparition est maintenant presque considérée comme une rareté.

Des éleveurs sérieux ont essayé, depuis quelques années, de sauvegarder le type, en maintenant autant que possible le poids, et il est à souhaiter que ces derniers soient encouragés et que leurs efforts, soient récompensés.

La race Coucou de Rennes.

— Originaire des provinces de l’Ouest comme la Crèvecœur, la Coucou de Rennes est surtout élevée en Ille-et-Vilaine, bien que répandue en basse Normandie et même dans le Nord, où on la désigne également sous les noms de Coucou de Flandre, Coucou, de France, Coucou picarde et Coucou du Nord.

C'est une jolie volaille, active et vigoureuse, à plumage coucou, c'est-à-dire barré gris bleu sur fond blanc ; ou barré noir bleu sur fond bleuté, selon qu'il s'agit de teinte claire ou foncée.

Le coq porte fièrement la tête et a l'allure vive. La tête est assez fine, avec crête simple et droite ; les dents bien séparées, à moins qu'il ne s'agisse de la variété à crête double, admise également. Barbillons, oreillons et joues sont rouges. Le corps est fort, avec de larges épaules et une poitrine charnue. Le dos est long, légèrement incliné en arrière, et se termine par une queue épaisse et presque verticale ; les pattes sont assez fortes et écartées, avec tarses blanc rosé, nus, et quatre doigts de même couleur.

L’éleveur doit s'attacher à éliminer les sujets présentant des défectuosités telles que les oreillons blancs, la crête couchée chez le coq, la forme trop marquée dans le type Orpington ; la queue en éventail, les pattes jaunes ou ardoisées ; mais, comme dans toutes les races à plumage coucou, c’est dans le plumage que se présentent le plus souvent les défauts les plus visibles : plumes de couleur noires, blanches ou jaunes, mauvais aspect du ton général de fond, etc.

La poule Coucou de Rennes est une assez bonne pondeuse ; elle donne 160 œufs en moyenne, à coquille teintée, et pond à partir de l'âge de six mois et demi à sept mois. Elle couve bien, mais il ne faut pas exagérer, comme trop d'éleveurs ont tendance à le faire, le nombre des œufs qui lui sont confiés, surtout avec les couvées, précoces de janvier-février, où les œufs de l’extérieur ne se réchauffent pas suffisamment ; mettez 11 œufs sous les poules de moins de 2 kilogrammes et 13 sous les poules de 2kg,500 à 3 kilogrammes. La Coucou de Rennes conduit bien ses poussins, qui sont étonnamment vigoureux. Cette qualité est très marquée dans la race et elle est certainement acquise par hérédité et accoutumance aux variations de température fréquentes dans son pays d'origine. En plus de sa rusticité, la précocité n'est pas une des moindres qualités de cette volaille qui donne facilement de beaux poulets de 3 livres à douze semaines et d'excellents rôtis de 2 kilogrammes à quatre mois.

La chair de la Coucou de Rennes est de toute première qualité ; pour l'affiner encore, distribuez, trois semaines avant le sacrifice, des pâtées de riz ou de farine d'orge délayées au lait écrémé ou au petit-lait.

Bien que s’adaptant aux parquets gazonné suffisamment vastes, il est incontestable que le régime de la liberté est celui qui convient le mieux à la race que nous venons d’étudier aujourd’hui ; elle y acquiert plus de volume et  encore plus de rusticité, et n'y est à peu près jamais malade.

Choisissez les reproducteurs dans les couvées, de février-mars. Les coquelets et poulettes ont ainsi le temps d'atteindre leur plein développement avant la mauvaise saison, et sélectionnez les coqs de façon à ne garder que des oiseaux puissants pesant, adultes, de 3 à 3kg,500.

En conclusion, je suis persuadé que les éleveurs qui s'intéressent aux deux races dont nous venons de parler n’auront pas à le regretter, surtout dans la région Ouest de la France, où elles sont particulièrement bien adaptées, et j'espère que dans les années à venir, les lot d’exposition seront mieux garnis dans ces variétés.

Après avoir tenu le rôle de premier plan dans la palette des races typiquement françaises, il est navrant de constater qu'il n'y avait pas un seul exposant de Crèvecœur à l'Exposition internationale de février 1951, à Paris, et qu’on y trouvait un seul parquet de Coucou de Rennes.

R. GARETTA.

Le Chasseur Français N°656 Octobre 1951 Page 618