Les problèmes posés par la fabrication des aubes de turbines
à gaz des moteurs à réaction sont excessivement ardus.
Il n'entre pas dans le cadre de cette étude d'examiner en
détail les différentes phases de cette fabrication.
Rappelons simplement que le métal employé dans la
fabrication des aubes de réacteur est particulièrement rebelle à l'usinage.
D'autre part, le prix des métaux austénitiques ou réfractaires utilisés pour
ces fabrications se situe actuellement autour de dix mille francs le kilo à
l'état brut.
L'usinage d'une seule aube nécessite plus de cinquante
opérations et l'utilisation d'une trentaine de machines-outils classiques ou
spéciales.
À chaque opération d'usinage succède une opération de
contrôle très rigoureuse.
Un contrôle final, non moins rigoureux, des profils et des
formes, de l'équilibrage, est ensuite réalisé grâce à une installation
électronique.
Les essais et contrôle au banc terminent le cycle de
fabrication et de montage.
Cependant, si ces divers contrôles donnaient satisfaction
aux techniciens et ingénieurs en ce qui concerne la fabrication des aubes,
ceux-ci ne possédaient pas de moyens de contrôle pour vérifier leur
comportement en vol.
Les ingénieurs anglais, dont on connaît l'immense compétence
dans le domaine des réacteurs, viennent certainement de combler cette lacune.
Les aubes de turbines émettrices.
— Un avion à réaction anglais vole actuellement avec,
dans sa turbine, des aubes spéciales qui transmettent des signaux de radio au
sol. Ces signaux donnent un « commentaire continu » des efforts et
des fatigues auxquels sont soumises les aubes.
Suivant la Société des constructeurs d'avions de
Grande-Bretagne, les experts anglais pensent que les recherches entreprises
avec cet appareil les aideront à apporter d'importants perfectionnements à la
forme des aubes, partie la plus délicate du moteur, et aussi à résoudre
certains problèmes de thermodynamique.
Ressemblant à un ventilateur circulaire, la tâche des aubes
est de transformer les gaz entrant dans la turbine en une poussée atteignant
10.000 CV. Chaque aube doit être usinée et polie avec le plus grand soin. En
marche, les aubes tournent à 14.000 tours-minute, et sont soumises à une
température de 700 degrés C.
Le premier de ces essais spéciaux a été fait par les usines
Rolls-Royce, qui ont installé des compteurs électriques à l'intérieur de
certaines aubes et les ont reliés à un émetteur de radio. Quand le moteur
tourne, les efforts subis par le compteur logé dans l'aube sont transformés en
signaux radio-électriques. Ceux-ci sont « dirigés » vers le sol, et
un enregistreur magnétique les prend sur son ruban. Le pilote d'essai peut
aussi enregistrer ses commentaires sur les rubans en même temps que l'effort
est enregistré. Par la suite, les techniciens transforment l'enregistrement des
rubans en image sur un tube cathodique, ce qui leur permet d'étudier un « graphique »
continu des efforts supportés par l'aube et d'écouter ce que le pilote dit au
même moment.
En se basant sur les résultats de ces essais, les experts
sont maintenant en mesure, pour la première fois, d'établir une corrélation
entre les efforts réels supportés par ces aubes — données que jusqu'ici on
avait estimées approximativement, mais jamais encore mesurées avec exactitude
en plein vol.
Au fur et à mesure que le disque de la turbine tourne à une
très grande vitesse, l'extrémité des aubes tourne à une vitesse de plus de
1.100 kilomètres à l'heure, et cette grande vitesse signifie que la force
centrifuge est formidable : elle peut atteindre 8.000 kilogrammes par
millimètre carré de surface d'aube.
La force centrifuge n'est pas la seule fatigue supportée par
l'aube ; il faut aussi compter sur les efforts aérodynamiques causés par
le courant des gaz à haute vitesse. Au lieu de couler régulièrement, ces gaz
frappent les aubes en une succession de coups brusques, si bien que tout le
rythme des aubes tournantes change aussi constamment et que les aubes tendent à
se tordre et à se courber.
Et le dispositif électronique de pilotage automatique ...
— Des vols d'essai ont commencé avec des appareils
munis d'un dispositif électronique destiné à atténuer les effets que produisent
les rafales et les trous d'air sur les avions.
A présent, si un pilote se heurte à un trou d'air, il peut
adoucir le choc en ajustant aussitôt les ailerons. Cependant, il faut qu'il
sente d'abord le choc. Les pilotes automatiques agissent exactement de la même
façon.
Le nouveau « Gust Alleviator » est une sorte
d'antenne électronique rigide, qui pointe droit à l'avant de l'appareil et qui
détecte les trous d'air avant que l'avion les ait lui-même atteints. Bien que
la détection ne se produise qu'une fraction de seconde avant, cela suffit pour
qu'un signal soit transmis automatiquement par le mécanisme électronique qui
ajuste instantanément l'aileron dans la meilleure position possible pour
adoucir le choc au moment même où il se produit.
Pour que ce réglage soit fait au moment voulu, l'appareil
électronique retarde automatiquement son signal d'un dixième de seconde, de
façon qu'il soit tenu compte du rapport entre la distance qui sépare l'aile du
dispositif et la vitesse de l'avion.
Outre qu'il accroît le confort des passagers, le « Gust
Alleviator » automatique peut aider les ingénieurs à améliorer la
structure des ailes. Celles-ci sont, à l'heure actuelle, dessinées de façon à
avoir une large réserve de force pour faire face occasionnellement à la lourde
charge qui leur est imposée quand l'avion traverse une rafale sans avertissement.
Cette charge (et, partant, la réserve de force de la structure) sera beaucoup
moins lourde pour un avion muni de ce nouvel appareil électronique.
Maurice DESSAGNE.
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