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Cotières et ados

Le Jardinier amateur doit imiter le jardinier professionnel, qui s'efforce sans cesse d'augmenter la température moyenne du milieu dans lequel il opère : outre les couches, qui suppléent à la chaleur solaire en fournissant une chaleur artificielle, on utilisera les côtières et, à défaut, les ados.

Les Côtières au jardin

On appelle ainsi une planche, ou plate-bande, située au pied d'un mur, et à laquelle on donne une certaine inclinaison en vue de lui accorder au maximum les bienfaits des premiers rayons solaires du printemps, ainsi que les derniers rayons d'automne.

Aménagement de la côtière

Comme largeur, on lui donnera 1 mètre à 1m20 au maximum et on inclinera sa surface de 15 à 20 centimètres par mètre, afin de faire arriver le plus perpendiculairement possible les radiations solaires. Pour mieux faire absorber toute la chaleur reçue, la surface sera, si possible, terreautée : la couleur noir foncé du terreau absorbera et retiendra la chaleur. D'autre part, le mur joue aussi un rôle utile : il réfléchit (surtout si on a eu soin de le blanchir à 50 ou 60 centimètres du sol) la chaleur solaire et élève encore ainsi la température ; ce qui, au total, fournira un échauffement printanier ou tardif très intéressant.

L'exposition de la côtière est d'une importance capitale.

  • Celle exposée au midi est la plus chaude et elle permet d'obtenir au printemps les premiers « légumes », précoces ou hâtés, les plus chers en saison.
  • Celle exposée à l'est reçoit au matin les premiers rayons solaires, mais il faudra redouter les pertes dues aux gelées blanches (protection nocturne nécessaire).
  • Celle exposée à l'ouest reçoit aussi les chauds rayons du soleil au moment du maximum diurne de température, et les dégâts dus aux gelées blanches tardives sont moins à redouter.
  • Celle exposée au nord est froide, mais, comme elle est fraîche en été, elle sera précieuse pour les semis en stratification et les semis délicats d'été: cerfeuil, cresson. En outre, elle pourra être utilisée pour la conservation des légumes résistants au froid (choux, salades d'hiver) qui, au lieu de passer par des alternatives de gel et de dégel, seront presque constamment gelés et ne pourriront pas.

Pratique de l’utilisation des côtières

Suivant leur orientation, on pourra y cultiver des légumes aux exigences diverses.

  • La côtière du midi sera garnie des légumes délicats, exigeant beaucoup de chaleur : aubergines, melons, tomates, et hâtifs : premières saisons de carottes, salades, radis. Pendant l'hiver, cerfeuil et persil y trouveront une situation de choix.
  • La côtière de l'est est toute désignée pour les cultures de printemps : choux hâtifs, oignons blancs, laitues. On n'y sèmera jamais de haricots, ni de pommes de terre.
  • La côtière de l'ouest pourra recevoir les pommes de terre hâtives et les haricots.
  • La côtière du nord sera occupée par des pépinières de plants et la culture de plantes redoutant la chaleur estivale : cerfeuil, persil, estragon, etc... Choux et scaroles y seront conservés au début de l'hiver.

Ados

A défaut de murs bien exposés permettant l'installation des côtières, on recourra aux ados : cette pratique horticole est insuffisamment répandue et pourtant très recommandable pour les semis, les plantations précoces, les primeurs, et aussi pour effectuer les semis difficiles pendant les chaleurs.

Pratique de la constitution d'un ados

On choisira l'emplacement face au midi, car les légumes pousseront d'autant plus vite que les rayons solaires arriveront plus directement sur le sol ; face au nord pour les semis à effectuer pendant les chaleurs.

On procède alors ainsi : on bêche convenablement le sol et on trace des lignes plus ou moins éloignées selon la largeur à donner aux ados (environ 1 mètre), puis, avec la bêche, on enlèvera la terre du devant pour recharger le derrière et on battra avec le dos de l'outil le haut qui formera ainsi une sorte de glacis pour y faire tenir la terre, ou, si celle-ci n'est pas suffisamment compacte, on la maintiendra à l'aide de quelques planches qui, de plus, protégeront du froid.

La pente à donner aux ados variera avec la consistance du terrain : si celui-ci est suffisamment consistant, compact, on pourra aller jusqu'à 25 à 30 centimètres de pente par mètre ; en terrain insuffisamment consistant, on ne dépassera pas 10 centimètres par mètre pour une planche d'une largeur d'un mètre, car les eaux entraîneraient les grains.

On passera enfin le râteau sur le tout et on étendra l'épaisseur convenable de terreau.

L'utilisation de l'ados est une pratique horticole excellente :

  • 1° La végétation est plus hâtive que par le procédé de culture à plat : au moins quinze jours de précocité, et on est toujours sûr d'avoir de bons résultats. Pratiquons donc l'usage des ados pour les premières cultures : dès janvier et février.
  • 2° Dans un jardin mal orienté ou dans celui où l'on ne peut monter de couche, on y pratiquera l'ados.
  • 3° Les petites graines (salades, radis, etc.) sont très recherchées des petits oiseaux, des passereaux principalement, qui en sont particulièrement friands. Or ils ne s'attaquent pas aux semis sur ados, se tenant, toujours par crainte naturelle, dans les rayons de part et d'autre.
  • 4° En automne, employons les ados pour recevoir les lignes de cloches sous lesquelles on élèvera, en vue d'un repiquage ultérieur, les plants de salade d'hiver.

BOILEAU.

Le Chasseur Français N°658 Décembre 1951 Page 734