Malgré le perfectionnement des appareils de battage, les
grains sont loin d'arriver au moulin parfaitement propres et un nettoyage
sévère S'impose. S'il existé encore quelques établissements mal outillés à cet
égard, dont on souhaiterait qu'ils ne travaillent plus que les céréales
secondaires dont la mouture est destinée à l’alimentation du bétail, la plupart
des minoteries sont maintenant pourvues d'un outillage varié et perfectionné.
C'est que le travail n'est pas simple, et certaines
impuretés sont extrêmement difficiles à séparer du blé, tant elles ont de
similitude avec lui par leur forme, leurs dimensions ou leur masse. Il sera
relativement facile, par exemple, de séparer l'avoine et le blé, mais beaucoup
plus difficile de retirer les grains de seigle. Il serait, cependant, vain
d'espérer obtenir des farines parfaites avec du grain mêlé d'impuretés et on
estime qu'un pourcentage de 2 p. 100 est suffisant, dans les cas les moins
défavorables, pour que la farine soit considérée comme dépréciée.
Parmi les impuretés, certaines sont redoutées en ce qu'elles
risquent de détériorer les appareils, comme les petits graviers, les diverses
matières minérales et les débris métalliques ; d'autres incorporent simplement
à la farine un élément étranger, lui enlevant de sa qualité et de sa blancheur;
c'est le cas de la plupart des graines, mais il en est qui sont capables de lui
donner un goût ou une odeur désagréables, et même certaines qui sont
franchement toxiques.
La graine de mélilot, par exemple, donne à la farine une
odeur de foin, et l'ail, si commun dans certaines régions, et particulièrement
dans l'Ouest de la France, est franchement désagréable par son odeur ; il a, en
outre, l'inconvénient de « graisser » les cylindres, ce qui oblige
les moulins qui travaillent habituellement des blés « aillés » à
disposer d'un appareillage spécial.
Peuvent être considérées comme toxiques les graines de la
nielle du blé, qui contiennent des principes amers capables de provoquer de la
diarrhée, celles de l'ivraie enivrante, voisine du ray-grass, qui provoquent
des vertiges et des vomissements, celles de la gesse, qui peuvent causer le
lathyrisme, maladie caractérisée par une paraplégie du train postérieur, et le
seigle ergoté.
L'ergotisme, qui se manifeste même à faible dose, peut
devenir mortel quand le pourcentage d'ergot mêlé à la farine atteint 5 p. 100;
une telle proportion ne peut que bien rarement se trouver dans la farine de
blé, mais elle peut se trouver dans la farine de seigle, pour laquelle il
convient d'être d'autant plus prudent que les moulins qui travaillent régulièrement
cette céréale sont parfois médiocrement outillés.
On peut rencontrer dans la farine de blé une certaine
quantité de seigle, jusqu'à 5 p. 100; cela ne présente pas grand inconvénient
si le seigle est sain, mais il pourrait en résulter des troubles graves à
caractères nerveux et des troubles de circulation si le seigle était ergoté.
Pour assurer un nettoyage parfait des grains, il convient
d'utiliser toute une série d'appareils que nous allons rapidement passer en
revue ;
Tamis. — Les tamis sont des appareils pourvus de
grilles perforées par des ouvertures de dimensions et de formes diverses.
Certaines graines passent par les trous ; les autres ne peuvent pas passer.
Avec deux tôles, par exemple, de dimensions différents, on peut séparer la
masse à tamiser en trois lots : les grosses impuretés, le blé et les impuretés
de même dimension que lui (comme l'avoine, l'orge, le seigle et diverses
graines rondes), et enfin les petites impuretés.
Aspirateur. — L'aspirateur enlève les impuretés d'une
densité sensiblement inférieure à celle du blé, comme les avoines légères.
Séparateurs à alvéoles. — Ces appareils, dont il
existe plusieurs types bien distincts, sont formés de tambours cylindriques
munis d'alvéoles dont les dimensions et la forme sont calculées de façon que
les grains de blé s'y logent facilement, alors que les graines plus longues n'y
peuvent tenir, ou au contraire de façon que le blé n'y tienne pas, tandis que
d'autres graines y tiennent. Les appareils les plus perfectionnés possèdent des
alvéoles de diverses tailles, ce qui permet de classer les produits d'après
leurs dimensions et leur forme.
Séparateurs toboggans. — Ces appareils servent à séparer
les graines rondes des blés à grains courts et des grains cassés. La force centrifuge
agit de façon différente sur ces divers grains, ce qui permet de les séparer.
Laveurs de grains. — La poussière qui adhère aux
grains est enlevée par le lavage. On laisse flotter le blé dans un récipient où
passe un courant d'eau. Le lavage permet en outre d'éliminer la terre et même
de menues pierres et des particules métalliques qui pourraient se trouver
mêlées au blé ; elles tombent au fond du récipient.
Brosses à blé. — Les brosses débarrassent le blé de
la poussière, des spores de champignons qui peuvent s'y être collées et des
poils propres du grain, lesquels constituent une impureté. L'action des brosses
est complétée par celle d'aspirateurs.
Appareils magnétiques. -— Ces appareils servent à
enlever les particules de fer ou d'acier. Ils sont inefficaces contre les
métaux non ferreux, mais ceux-ci sont éliminés par les autres appareils, et
notamment par le lavage.
Tout ceci forme un ensemble assez compliqué, mais les
résultats obtenus peuvent être considérés comme parfaits avec une efficacité
qui atteint pratiquement 100 p. 100. Il y a donc toute sécurité en ce qui
concerne la qualité de la farine, qui comprend exactement ce que le meunier a
voulu y mettre, ou ce que les règlements lui ont imposé. La question du pain « complet »
est encore loin d'être résolue et la farine peut être plus ou moins chargée de
son ; du moins ne doit-elle contenir aucune impureté, ni aucun toxique, et,
grâce aux appareils modernes de nettoyage, ce but est atteint dans tous les
établissements convenablement équipés.
R. Grandmottet,
Ingénieur agricole.
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