La loi du 1er septembre 1948 dispose que, à
compter du 1er janvier 1949, les propriétaires sont fondés à
obtenir de plein droit de leurs locataires ou occupants, en sus du loyer
principal, le remboursement de certaines dépenses qu'elle énumère dans son article
38.
I. Énumération des dépenses.
— Les dépenses dont le remboursement peut être demandé
aux locataires comprennent : les prestations, les taxes locatives et les
fournitures individuelles.
A. Prestations.
— On désigne sous ce nom les :
1° Frais de pose, de dépose et d'entretien des tapis,
fournitures nécessaires à l'entretien de propreté des parties communes de
l'immeuble ;
2° Consommation de l'électricité et du gaz nécessitée par
l'éclairage des parties communes de l'immeuble, ainsi que les locations des
compteurs ;
3° Remboursement des dépenses afférentes au chauffage des
parties communes de l'immeuble, à l'exception de celles nécessitées par les
grosses réparations ;
4° Dépenses de force motrice, des ascenseurs et monte-charge
et leurs frais d'entretien, à l'exception de celles nécessitées par les grosses
réparations ;
5° Frais de vidange ;
6° Frais d'abonnement du poste téléphonique de l'immeuble.
B. Taxes locatives.
— Elles englobent seulement les :
1° Taxe d'enlèvement d'ordures ménagères ;
2° Taxe de déversement à l'égout ;
3° Taxe de balayage.
C. Fournitures individuelles (sur justifications
particulières).
— Ce sont les :
1° Consommation d'eau chaude et froide des locataires ou
occupants de l'immeuble ;
2° Location des compteurs ;
3° Frais de ramonage des cheminées ;
4° Frais de chauffage, cette fourniture étant récupérable
suivant l'importance des éléments de chauffage ; en cas de taxation, la
fourniture sera comptée au prix taxé ;
5° Frais de conditionnement d'air ;
6° Frais d'abonnement des postes supplémentaires et taxes
des communications téléphoniques.
Lorsque le chauffage, la distribution d'eau chaude, l'usage
de l'ascenseur et des monte-charge ne peuvent continuer d'être assurés, les
loyers subissent une diminution sans que le propriétaire puisse être tenu de
les fournir.
II. Cette énumération est limitative.
— L'énumération des prestations, taxes locatives et
fournitures individuelles qui vient d'être donnée est limitative : le
propriétaire ne peut donc légalement exiger du locataire le payement d'autres dépenses
telles que l'impôt foncier, la rémunération de la concierge.
Il importe de remarquer à ce sujet que les dispositions de
la loi du 1er septembre 1948 sont d'ordre public, comme le
spécifie d'ailleurs son article 87. Par conséquent, on ne peut valablement y
contrevenir et toute clause contraire n'aurait pas de valeur.
Comme on le voit d'après ce qui précède, les prestations
sont des dépenses que le propriétaire fait pour la jouissance collective des
locataires.
Les fournitures individuelles constituent, ainsi que leur
nom l'indique, des dépenses que le propriétaire fait dans l'intérêt de chaque
locataire pris séparément.
Ces prestations et fournitures récupérables sur les
locataires se distinguent des charges proprement dites assumées par le
propriétaire et qui comprennent l'entretien, l'administration, l'assurance, les
impôts de l'immeuble, etc.
III. Redevables de ces dépenses.
— Pour la répartition des dépenses occasionnées par ces
prestations et fournitures, il doit être tenu compte de tous les locaux de
l'immeuble, qu'il s'agisse de locaux d'habitation, de locaux professionnels,
industriels ou commerciaux, etc.
Tous les locataires et occupants de l'immeuble, y compris le
propriétaire lui-même, doivent être appelés à supporter la charge de ces
dépenses dont ils ont bénéficié.
Les locataires économiquement faibles sont ainsi assujettis
à cette obligation ; on va voir dans quelle proportion ils peuvent l'être.
IV. Répartition.
— En principe, chaque locataire doit participer au
payement des dépenses résultant de ces prestations, taxes locatives et
fournitures individuelles en proportion des avantages qu'il reçoit.
Si la ventilation, c'est-à-dire la détermination des
avantages reçus par chaque locataire, est impossible, la répartition doit être
faite au prorata du loyer payé par chaque locataire ou occupant et, pour les
locaux occupés par le propriétaire, au prorata du loyer qu'il aurait à payer
s'il était locataire.
Nous appelons l'attention des lecteurs sur le fait qu'il
s'agit ici des principes généraux établis par la loi ; leur application
suscitera évidemment des difficultés en raison des nombreux cas particuliers
qui se présentent.
V. Justifications du propriétaire.
— Le propriétaire doit fournir aux locataires les justifications
des dépenses dont il leur demande le remboursement.
À cet effet (c'est la loi qui le dit), le propriétaire doit
adresser à chaque locataire ou occupant, quinze jours avant d'en demander le
remboursement, le compte détaillé des prestations, taxes locatives et
fournitures individuelles.
Il est obligé aussi de lui indiquer la répartition faite
entre tous les locataires et occupants.
Il doit tenir à la disposition des locataires et des
occupants toutes les pièces justificatives dans la quinzaine qui suit l'envoi
des comptes.
VI. Questions écrites.
—Le ministre de la Reconstruction, dans les attributions de
qui entre le problème des locaux d'habitation, a été amené à répondre à
diverses questions écrites concernant cette question du payement des prestations
et fournitures par les locataires. Nous reproduisons plusieurs de ces réponses.
a. Locataires économiquement faibles.
— « Aux termes de l'article 38 de la loi du 1er septembre
1948, si la ventilation des prestations, taxes locatives et fournitures
individuelles est impossible, la répartition en est faite au prorata du loyer
payé par chaque locataire ou occupant. Il semble donc que l'interprétation
stricte de la loi conduise à considérer qu'à défaut de pouvoir ventiler les
prestations, taxes et fournitures sur des bases certaines, le loyer à prendre
en considération pour leur répartition est le loyer effectivement payé, même si
celui-ci n'a subi aucune majoration du fait que le locataire ou occupant
bénéficie des exonérations de majorations de loyer par application de l'article
40 de la loi. Il n'est toutefois pas certain que cette interprétation littérale
des textes corresponde à la volonté législative, qui semble au contraire avoir
entendu opérer ladite répartition d'après les prix résultant de l'application
des majorations prévues par la loi. C'est ainsi, notamment, qu'en ce qui
concerne les locaux occupés par le propriétaire il est procédé à la
détermination d'un loyer fictif afin de permettre l'imputation de la part
correspondante des prestations, taxes et fournitures. Il ne pourra, dans ces
conditions, appartenir qu'aux tribunaux judiciaires souverainement compétents
en la matière de décider si la répartition des prestations, taxes et
fournitures devra avoir lieu, dans l'hypothèse considérée, au prorata des
loyers effectivement payés ou si, au contraire, cette répartition devra être
réalisée en tenant compte du loyer qui serait payé par les bénéficiaires
éventuels de l'article 40 si les majorations de loyers leur étaient
applicables. »
b. Locataires rez-de-chaussée.
— « L'article 38 de la loi du 1er septembre
1948 dispose expressément que le propriétaire est fondé de plein droit à
obtenir de ses locataires ou occupants, en sus du loyer principal, le
remboursement sur justifications des frais de pose, de dépose et d'entretien
des tapis d'escaliers. Toutefois, il était de jurisprudence constante, sous le
régime de la loi du 1er avril 1926 modifiée, que le locataire
du rez-de-chaussée, dans la mesure où il n'a l'usage d'aucune partie des tapis
d'escaliers, n'était pas tenu de participer à ces dépenses. Il y a tout lieu de
penser que cette jurisprudence serait confirmée si les tribunaux étaient
appelés à se prononcer sur la portée des dispositions précitées de l'article
40. »
c. Concierges.
— « La loge, mise à la disposition du concierge,
préposé du propriétaire, ne doit pas, en principe, être considérée comme partie
commune de l'immeuble. Il en résulte que les frais afférents à son chauffage ne
peuvent être récupérés sur les locataires ni totalement ni partiellement. »
Évidemment, ces réponses ministérielles ne lient pas les
tribunaux ; elles ne constituent qu'un avis.
L. CROUZATIER.
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