Accueil  > Années 1952  > N°659 Janvier 1952  > Page 46 Tous droits réservés

Loyers d'habitation

Prestations et fournitures

La loi du 1er septembre 1948 dispose que, à compter du 1er janvier 1949, les propriétaires sont fondés à obtenir de plein droit de leurs locataires ou occupants, en sus du loyer principal, le remboursement de certaines dépenses qu'elle énumère dans son article 38.

I. Énumération des dépenses.

— Les dépenses dont le remboursement peut être demandé aux locataires comprennent : les prestations, les taxes locatives et les fournitures individuelles.

A. Prestations.

— On désigne sous ce nom les :

    1° Frais de pose, de dépose et d'entretien des tapis, fournitures nécessaires à l'entretien de propreté des parties communes de l'immeuble ;

    2° Consommation de l'électricité et du gaz nécessitée par l'éclairage des parties communes de l'immeuble, ainsi que les locations des compteurs ;

    3° Remboursement des dépenses afférentes au chauffage des parties communes de l'immeuble, à l'exception de celles nécessitées par les grosses réparations ;

    4° Dépenses de force motrice, des ascenseurs et monte-charge et leurs frais d'entretien, à l'exception de celles nécessitées par les grosses réparations ;

    5° Frais de vidange ;

    6° Frais d'abonnement du poste téléphonique de l'immeuble.

B. Taxes locatives.

— Elles englobent seulement les :

    1° Taxe d'enlèvement d'ordures ménagères ;

    2° Taxe de déversement à l'égout ;

    3° Taxe de balayage.

C. Fournitures individuelles (sur justifications particulières).

— Ce sont les :

    1° Consommation d'eau chaude et froide des locataires ou occupants de l'immeuble ;

    2° Location des compteurs ;

    3° Frais de ramonage des cheminées ;

    4° Frais de chauffage, cette fourniture étant récupérable suivant l'importance des éléments de chauffage ; en cas de taxation, la fourniture sera comptée au prix taxé ;

    5° Frais de conditionnement d'air ;

    6° Frais d'abonnement des postes supplémentaires et taxes des communications téléphoniques.

Lorsque le chauffage, la distribution d'eau chaude, l'usage de l'ascenseur et des monte-charge ne peuvent continuer d'être assurés, les loyers subissent une diminution sans que le propriétaire puisse être tenu de les fournir.

II. Cette énumération est limitative.

— L'énumération des prestations, taxes locatives et fournitures individuelles qui vient d'être donnée est limitative : le propriétaire ne peut donc légalement exiger du locataire le payement d'autres dépenses telles que l'impôt foncier, la rémunération de la concierge.

Il importe de remarquer à ce sujet que les dispositions de la loi du 1er septembre 1948 sont d'ordre public, comme le spécifie d'ailleurs son article 87. Par conséquent, on ne peut valablement y contrevenir et toute clause contraire n'aurait pas de valeur.

Comme on le voit d'après ce qui précède, les prestations sont des dépenses que le propriétaire fait pour la jouissance collective des locataires.

Les fournitures individuelles constituent, ainsi que leur nom l'indique, des dépenses que le propriétaire fait dans l'intérêt de chaque locataire pris séparément.

Ces prestations et fournitures récupérables sur les locataires se distinguent des charges proprement dites assumées par le propriétaire et qui comprennent l'entretien, l'administration, l'assurance, les impôts de l'immeuble, etc.

III. Redevables de ces dépenses.

— Pour la répartition des dépenses occasionnées par ces prestations et fournitures, il doit être tenu compte de tous les locaux de l'immeuble, qu'il s'agisse de locaux d'habitation, de locaux professionnels, industriels ou commerciaux, etc.

Tous les locataires et occupants de l'immeuble, y compris le propriétaire lui-même, doivent être appelés à supporter la charge de ces dépenses dont ils ont bénéficié.

Les locataires économiquement faibles sont ainsi assujettis à cette obligation ; on va voir dans quelle proportion ils peuvent l'être.

IV. Répartition.

— En principe, chaque locataire doit participer au payement des dépenses résultant de ces prestations, taxes locatives et fournitures individuelles en proportion des avantages qu'il reçoit.

Si la ventilation, c'est-à-dire la détermination des avantages reçus par chaque locataire, est impossible, la répartition doit être faite au prorata du loyer payé par chaque locataire ou occupant et, pour les locaux occupés par le propriétaire, au prorata du loyer qu'il aurait à payer s'il était locataire.

Nous appelons l'attention des lecteurs sur le fait qu'il s'agit ici des principes généraux établis par la loi ; leur application suscitera évidemment des difficultés en raison des nombreux cas particuliers qui se présentent.

V. Justifications du propriétaire.

— Le propriétaire doit fournir aux locataires les justifications des dépenses dont il leur demande le remboursement.

À cet effet (c'est la loi qui le dit), le propriétaire doit adresser à chaque locataire ou occupant, quinze jours avant d'en demander le remboursement, le compte détaillé des prestations, taxes locatives et fournitures individuelles.

Il est obligé aussi de lui indiquer la répartition faite entre tous les locataires et occupants.

Il doit tenir à la disposition des locataires et des occupants toutes les pièces justificatives dans la quinzaine qui suit l'envoi des comptes.

VI. Questions écrites.

—Le ministre de la Reconstruction, dans les attributions de qui entre le problème des locaux d'habitation, a été amené à répondre à diverses questions écrites concernant cette question du payement des prestations et fournitures par les locataires. Nous reproduisons plusieurs de ces réponses.

a. Locataires économiquement faibles.

— « Aux termes de l'article 38 de la loi du 1er septembre 1948, si la ventilation des prestations, taxes locatives et fournitures individuelles est impossible, la répartition en est faite au prorata du loyer payé par chaque locataire ou occupant. Il semble donc que l'interprétation stricte de la loi conduise à considérer qu'à défaut de pouvoir ventiler les prestations, taxes et fournitures sur des bases certaines, le loyer à prendre en considération pour leur répartition est le loyer effectivement payé, même si celui-ci n'a subi aucune majoration du fait que le locataire ou occupant bénéficie des exonérations de majorations de loyer par application de l'article 40 de la loi. Il n'est toutefois pas certain que cette interprétation littérale des textes corresponde à la volonté législative, qui semble au contraire avoir entendu opérer ladite répartition d'après les prix résultant de l'application des majorations prévues par la loi. C'est ainsi, notamment, qu'en ce qui concerne les locaux occupés par le propriétaire il est procédé à la détermination d'un loyer fictif afin de permettre l'imputation de la part correspondante des prestations, taxes et fournitures. Il ne pourra, dans ces conditions, appartenir qu'aux tribunaux judiciaires souverainement compétents en la matière de décider si la répartition des prestations, taxes et fournitures devra avoir lieu, dans l'hypothèse considérée, au prorata des loyers effectivement payés ou si, au contraire, cette répartition devra être réalisée en tenant compte du loyer qui serait payé par les bénéficiaires éventuels de l'article 40 si les majorations de loyers leur étaient applicables. »

b. Locataires rez-de-chaussée.

— « L'article 38 de la loi du 1er septembre 1948 dispose expressément que le propriétaire est fondé de plein droit à obtenir de ses locataires ou occupants, en sus du loyer principal, le remboursement sur justifications des frais de pose, de dépose et d'entretien des tapis d'escaliers. Toutefois, il était de jurisprudence constante, sous le régime de la loi du 1er avril 1926 modifiée, que le locataire du rez-de-chaussée, dans la mesure où il n'a l'usage d'aucune partie des tapis d'escaliers, n'était pas tenu de participer à ces dépenses. Il y a tout lieu de penser que cette jurisprudence serait confirmée si les tribunaux étaient appelés à se prononcer sur la portée des dispositions précitées de l'article 40. »

c. Concierges.

— « La loge, mise à la disposition du concierge, préposé du propriétaire, ne doit pas, en principe, être considérée comme partie commune de l'immeuble. Il en résulte que les frais afférents à son chauffage ne peuvent être récupérés sur les locataires ni totalement ni partiellement. »

Évidemment, ces réponses ministérielles ne lient pas les tribunaux ; elles ne constituent qu'un avis.

L. CROUZATIER.

Le Chasseur Français N°659 Janvier 1952 Page 46