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L'attache des pièges

C'est un point sur lequel les novices ne portent pas assez d'attention. C'est là un grave défaut, dont les effets peuvent être désastreux pour le résultat. Tel piégeur qui aura parfaitement préparé son piège et tendu celui-ci dissimulera à peine son attache, souvent en mauvais état, surtout s'il s'agit de fils de fer plus ou moins rouillés. Si l'animal évente le piège, ce sera par la négligence d'entretien ou de dissimulation du système d'attache.

L'attache est constituée par une chaîne plus ou moins longue, à maillons soudés, comprenant au moins un émerillon du côté du piège, cet émerillon étant relié au piège par une S ou un anneau brisé. La meilleure solution est l'S soudée, qui est bien préférable à l'anneau brisé, ou fausse maille. J'ai vu un blaireau de 15 kilogrammes parvenir à détacher le piège de la chaîne en se débattant, par la faute d'un anneau brisé fatigué et bâillant. Ce cas se reproduirait certainement encore plus facilement si, au lieu d'une chaîne, on employait un gros fil de fer dont la rigidité facilite le passage dans l'anneau brisé. Je ne saurais donc trop insister pour que les piégeurs vérifient soigneusement la chaîne, ou le fil de fer, les émerillons, S ou anneaux brisés avant emploi du piège et qu'ils n'hésitent pas à changer immédiatement tout élément défectueux. Si l'on emploie du fil de fer, il faut le prendre très fort et le doubler au besoin pour les gros animaux. Il faut, de plus, assouplir l'attache en la montant en plusieurs éléments, dans le genre des chaînes d'arpenteur. Ce montage facilite le camouflage et la fixation du piège.

Mais ce n'est pas tout : il faut, avant de tendre le piège, que l'attache ait subi le même traitement que le piège (nettoyage, désodorisation) et aussi les mêmes soins de camouflage, surtout si le piège est seulement lesté et non fixé à un point fixe, tel que baliveau, racine, élément de clôture. Dans ce cas, le lest (pierre, branche, rondin, grappin) doit disparaître, entièrement ou se mêler à la nature, la partie de chaîne ou de fil de fer qui le relie au piège étant rendue totalement invisible.

Une autre question importante est celle de la longueur à donner à l'attache. Cette longueur variera selon le lieu de tendue.

Si l'animal capturé trouve à proximité immédiate du piège un couvert pour le dissimuler à la vue de l'homme, on peut attacher le piège à un point fixe, mais avec une attache courte (50 à 60 cm.), qui l'empêche de pouvoir prendre de l'élan dans ses efforts pour s'enfuir.

Si, au contraire, l'animal est capturé en plein découvert — clairière, plaine, — on ne fixe pas le piège ; on le leste d'un corps mort, attaché après une longue chaîne (1m,50 à 2 m.).

Le piégeage dans l'eau (loutre) nécessite une grande chaîne (2 à 3 m.) permettant une noyade rapide. Par contre, le piégeage en sortie de terrier impose une chaîne courte, empêchant l'animal capturé d'entrer profondément dans le terrier et d'offrir ainsi parfois de grosses difficultés d'extraction (spécialement pour le blaireau).

Bien entendu, chaque système a ses avantages et ses inconvénients :

a. L'attache courte, si elle diminue les risques de pattes cassées, incite l'animal à se ronger la patte enserrée dans le piège pour se libérer. Mais il ne commence guère cette amputation qu'à partir du moment où il se voit à découvert, à l'aube ;

b. L'attache longue permet à l'animal capturé de bondir à bout de chaîne, en donnant toute sa force, et souvent de se casser la patte prise dans le piège. Dans le but d'éviter ce résultat, il existe en Allemagne des chaînes possédant un ressort à boudin à mi-longueur, qui joue le rôle d'amortisseur.

Une autre solution du problème, employée aux U. S. A. et au Canada, consiste à attacher le piège par une chaîne courte à une perche à contrepoids, qui soulève piège et capture dès la prise de l'animal. Ce sont là de petits dispositifs qui rendent les plus grands services où l'on peut les employer. L'animal, pendu dans le vide, ne peut ni se ronger la patte, ni être dévoré par un autre animal ; par contre, il est très en vue et susceptible de tenter tous les rôdeurs des bois, qui ramasseront sans vergogne : attache, piège et capture. C'est donc un procédé à n'employer qu'en région très peu fréquentée, et qui rendra les plus grands services au piégeur qui n'est pas sûr de pouvoir réviser ses pièges tous les jours, ce qui est souvent le cas en montagne.

André CHAIGNEAU.

Le Chasseur Français N°660 Février 1952 Page 75