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Courrier cynégétique

Tête-à-tête brutal.

— Chassant sur la commune de Saint-Rémy-au-Bois, M. Grevet vit un lièvre arriver directement sur lui ; avant que le chasseur ait eu le temps d'épauler, son chien Boby, un petit fox, fonçait sur le lièvre avec une telle ardeur qu'une rencontre brutale s'ensuivit et que les deux adversaires restèrent sur le carreau ! M. Grevet n'eut qu'à achever le lièvre, mais il fallut longuement frictionner Boby pour le remettre sur ses pattes.

André DUMONT, abonné.

La destruction du renard, prélude du repeuplement en gibier.

— À la suite des réflexions de M. Donnat, parues dans Le Chasseur Français d'octobre, M. le Président de la Fédération départementale des chasseurs de l'Hérault nous adresse les précisions suivantes :

Il est vrai que, de 1936 aux premières années de guerre, le plateau du Larzac fut une source de gibier. Malheureusement, elle n'a pas été inépuisable, et les hécatombes de gibier offert en « holocauste » pour pallier l'absence des denrées alimentaires eurent tôt fait de l'anéantir.

C'est à la compréhension des chasseurs que revint le mérite de la rénovation de la chasse dès 1936.

Antérieurement, le Larzac était un splendide désert cynégétique. Émus d'une telle pauvreté en gibier, ils se groupèrent en sociétés, procédèrent à la destruction des animaux nuisibles, créèrent d'importantes réserves du ministère de l'Agriculture, au Caylar, Les Rives, Saint-Félix, Sorbs, La Vacquerie, Saint-Maurice, effectuèrent de nombreux lâchers de gibier, s'imposèrent une discipline stricte (difficile à retrouver) et s'appuyèrent enfin sur les sages et éclairés conseils de la Fédération et sur l'action efficace des gardes fédéraux. Sans tarder, les plus heureux résultats se manifestèrent ; deux ans plus tard, ceux obtenus furent qualifiés d'inespérés. Et voilà pourquoi, lors de ses journées de chasse sur le plateau, M. Donnat put savourer la joie de tirer, sans chien, lièvres, lapins et perdreaux.

Depuis, les choses ont bien changé, en effet. Cette situation serait-elle seulement propre à notre département, au plateau du Larzac, plus particulièrement ? Je puis affirmer qu'en cela l'Hérault n'est pas le plus défavorisé.

De son souffle puissant, la guerre a tout balayé sur l'ensemble du territoire : l'œuvre entreprise en 1936, couronnée de succès, sombra. L'édifice était à reconstruire depuis la base. Le flambeau dut changer de mains, mais les hommes de bonne volonté surgissent à toute époque.

Au fil de son action, la Fédération en arrive à créer les Réserves départementales de Saint-Martin d'Azirou, d'une part, de La Canourgue-Mas Audran, d'autre part, et ce, pour remédier à la défaillance des sociétés communales, restées sourdes quant à la création de leurs réserves locales. Avec la Réserve de la Canourgue-Mas Audran, tout comme en 1939, élargissant leur habitat, les lièvres réapparaissent de plus en plus nombreux : faut-il voir en cela une simple coïncidence ? Certainement non. Obéissant aux plus élémentaires données cynégétiques, dès que ces réserves furent approuvées par M. le Ministre de l'Agriculture et ceinturées de plaques officielles, la Fédération sollicita de M. le Préfet les arrêtés, renouvelés annuellement, l'autorisant à l'emploi du poison. La destruction des animaux nuisibles fut conduite énergiquement non seulement avec le poison, mais avec la chloropicrine et les pièges. Les résultats ont toujours été probants ; à l'hécatombe de renards, s'ajoute celle des mustélidés, des félins, des rapaces, des becs droits, tous redoutables ennemis du gibier. De plus, pour renforcer et propager son action, la Fédération adressa des circulaires à MM. les Présidents des Sociétés de chasse affiliées leur proposant le concours des gardes fédéraux.

C'est donc sur terrains débarrassés de nuisibles que vit le gibier de nos réserves. Les lâchers dont parle M. F. Donnat sont purement imaginaires, le gibier existant suffisant largement au repeuplement. Les seuls lâchers ont été effectués par les sociétés communales ; avant d'y procéder, elles ont eu le souci de détruire les nuisibles : les primes payées par nos soins pour ces destructions sont un témoignage formel.

Erreur encore, le nombre des perdrix chukars attribuées à la Fédération, En tout et pour tout, nous en avons reçu cent, plus les quelques couples conservés en parquets.

La Fédération a mis tout en œuvre pour honorer la confiance qu'on bien voulu lui témoigner les plus hautes personnalités du C. S. C. Ne perdant pas de vue qu'elle a charge d'étudier le comportement de ces oiseaux, elle a multiplié les lieux de lâchage par mesure de prudence, elle a conservé quelques couples en parquets et n'a pas négligé de faire autopsier les cadavres des chukars, allant jusqu'à l'expédition en toxicologie des organes essentiels, afin d'établir les causes ayant entraîné la mort.

Le présent exposé n'a eu nullement pour but d'étaler notre action, peu spectaculaire, certes, mais discrète et sûre. Il était nécessaire de corriger les jugements hâtifs qui ont pu être portés sur elle.

Le Président de la Fédération départementale des chasseurs de l'Hérault.

Un braconnier qui ne désarme pas ...

— « Avez-vous déjà été condamné ? Oui, pas mal de fois », soliloque le président du Tribunal correctionnel de Boulogne-sur-Mer, lors de l'audience du 25 juillet dernier, en interrogeant Fernand M ..., cinquante ans, demeurant à Baincthun, qui comparaît cette fois en compagnie de ses deux gendres, Georges V ..., vingt-quatre ans, et Charles F ..., vingt-cinq ans, demeurant tous à La Capelle. Son fils, Henri M ..., vingt ans, malade, ne se présente pas.

Le quatuor familial a été surpris à Baincthun, en janvier 1951, alors qu'il chassait le faisan de nuit, sans permis de chasse. Ils furent surpris par les trois gardes, Dellerie, Delataignant et Boucry. Seul Fernand M ... fut appréhendé, les autres ayant pu s'échapper. Si Fernand reconnaît les faits, ses parents et complices nient, disant qu'il ne s'agissait pas d'eux, car cette soirée-là ils jouaient aux cartes — soi-disant ! — chez l'un d'eux. Dans une musette abandonnée sur les lieux, on trouva quatre faisans.

Au cours d'une plaidoirie plaisante, mais non dénuée de fermeté, MHenry Reisenthel, qui se porte une fois de plus partie civile contre M ..., au nom de la Fédération des chasseurs du Pas-de-Calais, rappelle son lourd passé de braconnier. Il « débuta dans le métier » avec sa mère, continua avec ses fils et, maintenant, opère avec ses gendres.

Il demande, cette fois, le maximum de peine.

MJean Lefèvre, défenseur de la famille M ..., demande au Tribunal un jugement compréhensif pour son client, chargé d'une nombreuse famille. Il attend un quatorzième enfant. Il reconnaît que son client a le « virus du braconnage » dans le corps et sait très bien qu'en dépit de la confiscation de l'arme Fernand détiendra toujours un fusil. Pour les trois autres prévenus, il demande l'acquittement, les preuves de culpabilité lui semblant fragiles. Il demande l'indulgence pour ce prévenu « assez sympathique », ajoute-t-il, et « gros mangeur de gibier », complète Me Henry Reisenthel.

Finalement le Tribunal condamne Fernand M ... à deux mois de prison et 25.000 francs d'amende ; Henri M ... à un mois et 12.000 francs ; V ... et F ... à chacun quinze jours avec sursis et 12.000 francs. Les condamnés paieront « solidairement » 40.000 francs à la Fédération des chasseurs. Ils sont, en outre, condamnés au coût du permis général et à la confiscation du fusil, estimé 15.000 francs, et aux frais, bien entendu.

Il est profondément regrettable de constater que, devant de telles répétitions de faits de braconnage, l'interdiction de séjour ne joue pas ; ce serait là, incontestablement, le meilleur moyen, en dépaysant ces bracos, d'arrêter leurs actes de braconnage. Que nos dirigeants de la chasse veuillent bien y penser.

À la même audience, le propriétaire d'un chien a été condamné, pour divagation de cet animal, à 6.000 francs d'amende. La Fédération des chasseurs du Pas-de-Calais, partie civile, obtient 2.000 francs de dommages-intérêts.

J. D ..., abonné.

Un « chat de chasse ».

— Avez-vous jamais vu un chat, oui, un vulgaire matou opérer comme un fidèle retriever ? C'est pourtant ce que j'ai vu, de mes yeux vu : le chat appartenait à un épicier de la Marche, et son maître, du milieu d'une rue bordée de murs, tirait les moineaux perchés sur les arbres des jardins avec une carabine de petit calibre. Son chat se tenait à ses pieds et dès qu'un moineau tombait, tué ou blessé seulement, ce chat escaladait immédiatement le mur et lui apportait la victime, qu'il déposait à ses pieds. Puis il se mettait de nouveau aux aguets et, dès qu'il apercevait un pierrot, à droite ou à gauche, sur un arbre ou sur un toit, il se tournait vers lui, le fixait des yeux et, si son maître n'épaulait pas immédiatement, il lui jetait un regard furtif comme pour lui dire : « Mais tire donc ! tu ne le vois donc pas ? » Et, dès que le moineau dégringolait, le même manège recommençait.

Quelques jours plus tard, l'épicier trouvait son phénomène de chat la queue coupée au ras des fesses. Il le soigna comme il convenait et la plaie ne tarda pas à se cicatriser. Mais, un mois plus tard, il eut la très désagréable surprise de trouver, près de sa maison, le cadavre de son chat.

G ..., abonné.

Comment s'y attendre !

— C'était à Baria, petite ville coquette de Cochinchine, à l'orée de la grande forêt tropicale. Plusieurs de mes compagnons de chasse s'étaient rendus là en vue d'une chasse de nuit, espérant chevreuils, cerfs, même le tigre.

Le soir donc, nos guides étaient prêts avec leurs charrettes attelées de grands buffles, aux cornes effilées. Phare en tête, nous avions convenu, avec mes cinq compagnons, de nous séparer à une grande clairière donnant accès à plusieurs pistes excellentes pour ce genre de chasse. Nous prenons la route de Saïgon, qui, à 2 kilomètres, nous mène à la clairière en question. Nous arrivons aux abords des grands arbres, « c'est la nuit noire ». Seul le faisceau lumineux de nos phares balaie la petite broussaille.

Un coup de feu ; c'est un lapin. À ce bruit, une bande de singes se trouvant là prend peur et se déplace avec grand fracas de branches. Un tout petit était à terre, noir, mignon comme tout. Je le tenais dans le faisceau de mon phare. J'avertis vivement mes amis de ne pas tirer, sautai prestement de ma charrette et courus à la poursuite de ma petite bête. Je la rejoignis à courte distance. Elle était aveuglée par tous les phares braqués sur elle. Je me méfiais d'une morsure, « toujours dangereuse », tout en craignant qu'elle ne m'échappe dans les broussailles proches. C'est à ce moment que se produisit le drame ; du haut des grands arbres, avec une dextérité et une adresse sans égales, une pluie drue et nauséabonde s'abattit sur moi. J'en fus littéralement cuirassé. Je dus abandonner la partie, alors que de grands éclats de rire fusaient au spectacle de ma triste situation. Mon petit captif en perspective attrapait une liane et allait rejoindre sa famille.

Nous dûmes retourner vers la route, de l'autre côté de laquelle il y avait une rizière ; deux ou trois de mes compagnons de chasse me donnèrent la main pour me déshabiller, tandis que les autres, riant aux éclats, lavaient mes armes.

P. BLANC, Ambarès (Gironde).

Une renarde « culottée ».

— Depuis plusieurs jours, une renarde se signalait particulièrement à l'attention des cultivateurs du « centre » de Marzelay en enlevant en plein jour une ou deux poules, et ce régulièrement. Après bien des recherches, le terrier fut découvert et six jeunes, déjà gros, exterminés. Or ce terrier était tout simplement creusé dans un hangar accoté à une ferme en plein centre du hameau ! Le garde-manger était ainsi à proximité.

Culot ... ou super-ruse ?

Le lièvre carnivore.

— Nous avons reçu, à ce sujet, plusieurs dizaines de lettres émanant surtout de lecteurs d'Afrique du Nord, d'Espagne et des contrées méridionales. Aucun doute à avoir : le lièvre fait en maintes contrées figure de parfait charognard et se pose en sérieux concurrent de l'hyène.

Le Chasseur Français N°660 Février 1952 Page 79