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Le chrysanthème

Originaire de la Chine, où il était, s'il faut en croire les plus anciens documents, cultivé cinq ou six cents ans avant l'ère chrétienne, le chrysanthème est, par excellence, la fleur d'automne ...

Introduit, beaucoup plus tard, au Japon, il y fut déjà perfectionné, et les fleurs en prirent une diversité de formes et une ampleur inconnues chez les Chinois.

C'est seulement, nous dit-on, en 1789 qu'un négociant de Marseille, ayant, au cours d'un voyage, découvert en Extrême Orient cette plante inconnue chez nous, tenta d'en rapporter en France quelques exemplaires. Un seul, paraît-il, résista au voyage, encore fort long à cette époque, et se développa fort bien. Dès l'année suivante, un botaniste, l'abbé Rabatuel, amena à Paris la fleur nouvelle qui fut plantée dans le Jardin du Roi.

Quelques années plus tard, le chrysanthème se propagea rapidement, et, dès 1808, l'impératrice Joséphine lui fit les honneurs de la Malmaison. Peu de temps après, il était cultivé dans toutes les propriétés ! ...

Lorsque, aujourd'hui, on en considère les innombrables variétés, aussi imposantes par leurs dimensions que diverses dans leur formes et leurs coloris, et lorsqu'on songe que le point de départ en fut une modeste herbe sauvage, à fleur jaune, poussant dans les champs de l'Extrême-Orient, on reste confondu et émerveillé ... Et, cependant, le chrysanthème n'a pas dit son dernier mot. Plusieurs dizaines de variétés sont obtenues, chaque année, par des horticulteurs spécialistes qui en font des semis et, parmi celles-ci, quelques-unes seulement, se distinguant par une particularité bien nette, sont retenues et viennent enrichir des collections déjà fort nombreuses.

La culture du chrysanthème est assez simple, ce qui la met à la portée de nombreux amateurs. Cependant, si la plante est complètement rustique dans le Midi de la France, où elle vit fort bien en plein air, il n'en est pas de même lorsque l'on remonte vers le Nord, où elle gèle dès l'automne, ou même dans le Centre, où elle ne supporte l'hiver qu'en situation abritée.

Les variétés à grandes fleurs actuellement cultivées sont d'ailleurs plus sensibles au froid que les espèces types. Les fleurs, surtout, peuvent être abîmées par la moindre gelée, ce qui oblige à placer, en automne, les plantes sous un abri léger où elles sont garanties des effets du froid.

Bien que le chrysanthème ne soit pas très exigeant et pousse aussi bien en terre forte qu'en sol léger, il faut, pour mieux en réussir la culture, disposer d'une terre à la fois perméable, meuble, riche et cependant d'une certaine consistance.

Le loam, ou terre de gazon, obtenu en mettant en dépôt des plaques de gazon au moins un an à l'avance et en les brassant plusieurs fois, constitue un sol convenable pour le chrysanthème. À défaut, on peut utiliser une bonne terre franche, prise à la surface d'un champ quelque temps avant l'emploi et abritée contre les pluies et la neige. Avant de l'employer, on y mêle du terreau, provenant de couches faites avec du fumier de cheval additionné de feuilles de hêtre ou de chêne, parvenu à un état de décomposition très avancé. Ce terreau, de deux ans de préférence, doit entrer dans le mélange pour 30 p. 100 environ. Il est également utile d'y incorporer une petite quantité de terre de bruyère siliceuse, dans le but d'augmenter la perméabilité du mélange.

Enfin, il est important d'améliorer cette terre au moyen d'engrais bien choisis. Les plus recommandables sont les engrais complets se rapprochant de la formule 6-12-8, c'est-à-dire renfermant approximativement : 6 p. 100 d'azote dont 1 p. 100 nitrique, le reste à l'état ammoniacal et organique ; 12 p. 100 d'acide phosphorique et 8 p. 100 de potasse.

La préparation de la terre se fait au cours des mois d'août et septembre précédant son utilisation, pour la culture en pots des chrysanthèmes. Le mélange est recoupé à plusieurs reprises, en en mélangeant bien tous les éléments.

Bouturage.

— Pour avoir des pieds de chrysanthèmes robustes et bien fournis, le meilleur procédé de reproduction, procédé s'appliquant à toutes les variétés, est le bouturage, effectué, en mars ou début d'avril, sur une couche tiède donnant une température de 12 à 15°.

Pour avoir des boutures, on met sur couche tiède fin février les pieds-mères conservés jusque-là sous châssis à froid. La végétation reprend très rapidement, et, dès que les nouvelles pousses ont quatre à cinq feuilles, on les coupe et on les pique sur couche tiède, sous châssis ou sous cloche.

Mais, pour être assuré d'avoir de bonnes plantes, il faut utiliser de bonnes boutures ayant une base déjà un peu durcie sans être encore lignifiée. Trop tendre, la bouture serait, en effet, exposée à fondre.

Si l'on distingue quelques pucerons vers les feuilles d'extrémité, on trempe cette extrémité dans une solution d'un insecticide à base de nicotine. Si une attaque de rouille s'est manifestée, à l'automne dernier, sur la plante-mère qui donne la bouture, une bonne précaution est d'effectuer un trempage dans une solution tiède de pentasulfure de potassium à 5 grammes par litre d'eau.

Aussitôt que les boutures ont quelques racines, ce qui ne demande que fort peu de temps, on les empote dans des godets de 7 à 8 centimètres de diamètre que l'on enterre sur la couche où ils restent jusqu'aux premiers jours de mai.

On peut alors soit en faire la culture en pleine terre, soit la continuer en pots et en plein air.

Culture en pleine terre.

— Les jeunes plantes sont dépotées et plantées en pépinière d'attente, en terre meuble et riche, vers le 15 mai, en les distançant de 40 à 50 centimètres en tous sens.

Quinze à vingt jours plus tard, l'extrémité de la jeune tige est pincée, dans le but d'en obtenir la ramification en trois ou quatre branches. Vers juin, on pincera à nouveau chacune de ces branches pour les obliger à se ramifier. Un troisième pincement en juillet et un quatrième en août contribueront à la formation de touffes basses et compactes qui, à l'automne, se couvriront de fleurs.

Il est, en tout cas, utile de ne plus pincer après août, afin de ne pas nuire à la floraison ou de ne pas trop la retarder, sauf dans le cas où, possédant une serre, on veut, en y abritant les plantes, les avoir en fleurs une partie de la mauvaise saison.

L'arrosage est parfois nécessaire, en cours de végétation, lorsqu'il fait sec. On supprimera une partie des arrosages en paillant le sol, autour des plantes, avec du fumier très décomposé, lequel contribuera à la conservation des réserves d'eau du sol et apportera une certaine quantité d'éléments fertilisants.

Culture en pots.

— Au lieu de planter les jeunes chrysanthèmes en pleine terre, on effectue un second rempotage lorsque les racines commencent à tapisser la paroi des pots. Si l'on désire cultiver les plantes sur une seule tige (uniflores), on prend des pots de 18 centimètres de diamètre au plus, tandis que, pour faire des plantes ramifiées ou potées, on utilise des pots de 20, 22 ou même 25 centimètres. Le drainage est assuré par un tesson de pot placé sur l'orifice inférieur, la partie convexe en dessous, et par quelques petits cailloux.

Pour les plantes ramifiées, les pincements sont plus ou moins nombreux selon la quantité de fleurs que l'on désire obtenir.

Ici, les arrosages doivent être très suivis, surtout en période d'été. On peut également en réduire le nombre en enterrant les pots, jusqu'à 1 ou 2 centimètres du bord supérieur, dans une plate-bande. Mais, en période humide, il faut alors se garder d'un excès d'eau qui aurait pour conséquence de faire chloroser les plantes et de nuire à leur floraison.

E. DELPLACE.

Le Chasseur Français N°661 Mars 1952 Page 161