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Causerie médicale

Maladie de Riehl

Le lecteur qui me demande de traiter ce sujet m'écrit qu'il porte sur la figure et les mains « des taches brunâtres, occasionnant des démangeaisons et quelquefois une légère desquamation de la peau des parties tachées », au sujet desquelles on aurait parlé de maladie de Riehl.

On emploie quelquefois ce nom pour la lésion décrite en 1885 par les Dr Riehl et Paltauf, de Vienne, sous le nom de tuberculose verruqueuse : cette lésion est constituée par des excroissances papillomateuses groupées sous forme de plaques plus ou moins proéminentes, d'étendue variable, recouvertes de couches cornées et séparées les unes des autres par des fissures : leur siège habituel se trouve à la face dorsale des mains, des doigts et des espaces interdigitaux. On décrit à cette plaque une zone périphérique érythémateuse, ne formant pas une saillie appréciable, une zone plus interne de petites pustules superficielles ou de croûtelles arrondies et de squames, vestiges de la pustule ; la peau est d'un brun livide et est légèrement infiltrée : la zone la plus centrale forme une saillie de 2 ou 5 millimètres au-dessus du niveau des téguments et est caractérisée par un aspect irrégulier hérissé de saillies papillomateuses, d'autant plus accentuées que l'on se rapproche davantage du centre, recouvertes de croûtes adhérentes d'épiderme corné.

Bien que cette lésion ait pu se produire par auto-inoculation chez un sujet tuberculeux au niveau d'une plaie quelconque, elle survient presque toujours, chez des sujets autrement en bonne santé, à la suite d'une blessure avec un instrument ayant servi à un traitement ou à une autopsie d'un tuberculeux, chez des médecins, des infirmiers, des garçons d'amphithéâtres, des vétérinaires, aussi chez ceux qui manipulent des substances infectées (bouchers, nourrisseurs, équarrisseurs, cochers) ; n'interviennent que comme causes prédisposantes l'hérédité, l'alcoolisme, ou tel affaiblissement organique d'origine quelconque.

En somme, cette affection est due à une inoculation par le microbe spécifique, le bacille de Koch, que l'on peut déceler dans les proliférations papillomateuses ; on y trouve aussi des microbes banaux de suppuration. Il s'agit d'un processus localisé qui peut se compliquer de lymphangite, mais qui n'affecte l'état général que d'une façon exceptionnelle.

La marche est toujours chronique : la lésion progresse pendant quelque temps par développement excentrique alors que le centre se cicatrise.

On ne confondra pas cette plaque verruqueuse, entourée d'une zone érythémateuse, avec une verrue simple : dans les cas difficiles, la recherche du bacille spécifique ou l'inoculation à des animaux confirme le diagnostic.

Le traitement consiste surtout dans l'excision de ces proliférations avec la curette tranchante, le thermo ou galvano-cautère, suivie de pansements antiseptiques ; l'emploi de caustiques, de nitrate d'argent, est insuffisant. Quant à la médication interne, elle ne vise que l'état général, le cas échéant avec de l'huile de foie de morue, de la créosote, de l'arsenic. Les vitamines P et PP (préventive pellagre) ont été souvent et utilement employées dans certains états de déficience de l'épiderme ; aussi fut-ce sans doute par analogie que l'on conseilla ces vitamines à mon lecteur. Elles se prennent par comprimés (6 à 8 par jour) ou en ampoules pour injections sous-cutanées ou intramusculaires dans les cas plus urgents.

Dr A. GOTTSCHALK.

Le Chasseur Français N°662 Avril 1952 Page 239