À propos du forçage.
— Le forçage proprement dit, pour l'obtention des
asperges arrivant sur les marchés avant celles de l'Afrique du Nord et du Midi
de la France, occasionne des dépenses souvent hors de proportion avec le
bénéfice que l'on peut en retirer.
Le forçage hivernal des asperges nécessite le concours des
bâches et des serres chauffées au thermosiphon, car le fumier des couches ne
suffit pas pour faire partir les turions en plein cœur de l'hiver, quand il
gèle à pierre fendre au dehors.
Dans ces conditions, les frais généraux occasionnés par les
installations et les dépenses de combustible ne permettent guère d'entreprendre
une telle spécialité pour la production des asperges de primeur.
Seule la culture hâtée peut être intéressante pour
l'amateur, désireux de manger de bonne heure d'autres asperges que de
conserves. Elle permet également aux professionnels de travailler pour le
marché, en offrant des bottes de turions avec une avance de un à trois mois sur
les aspergeraies du pays, conduites par les méthodes ordinaires.
Création des aspergeraies.
— Pour pouvoir facilement avancer la croissance des
asperges, les griffes appartenant à une variété précoce, d'Argenteuil par
exemple, seront distribuées par planches A, B..., mesurant 1m,30 de
large, séparées les unes des autres par des sentiers C, D, de 0m,65
de manière que l'on puisse couvrir les planches, lorsque le moment de chauffer
sera venu, avec des coffres maraîchers ordinaires.
Les griffes repiquées sur quatre lignes longitudinales,
les deux rangs extrêmes se trouvent à 0m,15 du bord des coffres, les
deux autres à 0m,30 d'axe en axe. L'espacement sur les lignes est
porté à 0m,25, ce qui nécessite quarante-quatre griffes pour garnir
un coffre.
Il faut compter trois ans de préparation pour que les plants
soient en état de fournir une bonne récolte, ainsi que dans les aspergeraies
ordinaires, créées en pleine terre.
Pour pouvoir cueillir des turions courant février, on doit
commencer par chauffer les réchauds en janvier. Pour la production de mars et
celle d'avril, on chauffe en février et mars, soit un mois d'avance.
Chauffage des couches.
— Dans un cas comme dans l'autre, quelle que soit la
saison, on procède de la façon suivante :
Les sentiers séparatifs ayant été creusés en C, D, etc., on
y a remis la terre fine, préalablement passée à la claie, laquelle servira au
buttage des griffes repiquées au niveau du terrain, pour former des monticules
de 0m,12 à 0m,15 de hauteur.
Après avoir vidé ces fouilles, qui mesurent 0m,65
de large sur 0m,50 de profondeur, on les remplit de bon fumier de
cheval imprégné d'urine, capable de dégager une chaleur que l’on tempère et
soutient en y ajoutant un tiers de feuilles.
Cela fait, on met les coffres en place, que l'on
recouvre de leur vitrage, renforcé par des paillassons. Il n'y a plus qu'à
tasser du fumier chaud entre les coffres N, N', afin que la chaleur concentrée
active la croissance des turions.
Les meilleures conditions sont obtenues lorsque le vitrage
ne se trouve pas à plus de 0m,10 du sommet des buttes, les
paillassons étant toujours mis en place durant la nuit, mais on les retirera et
l'on soulèvera les châssis pour l'aération quand le soleil se montrera. Sous
l'action de la chaleur dégagée par les réchauds et le vitrage, les turions se développent
et, au bout d'une vingtaine de jours environ, on peut commencer à récolter. Si
les griffes sont vigoureuses et si on a amendé le terrain avec un engrais
complet comprenant : azote, acide phosphorique et potasse, on peut
récolter 2 à 3 kilogrammes de beaux turions tous les deux ou trois jours par
châssis.
La cueillette dure environ un mois, mais il ne faut pas la
prolonger outre mesure, afin de ne pas nuire aux futures récoltes. La
production est toujours plus abondante et plus soutenue, si, trois semaines
après le remplissage des réchauds, on enlève le vieux fumier pour le remplacer
par du fumier frais.
Le forçage terminé, on vide les tranchées pour y remettre la
terre ayant servi au buttage, et l'on conserve tous les turions qui, en formant
leur feuillage, fortifieront les griffes pour la saison suivante. Les
aspergeraies conduites en culture hâtée s'épuisent plus vite que les
saisonnières. On les défriche aussitôt que tombe leur rendement en turions.
Production des asperges vertes.
— Les asperges vertes ont une valeur gastronomique qui
n'est pas négligeable. On peut les obtenir en utilisant des griffes de deux ou
trois ans, non employées, ainsi que de vieux rhizomes des aspergeraies
défrichées.
Procéder ainsi qu'il suit : confectionner une couche
mi-chaude avec deux tiers fumier et un tiers feuilles, sous une épaisseur de 0m,40.
Mettre les coffres en place et, sur une épaisseur de 0m,50 de
terreau, repiquer les griffes disponibles, après avoir fait leur toilette en
raccourcissant les racines à la longueur de 0m,20. Les griffes
imbriquées les unes dans les autres ont l'air de se soutenir, les collets seuls
restant apparents.
On distribue de la terre fine dans les interstices du réseau
de racines jusqu'à la tête des turions, à peine apparente. Les vides entre les
coffres sont remplis de fumier ; on recouvre de châssis et de paillassons
et l'on surveille la température, qui ne doit pas dépasser 35°. Au bout d'une
quinzaine de jours, on peut commencer la cueillette des asperges vertes. La
récolte dure un mois environ. Les griffes utilisées pour cet objet sont jetées
lorsqu'elles cessent de produire.
Adonis LÉGUME.
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