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La propriété rurale

Les tendances actuelles du marché

a. Ventes.

— Si les ventes de parcelles ont été assez fréquentes en 1950, les transactions sur des exploitations ont été rares, surtout en ce qui concerne les grandes exploitations qui exigent des disponibilités considérables : dans l'Eure-et-Loir, une exploitation de 66 hectares a été vendue en 1950 13.200.000 francs, en Seine-et-Marne une exploitation de 243 hectares a été mise en vente 26.000.000 de francs.

Les petites exploitations font l'objet de transactions plus nombreuses : elles sont d'ailleurs souvent vendues par parcelles aux agriculteurs voisins qui cherchent à s'agrandir.

b. Locations.

— Le marché des locations de parcelles et d'exploitations agricoles est caractérisé par une énorme disproportion entre les offres et les demandes de location : au cours de l'année 1950, la proportion des demandes n'ayant pas reçu satisfaction est en moyenne de 9 sur 10 par département : elle atteint 19 sur 20 dans certaines régions de grande culture. Seules font exception quelques régions du Plateau Central, où presque toutes les demandes ont été satisfaites.

c. Évolution depuis 1914.

— Depuis 1914, la valeur vénale de la propriété foncière a évolué de la façon suivante : hausse lente jusqu'en 1930, baisse de 1930 à 1935, hausse très rapide de 1935 à 1948. De 1948 à 1950, une légère baisse s'est amorcée, surtout sur les terres de qualité moyenne ou médiocre.

Pour fixer les idées, on peut dire que l'hectare de terre qui valait 1.000 francs en 1900 est passé à 1.100 francs en 1914, 3.000 francs en 1939, pour atteindre 20.000 francs en 1944 et 100.000 francs en 1948 et quelquefois retomber à 80.000 en 1950.

Ces chiffres marquent une tendance, mais il faudrait bien se garder de leur attribuer une valeur générale : en effet, de 1948 à 1950, la baisse semble avoir été la règle dans les départements suivants : Aveyron, Côte-d'Or, Creuse, Allier, Puy-de-Dôme, Tarn-et-Garonne, Gers, Meurthe-et-Moselle, ainsi que dans les régions de montagne. On remarquera qu'il s'agit souvent de régions de culture extensive.

Par contre, le mouvement de hausse semble s'être poursuivi dans les départements suivants : Gironde (hausse de 30 p. 100 sur les bonnes terres depuis 1949), Hautes-Alpes, Mayenne, Eure-et-Loir, Ardennes, Cantal, Var, Alpes-Maritimes. Il affecte surtout les exploitations à vocation herbagère et les terres de bonne ou très bonne qualité.

En outre, si l'on se reporte aux chiffres ci-après qui intéressent quelques régions choisies au hasard, on constate que l'évolution de la fortune foncière très irrégulière dans le temps l'est aussi dans l'espace.

Ces quelques exemptes montrent qu'il n'est pas possible d'adopter des conclusions générales sur l'évolution de la fortune foncière. Un seul fait est certain, C'est que les variations du prix des terres exprimées en valeur nominale n'ont pas suivi la dépréciation de la monnaie, ce qui, en d'autres termes, signifie que la fortune foncière exprimée en francs-or a sensiblement diminué depuis le début du siècle.

Évolution de la valeur des terres en France

de 1914 à 1950 dans quelques régions agricoles

  Valeur moyenne de l'hectare en milliers de francs Coefficients d'augmentation
1914 1939 fin 1944 1950 1914 1939 fin 1944 1950 1939/50
Terres labourables Plaine des Flandres 3,5 15 50 400 1 4 14 110 26
Beauce champenoise 1,2 5 30 100 1 4 25 83 20
Brie 2,5 8 40 200 1 3 16 80 25
Côtes-du-Nord (région des collines) 1,5 6 35 100 1 4 25 66 17
Sologne 0,8 2,5 11 30 1 3 14 37 12
Dombes 1 3 20 85 1 5 20 85 17
Crau 0,6 2 8 70 1 2,5 10 87 35
Herbages Vallée d"Auge 3 15 100 350 1 5 33 117 23
Plaine de Caen 1 5 35 240 1 5 35 240 48
Bessin 4 13 50 275 1 3,2 12 69 25
Nivernais (prés d'embouche) 4,5 13,5 75 200 1 3 17 44 15
Terrains maraîchers Banlieue parisienne 8 50 200 250 1 6,3 25 31 5
Basse Durance   28 200 850         30
Vignes Champagne 6 20 100 1.000 1 3,3 16 160 50
Bas Languedoc 5
à 12
20
à 50
100
à 150
400
à 1.200
1
1
4
4
20
12
80
100
20
24
Vignoble bordelais (Médoc) 2
à 3
8
à 10
60
à 100
100
à 350
1
1
4
3,3
30
433
50
116
12,5
35
Moyenne pour l'ensemble de la France         1 3 20 80 à 120 33
Variations de la valeur du franc-or (base 100 en 1914)         100 15 3,33 0,65  
Valeur totale de la terre exprimée en monnaie courante (milliards de francs)         79 (1913) 320 1.000 3.500  

Michel DUMANT.

Le Chasseur Français N°663 Mai 1952 Page 297