Accueil  > Années 1952  > N°663 Mai 1952  > Page 305 Tous droits réservés

Causerie médicale

La coxarthrie

Nous prenons comme sujet de causerie la demande d'un lecteur qui, âgé de soixante-quatre ans, sans antécédents notables, souffre de douleurs dans les articulations des hanches, avec ankylose partielle des muscles raidis, douleurs surtout accusées lors de la marche, soulagées par le repos, assis ou couché. Le nom de coxarthrie, sous lequel on désigne cette affection, a remplacé le terme latin de morbus coxae senilis, qui n'était pas entièrement exact, car, s'il s'agit en effet d'une affection survenant le plus souvent au moment du déclin de l'âge adulte, on a pu aussi l'observer avant la quarantaine chez l'homme comme chez la femme.

Dans les arthrites dites rhumatismales, les lésions débutent par la synoviale et les gaines tendineuses, tandis que dans la forme ici envisagée c'est par l'os et les cartilages que se fait le début, forme pour laquelle on propose le nom d'arthrose, avec troubles dits de dégénérescence, d'usure, des organes en rapport dans l'articulation, os et cartilage.

La radiographie montre habituellement une certaine décalcification coïncidant avec des proliférations (ostéophytes ou chondrophytes). L'os lui-même est dépoli, ce qui a pour résultat de la douleur lors du moindre frottement; les ostéophytes, lorsqu'ils ont atteint un certain développement, limitent les mouvements qui s'accompagnent souvent de craquements.

Les douleurs, si elles sont soulagées par le repos, ne sont guère influencées par les conditions météorologiques, les changements de temps auxquels sont si sensibles les rhumatisants.

Comme causes, il faut éliminer toutes les maladies susceptibles de donner des rhumatismes infectieux, aigus ou chroniques, et se contenter d'accuser la fatigue de cette articulation qui, en porte à faux, supporte tout le poids du corps dans la station debout.

Il est des cas où l'on peut supposer une action endocrine, une insuffisance ou un hyperfonctionnement de la thyroïde, parfois des ovaires chez la femme, au moment de la ménopause, mais on incrimine plutôt un trouble des glandes parathyroïdes, qui, entre autres, exercent une action sur l'utilisation du calcium ; on peut observer un excès du calcium sanguin en cas d'hyperfonctionnement, une diminution de cette calcémie en cas d'insuffisance parathyroïdienne.

Ces glandes parathyroïdes, globuleuses ou aplaties, de très petit volume, sont, chez l'homme, au nombre de quatre, situées à la face postérieure du corps thyroïde, deux externes, séparées de l'organe, et deux internes, plus ou moins incluses dans les lobes thyroïdiens; leur extirpation, chez l'animal, donne lieu à de graves accidents, comme la tétanie, et s'accompagne d'une notable hypocalcémie.

Lorsque l'examen minutieux du sujet permet de mettre ces glandules en cause, c'est contre elles qu'on a dirigé le traitement ; en cas d'hyperfonctionnement, ce traitement va de la simple irradiation jusqu'à l'exérèse partielle par voie chirurgicale ; en cas d'insuffisance, on administrera des extraits parathyroïdiens ; non pas par ingestion de poudres, généralement inefficaces, mais en injections sous-cutanées ou intramusculaires d'hormones, qui ont eu parfois des heureux résultats.

Si la marche de la coxarthrie est toujours chronique, parfois progressive, elle n'exerce aucune atteinte à la santé générale et est très compatible avec une très longue existence ; la complication d'ankylose est des plus rares.

La question du traitement est des plus embarrassante, non point qu'il manque de traitements proposés, mais leur multiplicité montre déjà qu'il n'existe aucune panacée.

Parmi les médicaments, les salicylates n'ont aucune action dans cette forme, l'aspirine ne peut servir comme palliatif en cas de crise douloureuse ; on emploie l'iode et le soufre, isolés ou en combinaisons, en solution à ingérer ou en injections sous-cutanées, intramusculaires ou endoveineuses ; on emploie aussi les sels d'or (chrysothérapie), les uns et les autres ayant chacun quelques bons résultats ; l'histamine, cette fois en injections dans la peau elle-même, exerce une sorte de révulsion, calme les douleurs et a le plus souvent une action favorable sur la maladie.

En orthopédie, on a eu recours à des « appareils de marche », immobilisant plus ou moins l'articulation et permettant la marche ; presque toujours, les malades sont soulagés par le port d'un corset bien ajusté qui, en répartissant mieux le poids du corps, soulage l'articulation de la hanche.

On a abandonné les injections intra-articulaires, qui avaient été tentées pour lubrifier l'articulation ; le transport d'un médicament dans cette articulation par ionisation n'a pas donné lieu à des désastres comme le traitement précédent, mais n'a guère montré d'efficacité ; il en a été de même pour les vaccins (en particulier celui de Ponndorf).

Tous les traitements physiques ont été mis en œuvre, au moins comme traitement adjuvant. La chaleur, sous forme de compresses chauffantes, de douches d'air chaud, de bains chauds, par l'irradiation des rayons lumineux ou infra-rouges, par la diathermie ou les applications de haute fréquence.

La radiothérapie a aussi quelques succès à son actif, soit par irradiation avec les rayons, soit par injections de corps radio-actifs.

Pour terminer cette longue — trop longue — énumération des principaux traitements proposés, il reste encore à parler des cures thermales, souvent efficaces, bien qu'ici encore il n'y ait pas de certitude absolue, à priori; tels malades ont été soulagés et même guéris à Aix-les-Bains ou à Dax, d'autres à Bourbonne-les-Bains ou à Bourbon-l'Archambault.

Le coxarthrique ne doit pas désespérer devant cette multitude de traitements, dont aucun n'est efficace pour tous les cas, chacun d'entre eux réagissant d'une façon différente ; aussi ne doit-il pas hésiter, toujours sous la surveillance de son médecin, à changer de médication ou de traitement quand les précédents sont restés inefficaces, et se dire qu'il n'existe pas de traitement à tout faire et que, chaque cas étant individuel, un examen très minutieux peut seul indiquer la direction dans laquelle doit être dirigé ce traitement.

Dr A. GOTTSCHALK.

Le Chasseur Français N°663 Mai 1952 Page 305