Le diamant de la cuisine.
— C'est sous cette désignation que, dans la Physiologie
du goût, Brillat-Savarin qualifie la truffe, ce curieux cryptogame
souterrain qui ne nous a pas encore dévoilé tous ses secrets.
Sans doute la truffe, de même que les autres champignons, se
reproduit-elle par spores, mais comment ces spores germent-elles et quel est
leur mode de nutrition ?
Ce que l'on sait, c'est que la truffe, au parfum subtil, qui
transmet son arôme aux mets les plus appréciés, ne peut naître et prospérer
qu'au voisinage des arbres et des arbustes, dits « truffiers », tels
que châtaigniers, hêtres, noisetiers, mais surtout sous le couvert des chênes
verts et des chênes blancs.
C'est probablement par l'intermédiaire de son mycélium
que la truffe vit en parasite et prend ses sucs nourriciers sur les radicelles traçantes
des essences qui lui conviennent. Mais, si l'on ne peut admettre la théorie de
la génération spontanée, comment expliquer le fait que, sur un terrain n'ayant
jamais produit de truffe, ce champignon apparaisse au bout d'un certain nombre
d'années, si on y plante ou si on y sème des glands de chêne ?
Les truffières naturelles.
— On rencontre un peu partout, en France, des truffières
naturelles, notamment dans les régions crétacées, où la teneur du terrain
en carbonate de chaux n'est pas inférieure à 25 ou 30 p. 100, et dont le
sol peu profond, léger et caillouteux, fait tracer les racines des arbres et
des arbustes qui y croissent.
Sans doute, la truffe pourrait encore faire son apparition
dans les terres riches et profondes, où les racines ont une tendance à pivoter
et relativement pauvres en chaux, mais les champignons y restent petits et ils
y acquièrent souvent une saveur musquée qui les déprécie.
Comme ces truffières sont habituellement d'un rendement
assez faible, on a intérêt à créer des truffières artificielles,
ensemencées avec des variétés à maturité échelonnée, comme la truffe noire
du Périgord, qui mûrit pendant tout l'hiver, à partir de novembre jusqu'en
mars, ainsi que la variété de Bourgogne, un peu plus précoce, que l'on
récolte d'octobre en février, ou encore la truffe d'été, la plus petite,
caractérisée par la présence de verrues saillantes sur toute sa surface, dont
la maturité s'échelonne de juin à septembre.
Les truffières artificielles.
— La création des truffières artificielles a été
préconisée et mise au point par un professeur du Vaucluse, M. Zacharewiez.
Sachant que l'on peut provoquer l'apparition et la
croissance du précieux cryptogame soit en semant des glands, soit en plantant
des chênes verts et des chênes blancs, M. Zacharewiez donne les
instructions suivantes :
Pour les semis, les glands sont ramassés le plus tard
possible dans les truffières produisant les variétés que l'on veut reproduire.
Le ramassage ayant lieu fin novembre, les glands auront pu s'enrober de spores
au contact du sol. On les mettra aussitôt en stratification dans le sable, ni
trop sec ni trop humide, pour éviter qu'ils ne se dessèchent ou qu'ils ne
pourrissent. C'est vers le mois d'avril, lorsque les radicelles sont bien
apparentes, que les glands sont mis en terre ; mais il est recommandé de
couper l'extrémité du pivot, afin de favoriser le développement des racines
traçantes.
Le terrain ayant été labouré au préalable et ameubli en
surface, on trace des rayons distants de 6 mètres pour les chênes verts et de 8
mètres pour les chênes blancs. Les glands étant distribués en poquets distants
de 6 mètres et recouverts de 6 à 8 centimètres de terre fine, on éclaircira les
touffes en conservant le plus beau pied.
C'est seulement cinq à six ans après le semis que l'on
commencera à récolter des truffes. Pendant ce temps, on peut pratiquer des
cultures intercalaires adaptées à là nature du terrain.
Si on procède par plantation de jeunes chênes, on les
prendra âgés de trois ans et l'on aura soin de raccourcir le pivot, toujours
dans le but de faire tracer les racines, afin que les truffes qui vivent en
symbiose sur elles puissent se développer.
Bien que les plantations de petits chênes permettent de réduire
à trois ou quatre ans l'apparition des premières truffes, au lieu de cinq à six
ans, les semis donnent généralement de meilleurs résultats comme
fructification.
Les soins et la récolte.
— Qu'elles proviennent de semis ou de plantations, les
soins à donner aux truffières sont les mêmes. Ils consistent en binages
répétés, ayant pour objet la destruction des mauvaises herbes, tout au moins
pendant les premières années. Aussi a-t-on intérêt à pratiquer les cultures
intercalaires, ou à y semer des fourrages artificiels.
Lorsqu'on s'aperçoit de la disparition des herbes, c'est que
la fructification est commencée: On peut effectuer la récolte en utilisant pour
cet objet les chiens ou les porcs, qui viennent fouiller avec leur groin les endroits
où les truffes se trouvent dissimulées.
C'est ainsi que, dans les truffières en production, les
récoltes peuvent se succéder pendant une partie de l'année si on a propagé les différentes
variétés à maturité échelonnée.
Pour intensifier la production, on aura recours aux engrais,
en donnant la préférence au fumier de ferme, tout au moins pendant les
premières années, Par la suite, on emploiera les engrais chimiques que l'on
appliquera tous les deux ans, à la dose de 100 kilogrammes de superphosphate,
18 kilogrammes de sulfate de potasse et 12 kilogrammes de nitrate de soude, le
tout pour un hectare. Cette fumure activera et augmentera le volume des truffes.
Dans les situations ou on pourrait disposer d'une eau courante, les irrigations
par submersion produiraient aussi de bons résultats, pendant les périodes de
sécheresse, sur la fructification.
Adonis LÉGUME.
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