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Luttons contre les pucerons

Les pucerons sont de terribles ravageurs de nos jardins, tant par leur nombre que par leur mode d'action. La lutte s'avère fort difficile.

Connaissons bien l'ennemi pour l'attaquer.

1° Le puceron des racines émigré sur les racines de betteraves, de choux, de salades, de tomates, chicorées et carottes : il est de forme sphérique, de couleur blanche et légèrement orangée. Dès le printemps apparaissent les premiers insectes ailés, et, par la grande sécheresse (juillet) principalement, l'invasion atteint son maximum en juillet ; puis, avec le rafraîchissement de la température, le nombre va de plus en plus en diminuant.

2° Le puceron du collet s'attaque plus particulièrement à :

— la carotte : d'un vert glauque, il ronge le sommet de la racine et, très souvent, se fixe dans les gerçures qui existent fréquemment et cause des ravages énormes en année sèche ;

— la chicorée, dont il suce avidement le collet ;

— le cerfeuil tubéreux.

Enfin, il est particulièrement fréquent et dévastateur dans les cultures sous verre (couches, cloches, etc.).

3° Le puceron de la tige et des feuilles : chez l'artichaut, un puceron de couleur noire ou mate et de forme ovale suce la tige et les écailles même ; l'attaque est principalement énergique au moment des chaleurs, alors que les plants vont être bientôt livrés à la vente.

Le fraisier est attaqué par plusieurs pucerons fort nuisibles : sur les pousses, à l'envers des feuilles et le long des nervures, au cours de la belle saison pour les cultures en pleine terre et toute l'année pour les cultures en serre, on aperçoit un petit puceron ovale, très clair, aux longues antennes.

Mêmes dégâts avec l'arrivée des colonies sur le pétiole et au collet des plants, et provoqués par un puceron de couleur vert bleu, aux cornicules courtes, aux pattes et antennes claires, habituellement visité par les fourmis.

À la face inférieure des feuilles, des colonies isolées d'un puceron de taille moyenne et de couleur verte ou brune, à longues cornicules réticulées à leur extrémité.

Le chou est attaqué fréquemment au début de l'automne par un puceron vert bleuté qui suce les feuilles à leur partie inférieure.

Les fèves sont très souvent, dès le mois de mai, la proie d'un puceron noir, anéantissant totalement la culture en périodes chaudes et sèches. Ce puceron, qui aime les parties herbacées fort tendres, suce la face inférieure des feuilles ; des colonies nombreuses s'attaquent aux pétioles des jeunes pousses et des premières gousses.

Les haricots sont l'objet de violentes attaques d'un puceron noir qui, fort répandu, se propage rapidement, car il existe des formes ailées : le puceron aux ailes blanchâtres, à nervures jaunes, envahit bien vite tous les organes végétatifs du plant et provoque l'apparition d'un liquide sucré ou miellat activement recherché par les fourmis. La plante souffre et sa productivité est considérablement réduite.

Le melon est attaqué par un puceron noir à sa face intérieure, et la plante s'épuise vite.

Même l’oseille, malgré son acidité, est atteinte par un puceron qui suce les feuilles.

Pratique de la lutte contre tes pucerons.

1° DIFFICULTÉS DE CETTE LUTTE.

Elles sont dues à :

— la petite taille de l'insecte, qui mesure seulement de 0mm,5 à quelques millimètres de longueur ;

— la facilité avec laquelle il se cache : il déforme les feuilles et les enroule, se loge dans les gerçures de la tige, des racines ;

— l’aptitude qu'il possède de vivre facilement en tous lieux, même sur la racine, dans tous les recoins ;

— la faculté de multiplication énorme et rapide, à tel point qu'une seule femelle non atteinte dans la lutte peut, en quelques jours, reconstituer l'invasion ;

— la sécrétion d'un miellat sucré qui attire les fourmis et favorise la propagation par ces dernières.

Enfin la température et l'humidité étant, par excellence, les facteurs de reproduction rapide, il est impossible de fixer les régularités des traitements, seule la vigilance s'impose.

2° PRATIQUE DE LA LUTTE.

— A. Elle se fait d'abord naturellement : la coccinelle, gentille petite bestiole aux noms locaux multiples (bête à Bon Dieu, bête de la Vierge, vache à Dieu, poulette à Dieu, vole-midi, barbote, etc.), petit coléoptère hémisphérique, rouge-brique ou jaune, paré de petites taches noires ou blanches, se nourrit abondamment de pucerons. On doit donc respecter soigneusement leur présence dans nos jardins et elles peuvent nous faire découvrir les foyers.

— B. Dans certains cas (fèves, pois), on peut avantageusement couper les extrémités envahies en pinçant au-dessus d'une dizaine de fleurs ; de plus, les fruits seront mieux nourris et deviendront plus beaux.

— C. Par poudrage : il est conseillé d'utiliser une poudre à base de roténone (type cubérol) que l'on projettera, à l'aide d'un soufflet, en nuages d'une grande efficacité.

— D. Par insecticides de contact : les insectes se groupant sur une plante en colonies, ils enfoncent leur appareil buccal dans les tissus végétaux et aspirent la sève. Il est donc inutile d'utiliser, dans cette lutte contre eux, un insecticide d'ingestion : il faudrait empoisonner la sève. Donc, seul un insecticide de contact léchant directement les insectes est susceptible de les détruire. Les plus utilisés sont à base nicotinée, car plus mordants.

1re formule : emploi d'une bouillie nicotinée savonneuse à la dose de 25 grammes d'extrait de nicotine titrée par 10 litres d'eau. Ajouter 500 grammes de savon noir.

Répéter le traitement à quarante-huit heures d'intervalle.

2e formule : bouillie au pyrèthre :

Poudre de pyrèthre 2kg,500.
Savon blanc 2 kilogrammes.
Eau 100 litres.
Ajouter alcool dénaturé 1 à 2 litres.

Préparation : on versera sur la poudre 20 à 30 litres d'eau chaude et on laissera macérer vingt-quatre heures au maximum ; si l'on emploie l'eau froide, la macération durera quarante-huit heures au moins.

Laisser refroidir et ajouter l'eau contenant le savon, soit aussitôt après le refroidissement, soit après la macération de quarante-huit heures.

Ajouter l'alcool à brûler seulement une fois la bouillie prête à l'emploi.

Emploi : cette bouillie doit être employée tout de suite, car son principe actif disparaîtrait vite par décomposition.

Efficacité : elle est très efficace contre tous les pucerons (et même les insectes domestiques), inoffensive pour l'homme et les animaux, sans danger d'emploi sur les légumes.

Mais seule une bouillie fraîche sera active : exiger du vendeur un produit pur et bien conservé.

3e formule : bouillie à la roténone.

Les poudres roténonées (de derris, de eubé) se trouvent difficilement dans le commerce, et pourtant la préparation de la bouillie est facile : 250 grammes de poudre par hectolitre d'eau et un bon mouillant (2 kg. de savon blanc).

Emploi dès préparation terminée.

Faute de trouver la roténone dans le commerce, on se contentera des produits vendus par ce dernier ; ils sont multiples et divers : on n'a que l’embarras du choix.

BOILEAU.

Le Chasseur Français N°665 Juillet 1952 Page 416