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L'élevage des dindonneaux

Les aléas du jeune âge.

— Les aviculteurs spécialisés dans l'élevage des dindonneaux savent que ce gros gallinacé n'est délicat que pendant la période qui précède ce que l'on appelle la crise du rouge. Une fois passée cette période critique, les dindons sont les moins exigeants et les plus rustiques de tous les oiseaux de basse-cour.

Qu'est-ce donc que cette fameuse crise extrêmement morbide qui se manifeste lors du rougissement et de développement des caroncules ?

C'est une maladie très grave, occasionnée par des parasites de l'intestin (amibes et hétérakis) qui provoquent des lésions dans le caecum et dans le foie.

Les sujets contaminés sont tristes, indolents, abattus et somnolents ; ils perdent l'appétit, maigrissent, et leur plumage se ternit, puis il survient une diarrhée agglutinante qui colle les plumes au cloaque. La mort survient à bref délai et les trois quarts des couvées succombent à l'épidémie.

Sans doute il existe des remèdes efficaces contre cette affection, notamment l'emploi des vermifuges, l'acidulation de la boisson et les poudres toniques, mais, comme il est généralement trop tard lorsqu'on les applique, il est beaucoup plus simple de prévenir cette maladie que de la guérir ; c'est d'empêcher cette infestation contagieuse, par des mesures prophylactiques et en revigorant les jeunes dindonneaux par une hygiène, des soins et une nourriture appropriée.

La question du logement.

— Les plus grands ennemis des dindonneaux sont l'humidité et les courants d'air froids. Des jeunes sujets qui piétinent et malaxent un terrain boueux et qui, par surcroît, sont exposés à la pluie, à la rosée et au vent, en consommant des aliments souillés par les déjections, restent chétifs, malingres, sans résistivité, succombent invariablement aux approches de la prise du rouge, aux alentours du troisième mois.

Il est absolument nécessaire de leur procurer un logement surhaussé, pourvu d'une litière saine, fréquemment renouvelée.

Que l'élevage des dindonneaux soit confié à une couveuse naturelle ou à une couveuse artificielle, on ne les laissera jamais sortir par la pluie ni par le grand soleil, mais seulement quand la rosée est tombée, en ayant soin de créer des abris ombragés si les arbres feuillus manquent dans l'enclos.

En outre, on devra leur distribuer une nourriture équilibrée pour leurs besoins, dans de petites mangeoires oblongues, dans lesquelles les petits ne peuvent pénétrer pour fienter ou gratter. Ces mangeoires seront souvent changées de place et nettoyées intérieurement, surtout si on nourrit à la pâtée humide. Enfin, il est recommandé de placer les mangeoires sur des cadres finement grillagés, pour empêcher toute contamination par des aliments souillés de déjections.

Les abreuvoirs, constamment approvisionnés en eau fraîche et potable, devront être placés à l'ombre et ils seront du système siphoïde, s'opposant à la pénétration des dindonneaux et les empêchant de se mouiller les plumes.

Influence de l'alimentation.

— Pour obtenir des sujets du poids de 12 à 15 kilogrammes en un temps record, les ressources des pacages sont loin de suffire et le grain, donné en supplément, ne fournit pas tous les principes nécessaires à l'accroissement normal. Il faut leur distribuer des aliments en rapport avec leurs besoins, riches en matière protéique que les céréales ne contiennent pas.

En premier lieu, il faut faire franchir aux dindonneaux la phase critique du premier âge, en leur donnant à satiété une pâtée sèche bien équilibrée. Si l'on dispose de lait écrémé frais, au lieu de l'utiliser à la confection des pâtées humides, qui nécessitent de fastidieux nettoyages, on le distribuera comme boisson, à la place de l'eau, mais on en tiendra compte en réduisant la teneur des rations en matières animalisées.

Dans la pratique, on pourra combiner une ration dans le genre de celle-ci :

Farine d'orge 3,500  kg.
Verdures hachées (orties, choux, salades, carottes râpées) 3,500  —
Petit son et remoulages 1,000  —
Poudre de lait écrémé 1,000  —
Tourteaux divers 1,000  —
  ————  
Total 10,000  —

Si on donnait du lait écrémé à boire, on supprimerait la poudre.

Tous les jours, pendant le premier mois, on fera bien de donner aux dindonneaux la valeur d'un œuf cru, par 6 à 8 têtes, à moins qu'on puisse leur procurer des œufs de fourmis, des asticots, des vers de terreau ou d'autres proies vivantes apportant les vitamines indispensables.

Lorsqu'on entre dans le deuxième mois, on remplace la poudre de lait écrémé par la même quantité de farine animale, viande ou poisson, par mesure d'économie.

Une fois la crise passée et que les dindonneaux vont aux champs, riches en verdures, grains égarés et proies vivantes, on peut combiner des rations plus économiques, tout en réglant les distributions sur l'appétit des pensionnaires, leur gave devant être bien pleine lorsqu'il vont se coucher dans des dortoirs largement aérés.

C. ARNOULD.

Le Chasseur Français N°665 Juillet 1952 Page 424