Accueil  > Années 1952  > N°665 Juillet 1952  > Page 444 Tous droits réservés

A propos de l'été perpétuel

« Allons-nous vers un été perpétuel ? », simple question que nous avons posée (décembre 1951) en apportant quelques-uns des faits qui paraissent militer en faveur d'un réchauffement terrestre quelle qu'en fût la cause, mystérieuse jusqu'alors. Avec la prudence requise d'un scientifique, nous avons conclu : « Si la variation thermique observée correspond bien à une réalité objective, elle pourrait un jour ... », laissant à l'avenir le soin de décider des conséquences réelles.

M. P. de Bernade (qu'il me pardonne ces quelques réflexions !) a vu dans ces lignes (avril 1952) l'écho d'inquiétudes que rien ne paraît justifier sérieusement. En effet, si l'homme des dernières glaciations a su résister à leurs assauts malgré l'inconfort et la précarité de ses moyens d'existence, on ne voit guère pourquoi l'humanité contemporaine ne saurait se prémunir contre de tels dangers, s'il en est ... Quelques lignes de ses propos nous ont même laissé un peu rêveur lorsqu'il énonce d'une part qu' « en réalité ce réchauffement de la Terre est plus apparent que réel » et conclut d'autre part que « tous les savants sont d'accord pour constater que nous nous éloignons de la dernière période glaciaire et que la Terre va en se réchauffant ». Nous insistons encore ici pour souligner, une fois de plus, combien nombre des hypothèses proposées sont feu de paille avant que n'éclate l'explication définitive. En ce domaine du réchauffement actuel constaté, convenons tout de suite qu'aucune n'est présentement vérifiée.

Si les poussières volcaniques ne peuvent jouer un rôle appréciable et durable dans la filtration des radiations solaires, on ne saurait en dire de même cependant du nuage cosmique. C'est le savant É. Belot qui, le premier, en a proposé l'explication.

Mais de cette cause possible, un de mes correspondants, M. L. Mercier, de Chancelade (Dordogne), a donné une interprétation différente, très séduisante, que je suis heureux de soumettre au lecteur : « Les variations de la température moyenne de l'atmosphère terrestre envisagées sur de longs espaces de temps sont en relation étroite avec les variations de la température du Soleil. Le système solaire, tout entier, est entraîné dans l'espace sans fin, suivant un tracé que les astronomes se sont efforcés de définir, tout au moins dans ses grandes lignes. Au cours de cette translation, il traverse des régions plus ou moins riches en matière cosmique. Les astronomes ont observé des amas sombres, correspondant aux régions de l'espace très riches en cette matière, formée de corps de dimensions très diverses, depuis les particules jusqu'aux plus gros astéroïdes, débris épars d'astres dissociés.

» Lorsque le Soleil traverse un de ces amas, il attire par sa masse, suivant les lois de l'équilibre des corps dans l'espace, toute la matière qui est à portée de son influence. Cette portée, pour les corps les plus pesants, peut dépasser de très loin l'orbite de sa plus lointaine planète. Or ces astéroïdes et autres corps célestes, en tombant sur le Soleil, y développent des réactions exothermiques, par combinaison chimique ou dissociation atomique. Ces phénomènes ajoutent leur rayonnement calorique à celui propre du Soleil. Ces taches solaires marquent les points de chute des corps les plus importants et les plus volumineux qui, dissociés par le milieu, provoquent de véritables éruptions dans la photosphère. Les taches ne disparaissent que lorsque les réactions physico-chimiques sont terminées.

» Le surplus d'activité solaire ainsi créé se traduit pour nous par une légère élévation de la température moyenne. Il suffit de quelques degrés centigrades en plus pour provoquer les changements que M. Gauroy signale.

» Lorsque, au contraire, le système solaire traverse des régions de l'espace pauvres en matière cosmique, il en résulte une baisse de la température moyenne de notre atmosphère.

» Ainsi s'expliquent les époques torrides, aussi bien que les époques glaciaires, que les géologues, les paléontologues et les préhistoriens ont constaté dans les terrains sédimentaires et les dépôts quaternaires. La périodicité de ces époques n'existe pas. »

De toutes les hypothèses proposées, celle-ci n'est sans doute pas la moins vraisemblable, ni la moins ingénieuse. Mais, plus que la « durée » des phénomènes (l'existence humaine fût-elle éphémère, il n'empêche pourtant que l'homme a pu déterminer le cycle évolutif d'une étoile ou d'un corps radioactif qui s'inscrit sur des centaines de millions d'années), c'est bien leur « comment » qui nous dépasse le plus souvent.

Aussi nous paraît-il fort délicat de soumettre « exclusivement » au jugement du lecteur des essais d'explication, trop souvent admis comme réalité, auquel il n'est pas nécessairement préparé, par l'étendue des connaissances ou les spécialisations qu'implique toute connaissance. Et c'est pourquoi, dans le cas présent tout au moins, nous préférions aux hypothèses méritoires et nécessaires le simple exposé des faits.

Pierre GAUROY.

Le Chasseur Français N°665 Juillet 1952 Page 444