Très souvent questionné sur les moyens permettant
d'identifier les animaux nuisibles, j'ai cru intéresser les lecteurs du Chasseur
Français en rappelant les grandes lignes de ce travail.
Un animal ne peut être identifié que par les signes qu'il a
pu laisser derrière lui. Parmi ces signes, nous trouverons :
Les empreintes.
— En France, les animaux cotés comme nuisibles ont, à
part la fouine et la martre, des empreintes nettement différentes qui
permettent de les reconnaître et de les différencier. Malheureusement, les
empreintes nettes sont assez rares. Leur impression sur le sol varie avec la
nature de celui-ci et elle est plus ou moins déformée par les conditions
atmosphériques. Le poids de l'animal joue évidemment un gros rôle dans
l'impression des empreintes. Il est bon de rappeler que chaque patte a son
empreinte propre : les pattes antérieures sont différentes des pattes
postérieures, les pattes de droite diffèrent de celles de gauche en conservant
cependant un cachet identique. Chez le blaireau et la loutre, par exemple, on
constate une grosse différence d'empreintes entre une patte avant et une patte
arrière.
Le nombre de doigts, la longueur des griffes ou l'absence de
celles-ci, les dimensions de l'empreinte en sont les caractéristiques
principales plus ou moins visibles.
La voie.
— Sous ce vocable, on comprend le dessin formé par les
quatre pattes de l'animal quand il progresse. Chaque animal a sa voie qui se
modifie selon son allure : pas, trot, galop, rampé, bond — et selon
son état physique : animal en bon état, animal blessé, femelle pleine.
C'est avec une couche de neige de 5 centimètres qu'on
identifie le mieux les voies ; au-dessus de 5 centimètres, la neige
déforme les voies ou peut prêter à confusion. La voie est surtout caractérisée
par la distance qui sépare les pattes entre elles en long et en large.
La piste.
— Elle est formée par la succession des voies ;
son trajet, lorsqu'il peut être déterminé et suivi, donne d'utiles
renseignements sur les points de passage fréquentés régulièrement.
Les coulées.
— Elles sont constituées par les petits sentiers que
l'animal finit par créer en y passant régulièrement. Elles peuvent être
visibles dans les buissons, les grandes herbes, les tas de foin ou de paille,
les tas de fagots, et même sur la terre nue.
Les dimensions de la coulée (hauteur et largeur) donnent une
idée de l'animal qui la fréquente, mais sans vouloir trop préciser, car un
animal plus petit ou de même taille peut fréquenter également la coulée créée
par un autre. C'est le cas d'une fouine empruntant une coulée de blaireau dans
un coteau. Pour certains animaux, les coulées peuvent aboutir au terrier. Si la
coulée est fraîche, nette de toutes feuilles ou brindilles, elle a des chances
d'être fréquentée.
Les poils.
— L'examen des ronces qui bordent ou dominent les
coulées ou points de passage fréquentés donnera parfois la trouvaille de poils
qui y sont restés accrochés. C'est là un indice précieux qu'un observateur
averti ne laissera pas échapper et qui lui permettra de mettre le nom de
l'animal en évidence.
Les laissées.
— Les fientes des animaux permettent également de les
identifier et, pour certains d'entre eux, on les trouve plus facilement que les
empreintes en dehors du temps de neige.
Les reliefs de repas.
— Ils pourront donner une indication générale
intéressante, mais insuffisante le plus souvent.
Il est à remarquer que, pour que l'identification soit
certaine, on fera bien de chercher à réunir le plus grand nombre de remarques
sur une même piste. On cherchera également à éviter les erreurs ou confusions
possibles, par exemple de prendre une empreinte de fox-terrier pour celle d'un
renard, une empreinte de lapin pour celle d'un putois, du poil de chat pour du
poil de fouine, des laissées de chat pour des laissées de loutre ou de fouine, etc.
Une observation attentive, patiente et raisonnée, permettra avec un peu
d'habitude de ne pas se tromper. Il y a là une gymnastique de l'œil à effectuer
et, avec de l'entraînement, on y arrive facilement. La découverte des indices
est à comparer à la recherche des champignons au bois : une fois l'œil
habitué, on découvre aussi bien les champignons qu'un lapin ou un lièvre gîté
dans une cépée. Pour un piégeur, c'est un travail indispensable s'il veut
piéger intelligemment.
A. CHAIGNEAU.
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