Les visiteurs du dernier Salon de la Machine agricole n'ont
pas été sans remarquer le nombre et la variété des véhicules agricoles exposés.
Si l'agriculture a pu souffrir il y a quelques années d'une pénurie de
remorques, il y a maintenant surabondance. Cette situation ne laisse pas
d'inquiéter de nombreux constructeurs qui éprouvent de plus en plus de
difficultés pour écouler leur matériel. Il nous paraît donc intéressant
d'essayer de faire le point à propos de ce problème d'un intérêt majeur. De
nombreux industriels, s'ils ne tiennent pas compte des impératifs du transport
agricole, risquent en effet de ne plus trouver preneur de leur fabrication.
Tout d'abord il convient de ne jamais perdre de vue qu'une
remorque agraire est acquise pour faire toutes sortes de charrois, aux champs
et sur route. Pour effectuer les transports sur route, il y a lieu de
considérer que la remorque doit être bien adaptée au tracteur et non à
l'importance de l'exploitation. À cette condition seulement, la conduite sur
route ne constituera plus un danger.
La charge du véhicule est un point important à définir.
Quand un représentant propose à l'agriculteur une remorque, il ne manque pas de
lui parler de tonnage et de charge maximum. Mais comment le conducteur
chargeant sa remorque aux champs, pourra-t-il appliquer des notions purement
théoriques. Chacun sait que, dans la plupart des cas, la remorque est remplie
au delà du maximum. On ne se préoccupe que du volume. Le poids n'est connu que
plus tard, en arrivant au lieu d'écoulement ou de stockage des produits. Très
souvent le conducteur s'aperçoit, avec satisfaction, que sa remorque a chargé
une ou deux tonnes de plus que la charge indiquée. La remorque a tenu ...
on pourra donc recommencer ...
Cette surcharge entraîne, néanmoins, un effort exagéré et
toujours anormal des pneus, des roues, des essieux. Or ces éléments ont été
fabriqués pour porter une charge définie qui ne peut pas être dépassée sans
inconvénient. Cependant, étant donné les conditions dans lesquelles s'opèrent
la plupart des charrois, il n'est pas possible d'appliquer cette règle comme
peuvent le faire, par exemple, les transporteurs routiers. Les constructeurs
doivent donc calculer le tonnage très largement. Voici, à propos de charge,
l'opinion de M. Baratte, de l'Académie d'agriculture.
« Le tonnage du véhicule est limité par le pneu. Dans
les terres détrempées, la roue sur pneu ne travaille pas mieux qu'une roue
solide quelconque et, lorsque certaines conditions sont dépassées, elle
travaille moins bien qu'une roue indéformable, parce qu'il y a freinage. Aux
stations d'essais, on a tenté de faire des essais et des calculs à ce sujet,
afin de savoir quelle charge normale l'essieu à pneu doit pouvoir supporter. On
la connaît approximativement pour un essieu à pneu ordinaire. Si on dépasse la
charge de 3.000 à 4.000 kilogrammes par essieu, on travaillera toujours mal,
et, dans une terre détrempée, le pneu perdra tous ses avantages au détriment de
la traction. »
Nous avons dit plus haut que la remorque sert au transport
de tous les produits de l'exploitation. Le problème du point de vue du
constructeur serait plus facile s'il s'agissait de concevoir un véhicule pour
les fourrages, un autre pour les betteraves, un autre encore pour les céréales.
Inutile de souligner que les moyennes exploitations ne pourraient investir les
capitaux nécessaires à l'achat d'un tel équipement, La remorque sert à toutes
fins. Le volume de la caisse doit être déterminé de telle sorte qu'il ne puisse
y avoir surcharge pour le produit ayant la densité la plus forte. Mais, comme les
produits à faible densité occupent un gros volume, il faut prévoir un système
de ridelles ou autre dispositif permettant leur chargement. Pour le
déchargement des céréales en vrac, lors de la récolte à la moissonneuse-batteuse,
par exemple, cette remorque doit être pourvue de trappes de vidange aménagées
dans le plateau, ou d'un fond escamotable, ou encore d'un dispositif de
basculement.
La moyenne et la petite culture qui constituent l'assise de
notre économie agricole ont besoin de remorques à usages multiples, comme nous
venons de l'esquisser, variant de 2t,5 à 4 tonnes. Il est nécessaire,
selon nous, que les constructeurs normalisent leurs types et s'en tiennent à la
construction d'un petit nombre de modèles bien adaptés aux besoins des
exploitations précitées.
Le transport est une des activités les plus importantes de
l'agriculteur moderne. Ce problème doit recevoir des solutions rationnelles.
Les efforts des constructeurs, dans ce domaine, nous paraissent devoir être plus
coordonnés et il doit être tenu compte des vœux des paysans si l'on désire
obtenir de bons résultats.
G. DELALANDE.
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