Exploit aussi peu banal qu'involontaire.
— Cette histoire ne s'est pas passée dans la banlieue
de Marseille, mais bien à l'autre extrémité de la France, dans sa région
Nord-Ouest. Et elle est bien authentique.
Or, donc, un chasseur, en février 1952, chassant dans une
forêt où il savait trouver plusieurs variétés de gibier, notamment des lapins
et des sangliers, avait chargé son fusil en conséquence, afin d'être prêt à
toute éventualité, soit un coup à plombs et un coup à neuf chevrotines ;
il était sans chien.
Ayant constaté une grande entrée dans un roncier, il se
pencha et vit une grosse masse foncée immobile qu'il reconnut être un sanglier
baugé. Visant soigneusement pour l'immobiliser d'un seul coup, en lui brisant
la colonne vertébrale, ce à quoi il réussit, quelle ne fut pas sa stupéfaction
de voir sortir tout titubant de ce même roncier un autre sanglier, mais plus
petit ; il l'acheva de son second coup à plombs ; il n'aurait, du
reste, pas été loin. Ainsi, tirant un peu haut pour atteindre la colonne
vertébrale, par suite de la dispersion, deux chevrotines ont atteint le
sanglier se trouvant à l'arrière-plan, alors que les sept autres foudroyaient
le premier.
Ce premier était une laie de 90 kilos, pleine ; le plus
petit, une bête de compagnie de 35 kilos.
J. D.
Permis national de chasse.
— Loi n° 52-859 du 21 juillet l952 instituant
un permis de chasse unique.
L'Assemblée nationale et le Conseil de la République ont
délibéré,
L'Assemblée nationale a adopté,
Le Président de la République promulgue la loi dont la
teneur suit :
Article unique.
— L'article 968 du Code général des impôts, modifié par
l'article 8 du décret n° 51-32 du 9 janvier 1951, est abrogé et remplacé
par les dispositions suivantes :
Art. 968.
— Le permis de chasse est d'un type unique dénommé « permis
national de chasse », valable sur tout le territoire français.
La délivrance du permis de chasse donne lieu à la perception
d'une somme unique partagée en trois parts : l'une revenant à l'État à
titre de droit de timbre, la deuxième attribuée à la commune dont le maire a
donné l'avis énoncé par l'article 5 de la loi du 3 mai 1844 modifié, la
troisième constituant le montant de la cotisation des porteurs de permis de
chasse en tant que membres d'une société départementale de chasseurs.
La somme totale visée à l'alinéa précédent est fixé à l.550
francs, dont 650 francs sont versés à l'État, 300 francs aux communes et 600
francs aux sociétés départementales de chasseurs.
Les dispositions du présent article ont effet pour la
période de chasse comprise entre e 1er juillet 1952 et le 30 juin
1953 et pour les périodes subséquentes.
L'amusement de maître Corbeau.
— Le 6 novembre 1951, par grand vent de sud-est, mes
yeux se portèrent, alors que je rentrais dans ma maison de campagne, sur un
corbeau s'envolant presque verticalement dans une prairie proche, à peine à 100
mètres de moi. Cet oiseau, qui venait de laisser tomber un objet qu'il
emportait avec son bec, se précipitait alors au sol pour le ramasser. Presque
aussitôt le corbeau s'envolait à nouveau et, à environ 15 mètres de hauteur,
j'eus l'impression que l'objet qu'il emportait lui avait échappé une deuxième
fois, ce qui provoqua une deuxième descente au sol de l'oiseau. Jusqu'à ce
moment, rien ne m'avait paru anormal, et je regardais distraitement le corbeau
repartir une troisième fois et s'élever rapidement. C'est alors que je fus
surpris de constater, pour la troisième fois, que l'objet que tenait dans son
bec le corbeau, et qui pouvait être vraisemblablement une noix parce qu'il ne
paraissait pas très lourd, retombait à peu près de la même hauteur, et j'avais
alors l'impression assez nette que l'oiseau l'avait lâché volontairement.
D'ailleurs, cette impression me fut confirmée par le fait que l'animal suivait
dans sa chute assez lente ce petit objet et le retrouvait facilement à terre.
Je m'attendais donc à une nouvelle ascension et à un nouveau lâcher ; cela
se produisit évidemment dans les mêmes conditions, si ce n'est que le vent
violent agrémentait le jeu du corbeau en augmentant sa difficulté d'ascension
et en faisant dévier le corps et en le ralentissant dans sa chute. Le corbeau
était certainement en train de s'amuser, à moins que l'amusement lui-même ne
.constituât une expérience ou un entraînement auquel se livrait l'animal,
présentant de toute façon pour lui un intérêt certain, car je comptais la
répétition du manège sept fois. Je rentrai alors dans la maison et, à travers
les vitres de la fenêtre de la cuisine, je pus faire suivre à mon jeune fils
(neuf ans) une nouvelle évolution complète de l'animal. J'appelai ma femme, qui
se trouvait à l'intérieur, mais le manège avait pris fin ; le corbeau,
d'ailleurs isolé, se promenait tranquillement dans le pré et paraissait avoir
alors perdu l'objet de son amusement ou s'en désintéresser.
J. T ..., Le Monteil-de-Chalvignac (Cantal).
Lièvre gité dans la neige.
— J'ai lu récemment, dans le courrier cynégétique du Chasseur
Français, l'observation de M. Mollier au sujet du « lièvre gîté
dans la neige ».
M. Mellier, après s'être renseigné, conclut à un cas
sans précédent.
Je ne suis pas d'accord avec lui, car la manière de se gîter
du lièvre est tout à fait courante, tous les montagnards pourront vous le
confirmer.
Habitant l'Alpe-d'Huez (1.860 mètres) depuis trente ans et
chasseur enragé, j'ai pu constater moi-même, au cours de promenades en ski,
l'automne et l'hiver, au moins quinze cas semblables.
Le lièvre gris et le coq de bruyère appliquent la même
tactique : après une grosse chute de neige, ils se creusent une galerie
sous la neige, galerie complètement rebouchée, et peuvent attendre ainsi
plusieurs jours s'il le faut ; les galeries peuvent avoir jusqu'à 2 mètres
de long.
Georges RAJON, abonné.
Quand le vrai est parfois invraisemblable.
— Près de vingt ans après, je me décide à porter à la
connaissance des lecteurs du Chasseur Français une aventure qui m'est
arrivée un jour que je chassais seul sur les levées boisées du canal d'Orléans,
à proximité du bourg de Sury-aux-Bois.
Si je ne l'ai pas fait plus tôt, c'est parce que cette
aventure m'a paru ne pouvoir être considérée par le plus grand nombre que comme
une grosse galéjade.
Elle est pourtant rigoureusement exacte.
Sur la levée en question qui peut avoir, à l’endroit où je
me trouvais, une trentaine de mètres, mon chien fit partir, presque dans mes
jambes, un lièvre auquel je décochai à tout hasard un coup de fusil à travers
troncs et broussailles.
Après avoir constaté que la bête n'était pas restée sur
place, foudroyée, je courus sur le pré voisin, où je pensais qu'elle n'allait
pas manquer de sauter pour gagner la plaine.
Après une bonne minute d'attente, ne voyant rien paraître,
je revins sur les lieux et mis sur la piste mon chien, qui me conduisit au bord
du canal.
Mais de lièvre, point ! Où diable pouvait-il bien être
passé ? Avait-il filé le long du canal ? À droite ? À gauche ?
J'en étais là de mes réflexions, quand, tout à coup, mes
regards tombèrent sur un sillage très fourni de bulles de gaz des marais, qui
coupait de biais l’eau du canal.
Quoi, me dis-je, aurait-il traversé à la nage ? Mais
alors, pour faire remonter tant de bulles, il faudrait qu'il ait traversé par
le fond sous 1m,50 et peut-être 2 mètres d'eau ! C'est
invraisemblable.
Tout à coup, à l'extrémité opposé du sillage, un remous se
produisit et je vis, non sans stupéfaction, mon lièvre émerger de l'eau, gravir
le remblai, prendre le chemin de halage et filer à bonne allure.
Un nouveau coup de fusil, bien ajusté cette fois, l'arrêta
enfin, et je n'eus qu'à faire le tour par le pont, disant de 5 à 600 mètres,
pour aller ramasser mon lièvre, qui était, est-il besoin de le dire, plus
trempé qu'un canard.
DOUTÉ, abonné.
Le lièvre et la lèchefrite.
— Un de ses amis lui ayant signalé qu'un lièvre
fréquentait une vigne lui appartenant, un chasseur, accompagné de son chien, se
rendait au lieu indiqué ; le chien prenait effectivement la piste, mais,
arrivé sur un petit mur appelé « restanque » dans le Midi, mur qui
retient la terre des sols en pente, l'animal perdait la trace, tournait en rond
et finalement se couchait aux pieds de son maître.
Le lendemain, même manège, même résultat ; le troisième
jour, notre chasseur juché sur le mur, le chien à ses côtés, essayait de percer
le mystère, lorsqu'un passant de sa connaissance l'abordait et lui demandait le
motif de ses réflexions.
À ce moment, le chasseur, sans répondre, épaule et tire dans
la direction d'un olivier en contre-bas et au pied duquel, au milieu des
broussailles, notre lièvre était accroupi — oh ! ironie — sur
une vieille lèchefrite rouillée.
Vraisemblablement, le lièvre, après avoir escaladé le mur,
franchissait d'un bond l'espace qui le séparait du pied de l'arbre, et c'est ce
qui explique que le chien perdait la trace.
Inutile d'ajouter que le lièvre en question a fini sa
carrière ce jour-là.
A. DOULAT, abonné.
Intelligence et non plus instinct.
— Mes parents habitent un petit village sur les bords
de la Marne, tout près de Châlons. La grande cuisine donne, par une porte, sur
une ancienne écurie à chevaux qui ouvre directement sur une cour. C'était la
mode autrefois. Dans cette écurie, nichent chaque année des hirondelles. Deux
couples s'installent immuablement depuis ... toujours. Quand les agréables
amies arrivent, elles franchissent les deux portes ou la fenêtre et font, en
criant, plusieurs fois le tour de la cuisine, puis, juchée sur le dessus de
l'âtre, l'une d'entre elles donne un concerto. Donc les voici.
Un matin, très tôt, mon père entendit plusieurs coups secs « frappés
contre les vitres de la fenêtre de chambre », alors qu'il était encore au
lit.
Il ne s'en soucia point ; un instant après, même
incident. Intrigué, il mit le nez dehors (la chambre est au premier étage, il
n'y a pas de volets). Rien d'anormal. Des hirondelles passaient et repassaient
au ras de la maison dans leur carrousel millénaire. Bref, le réveil matinal de
mes parents fut provoqué de même manière plusieurs fois. Un matin, mon père et
ma mère eurent la certitude que les hirondelles en étaient la cause. Pourquoi
ces coups aux fenêtres ? Eh bien ! quand les habitants se couchaient
tôt, les oiseaux ne pouvaient rentrer auprès de leurs petits, les portes étant
closes. Qu'à cela ne tienne, les jeunes gavés pouvaient attendre. Mais, au
matin, il fallait les alimenter d'urgence et, le jour levé : « Toc,
toc, maître, lève-toi pour ouvrir. » Et, en effet, la porte à peine
ouverte, c'était la ruée sur les nids. Mon père aménagea une ouverture
au-dessus de l'entrée ; depuis, les hirondelles ne l'ont plus jamais
appelé.
Une remarque : la façade compte cinq fenêtres, dont une
seule pour la chambre de mes parents, et c'est bien à cette seule fenêtre que
les hirondelles frappaient.
Au départ, la cérémonie du « tour de cuisine » à
toute allure recommence, avec les jeunes en plus cette fois. Ce sont les
adieux.
Alors, tout cela ? Intelligence plus qu'instinct à mon
avis.
Henri ROSIER, abonné.
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