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RAPPEL : une version de l'ensemble du développement, revue et améliorée dans le détail, est disponible en format pdf à l'adresse : Dimensions des nombres  

 
 
 
 
 
 
 
 

Pour voir ce qui se passe dans la 4ème dimension

Combien de dimensions peut-on représenter et lire en continu ?
On a dit 3 pour l'espace, mais si l'on ajoute la dimension du temps, cela fait 4.
Pour obtenir ces 4 dimensions on construit un repère de 3 dimensions de coordonnées, et dans ce repère on représente la position d'un mobile à divers moments. C'est un repère 3 D + T classique, et le fait que l'on y "retient" les unes à côté des autres les positions successives prises par le mobile dans son déplacement permet d'y figurer la 4ème dimension, celle du temps.
 
évolution du mobile de A vers B 
dans 4 dimensions simultanées 
  
C'est le dessin de la portion de courbe continue AB qui représente la continuité de la 4ème dimension, souvent utilisée pour représenter la dimension du temps
Dans cet usage habituel, la continuité entre les différents points d'un espace 3 D, sert donc à représenter la continuité de ce qui se passe dans la dimension du temps, mais on peut l'utiliser pour représenter la continuité d'une autre dimension que celle du temps, en fait de n'importe quel autre type de dimension de valeur 1.

On peut donc envisager d'utiliser un tel graphique à 3 + 1 dimensions, pour représenter les 4 dimensions d'une déformation 4 D + T, à condition de renoncer à représenter en même temps leur dimension de temps.
Dans le cas d'un phénomène qui prend une 4ème dimension d'autosimilarité, c'est ce qui se passe en continu dans cette dimension d'autosimilarité qui pourra être représenté au détriment de ce qui se passe en continu dans la dimension du temps.

Et l'on comprend maintenant que c'est très exactement cela qu'a obtenu l'équipe de Robert Shaw dans son graphique qui "truquait" la série 1 D des intervalles de temps du robinet qui goutte chaotiquement [revoirE ce graphique].
Chaque dimension du repère 3 D (abscisse, ordonnée et hauteur) porte la valeur de tous les intervalles mesurés, mais comme ces valeurs sont décalées "d'un cran" entre chaque dimension, la continuité qui se crée sur la 4ème dimension du graphique correspond à ce qui est "transverse" à tous les intervalles de durée mesurés. Et ce qui est transverse à la dimension du temps où ils se sont créés, et qui est transverse à chacune des déformations qui les ont créés, c'est précisément l'interférence de ces déformations qui, dans cette phase du phénomène, se trouve être autosimilaire.
Ce qui apparaît sur le graphique, c'est donc l'allure de la déformation continue d'autosimilarité provoquée par l'interférence entre les 3 déformations initiales du phénomène.
Comme il n'y a de place sur ce graphique qu'à 4 dimensions continues, la dimension d'autosimilarité a pris la place de la dimension du temps, à laquelle on a explicitement renoncé en utilisant des coordonnées qui groupent des intervalles de temps différents. Dans ce type de coordonnées, chaque intervalle de temps est, en effet, confronté avec son suivant et avec celui qui suit son suivant, de telle sorte que l'on saute ainsi par-dessus la stricte continuité des évènements qui se succèdent, on brise la logique 1 D de l'écoulement du temps. Alors, nécessairement, sur ce graphique 4 D (4 déformations), un point et son suivant dans le temps n'ont plus aucune relation de continuité, et donc aucune relation de proximité.
 

On en vient maintenant à l'allure elle-même d'un graphique qui représente une dimension d'autosimilarité.
Quand la 4ème dimension d'un repère de coordonnées 3 D + 1 D correspond au temps, elle est représentée par une courbe continue. Tous les points successifs de cette courbe se touchent, comme tous les instants successifs du déroulement du temps se touchent.
Quand la 4ème dimension correspond à la dimension d'autosimilarité, on doit s'attendre à ce qu'elle soit cette fois représentée par une figure autosimilaire, car de la même façon qu'un trajet continu a comme "image" une courbe continue, une dimension d'autosimilarité doit avoir comme "image" une figure autosimilaire.
C'est bien précisément ce que l'on obtient.
On ne peut pas l'observer dans le cas de l'attracteur dessiné par l'équipe Shaw, car l'image est trop "floue". Mais on sait que la figure obtenue est en fait une coupe transversale partielle d'un attracteur qu'on appelle l'attracteur de Rössler.
 
 
  
L'attracteur de Rössler 

le graphique obtenu par l'équipe Shaw est en fait une coupe transversale partielle de cet attracteur 
[revoirE ce graphique] 

[référence du dessin : James P. Crutchfield dans un article "le chaos" paru dans la revue Pour la Science"]

Or l'attracteur de Rössler est un attracteur que les mathématiciens appellent "étrange" parce qu'il a la particularité de se répéter semblable à lui-même à toutes ses échelles, c'est-à-dire qu'à chaque fois qu'on l'observe à une échelle plus fine, on retrouve la même allure que celle que l'on observe aux échelles plus grandes.
Nous allons montrer cette particularité sur un autre "attracteur étrange", dénommé lui l'attracteur de Michel Hénon, du nom de son inventeur.


  
  
l'autosimilitude à toutes ses échelles de 
l'attracteur de Hénon 
[dessin de James P. Crutchfield]  
 

Cette courbe est calculée mathématiquement, et grâce à la simulation que permet le calcul, nous pouvons la regarder comme avec un microscope qui grossit jusqu'à 1000 fois. 

Ainsi, le dessin représente en a une vue d'ensemble de la courbe sur laquelle se situent les positions successives d'un même point de départ. En b, on a le petit carré de a grossi 10 fois. En c, on a le petit carré de b grossi 10 fois. Et en d on a  cette fois le petit carré de c grossi 10 fois. 

En d, on a donc un détail de a agrandi 1000 fois, qui ressemble à la courbe d'ensemble a dans sa partie centrale. En même temps, d représente une partie des bandes de c,  tellement similaire dans leur nombre et leur rythme d'alternance à la totalité des bandes de c  ou des bandes de b (2 lignes très rapprochées sur le bord extérieur, 1 petit écart, 2 lignes assez rapprochées, 1 très grand écart, 2 lignes assez rapprochées, 1 moyen écart, 2 lignes extrêmement rapprochées formant le bord intérieur), qu'on ne peut pas faire la différence entre "une vue à une échelle" et "une vue à une échelle 10 fois plus petite" ou "100 fois plus petite", hormis pour ce qui concerne le rayon de courbure des figures. 

On a peine à réaliser que les 4 doubles lignes de la figure "d" ne sont que les grossissements des 2 doubles lignes les plus extérieures de la figure c. Et cela compris, on s'attend à ce que si la précision des arrondis de calculs permettait de grossir encore 10 fois le dessin, on trouverait dans l'agrandissement des 2 doubles lignes les plus extérieures de d, la même organisation en 4 doubles lignes. 

Quelle que soit l'échelle, le détail du détail est absolument identique au détail du détail du détail, etc. 

[nota : les simulations de l'attracteur de Hénon montrent que la même allure autosimilaire se retrouve dans la partie "en pointe" de la figure, avec d'ailleurs la même disposition des bandes que dans la partie centrale. Ces deux parties ne se différencient donc que par le rayon de courbure, qui est modéré dans la partie centrale, et très brusque dans la pointe]
 

La forme est un aspect de cette figure. 
Il est un autre aspect que l'on ne voit pas lorsque la figure est terminée, mais que l'on voit lorsqu'on la calcule et que l'on suit des yeux les positions successives d'un même point : le point ne se déplace pas d'une façon qui paraît régulière et logique, mais circule selon un rythme irrégulier impossible à prévoir. Par exemple à certains moments il s'attarde longtemps dans un coin de la figure, puis soudain file dans un coin très éloigné où il restera peut-être peu de temps, ou peut-être au contraire très longtemps avant de repartir ailleurs, et cela toujours comme au hasard. 

On a expliqué plus haut à quoi ce déplacement chaotique du point est dû : la dimension de continuité dans le temps s'est effacée au profit de la dimension de continuité autosimilaire car le dessin ne possède pas assez de dimensions pour représenter en même temps ces deux continuités.



 
 
Maintenant tout semble clair : on a dit qu'une dimension d'autosimilarité avait dû naître brusquement et chasser la dimension du temps, car il n'y a pas de place sur le graphique pour les deux à la fois. On a bien trouvé sur le graphique que la continuité du temps est brisée et qu'elle est remplacée par une figure dotée d'un autre type de continuité, la continuité de l'autosimilarité à toutes les échelles. 

Pourtant, il reste encore un mystère. 


Le mystère est que la figure autosimilaire que forme un attracteur étrange n'est pas une courbe, mais une surface.
Si l'attracteur de Hénon par exemple ressemble à une courbe, il n'en est pas une, car si chaque courbe y apparaît en la grossissant comme elle-même formée de multiples courbes décalées entre elles, cela veut dire que le blanc que l'on voit à une échelle donnée au voisinage d'une courbe, n'est pas réellement "vide" de courbe.
Il ne nous apparaît tel, que parce que les courbes des échelles inférieures sont trop "fines" pour notre échelle de lecture et qu'on ne les voit pas. Les apparentes courbes des attracteurs étranges sont donc en fait des bandes semées de points sur toute leur surface et sans limite franche en largeur.
Ces bandes contiennent elles-mêmes des bandes où la densité des points y est nettement plus forte que dans ses autres zones. C'est cela qui donne l'impression quand on force le contraste et élimine les zones à plus faible densité, qu'il s'agit de traits continus entre des plages blanches.
 
 
  
Il existe des attracteurs qui ne se présentent d'ailleurs pas du tout sous cette allure de bandes. Ainsi le graphique de "l'application logistique" dont nous donnons dans le dessin ci-contre plusieurs échelles d'agrandissement : les zones de points s'y regroupent seulement très vaguement, et l'on peut seulement appeler "ombrages" ces zones de plus forte densité qui n'ont aucunement l'allure de courbes. 
 
[source de l'image : James P. Crutchfield / Nancy Sterngold] 
 
 

Les points des attracteurs étranges se répartissent donc sur des surfaces de densités variées, et non sur des courbes.
C'est le mystère qui reste à éclaircir car cela ne va pas de soi.
On aurait pu s'attendre à ce que la continuité dans la dimension d'autosimilarité soit représentée par une courbe autosimilaire continue, de la même façon que la continuité d'un trajet dans le temps est représentée par une courbe continue.
Car des courbes continues autosimilaires cela existe : tous les trajets fractals que l'on a étudiés en sont des exemples.
Un attracteur étrange pourrait s'apparenter par exemple à la courbe que dessine un flocon de Von Kock [revoir Ecette courbe] plutôt que de s'apparenter à la "courbe-surface" de Peano [revoirE cette courbe-surface].
 

Qu'un point y fasse des sauts discontinus dans le temps est une chose,
mais pourquoi saute-t-il d'un point à l'autre d'une surface plutôt que d'un point à l'autre d'une courbe ?
 
 
 


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