5 août 2009 : nous
appareillons
de Carteret. Pas de vent. Notre voisin de ponton, depuis le cockpit de
son bateau à moteur, plaisante sur le manque de vent et notre départ.
Nous répondons que nous avons assez d'essence pour aller à Granville au
moteur. On marche effectivement au moteur pendant quelques heures puis le vent se lève progressivement. Nous nous retrouvons avec un force 3 par le travers tribord donc de secteur ouest. C'est le temps préféré de l'Eolia qui allonge la foulée. On entend le chuintement de l'eau le long de la carène : derrière nous le sillage se dessine nettement sur une mer encore plate. Random est au mieux de sa forme après un hivernage à terre où sa dérive a été regalvanisée. |
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Brève escale à
Granville pour un
changement d'équipage et l'achat de 9 euros d'essence ! La jeune fille
à côté des pompes à carburant n'est pas une touriste, c'est elle qui
sert. Elle me propose même de porter mon bidon. 6 août 2009 : départ de Granville cap à l'ouest. Le temps n'est pas engageant et la visibilité médiocre. Pas de brume finalement, ce sont des grains et l'horizon réapparait bientôt. Nous avons pris un ris et le bateau marche bien. Un voilier d'une dizaine de mètres nous suit de loin mais il descend sous le vent ; sa destination n'est pas Saint-Malo et il disparait dans les rochers, empruntant un passage à terre à l'ouest du phare du Herpin pour rejoindre Cancale. La pluie commence à tomber, nous enfilons pantalons et vestes de quart mais négligeons d'enfiler les bottes : erreur, nous arriverons les pieds trempés. La mer se forme un peu mais nous n'embarquons pas d'eau. Nous approchons de marée basse, la visibilité n'est pas au mieux et nous hésitons à emprunter le chenal de la Bigne, pour nous la route directe vers Saint-Malo. Nous continuons donc tout droit et passons à raser l'île de Cézembre que nous laissons au sud. Le vent a bien molli, le ris a été largué, nous aimerions garder assez de vitesse et ne pas nous laisser dépaler vers les rochers, nombreux par ici. Je prends un alignement sur un rocher et une maison dont la silhouette s'estompe au loin vers Dinard. Enfin nous voici dans le chenal de la Petite Porte où le paysage défile rapidement malgré notre faible vitesse. Finalement nous lançons le moteur une fois en vue du port des Bas Sablons et nous poursuivons vers l'écluse du barrage de La Rance. |
Arrivés vers marée
basse et trop
tôt pour sasser, nous essayons de déchiffrer aux jumelles l'heure
d'ouverture des portes. La pluie redouble et nous ouvrons un parapluie
au dessus de la descente pour laisser un peu d'air entrer dans la
cabine. Des vedettes et des voiliers arrivent petit à petit du côté mer
et nous nous retrouvons à toute une "meute" essayant de passer avec ce
premier sassement de fin de journée. Une fois les sortants
(prioritaires) passés, nous nous approchons. Nous choisissons l'option
"extérieure" pour garder de l'eau à courir, le fardage de l'Eolia et le
manque d'efficacité du hors bord en marche arrière nous incitant à la
prudence avec un vent portant vers l'écluse. Nous finissons par nous
amarrer sans encombre aux pendilles, parmi les derniers voiliers dans
le tumulte des moteurs, des cris et des instructions de l'éclusier
émises par des haut-parleurs. Bref, une ambiance qui mérite un détour.
Certains n'ont pas préparé à l'avance
leurs amarres et le pêche promenade derrière n'en a aucune ; nous
sortons donc des bouts supplémentaires du coffre. Nous passons un long
moment dans le sas, nous sommes les seuls à porter
une brassière de sauvetage ! Une fois sortis, le vent a molli et, ayant hâte d'arriver, nous faisons route au moteur, bord à bord avec un autre Eolia moins pressé que nous semons progressivement. Devant Plouer-sur-Rance nous prenons un corps mort et , à peine amarrés, nous voyons les feux du port passer au vert et l'Eolia de tout à l'heure arriver juste à temps. Les connaissances des pratiques des lieux ! |
Le lendemain nous
mettons à
sécher nos vêtements de mer et le reste de l'équipage nous rejoint.
Nous sommes désormais six à bord dont un bébé de six mois. On a
toujours eu un côté "boat people" et nous avons souvent senti des
regards étonnés quand l'équipage sortait un par un de la cabine. C'est
l'un des atouts de l'Eolia, il y a beaucoup de place en bas. En haut
c'est moins généreux. Par temps
de brise au près, on tient à quatre dans le cockpit, le dernier assis
sur le bridge deck d'où l'on a une vue imprenable vers l'étrave. Le jour suivant nous appareillons pour Dinan encore une fois au moteur à cause des méandres de la Rance et des bancs de vase à éviter. Nous profitons de la tranquillité d'esprit retrouvée après l'intervention du chantier sur le circuit de refroidissement. La pissette crache un jet d'eau vigoureux : tout va bien. Le passage de l'écluse du Chatelier est une simple formalité effectuée dans le calme et sous le regard d'une éclusière souriante. |
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A l'heure
du déjeuner nous
avons envie de nous amarrer au quai de Taden. Le vent porte vers la
rive, nos approchons prudemment, surveillant les fonds. Le bateau
s'arrête à un mètre du quai ce qui est étonnant car il y a en principe
assez de fond pour nos 80 cm de tirant d'eau. Nous parvenons
finalement à nous amarrer pour découvrir la raison de notre arrêt
prématuré : la mâture se perd parmi les branches d'un arbre planté au
bord du chemin de halage. Regarder en l'air est un réflexe que nous
n'avons pas encore acquis. |
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Comme à Plouer la
ville de Dinan
se mérite : il faut gravir une pente pour accéder au
centre-ville. A la recherche de pain le dimanche matin, je
tente
l'expérience pour, une fois revenu en bas, découvrir que ce que prenais
pour une boutique de souvenirs est en fait une boulangerie. La ville et
le port sont très animés dans la journée. Le bord de l'eau résonne du
bruit des moteurs hors-bord des barques de location. De plus il fait
très chaud à bord et nous sommes plus à l'aise à nous promener sur les
berges de la rive est ou dans les ruelles de la ville haute. Le soir le
calme revient et le port de nouveau est à nous. Il faut juste se
souvenir des horaires d'ouverture du bureau du port et par conséquent
des toilettes. Nous appareillons en fin d'après-midi vers l'aval. Les rives verdoyantes défilent, nous nous faisons dépasser par deux kayaks qui pagayent nonchalamment. Nous espérons qu'une fois hors de vue ils n'entendront plus notre moteur troubler le silence de la rivière. |
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L'arrivée au port
de Lyvet se
fait sans formalisme : on prend une place libre en bout de ponton, on
se présente au bureau du port et on apprend qu'on est à la bonne place.
Le lieu est un peu mort le soir, on en profite donc pour se coucher tôt
car le lendemain on débarque bébé à Plouer et on file sur les Bas
Sablons, avec horaires imposés par les écluses du Chatelier et de la
Rance. Le lendemain matin, faute d'avoir regardé attentivement les horaires nous guettons l'ouverture de la porte amont ou l'apparition de mâts dans le sas. Nous nous pensions seuls et nous nous retrouvons dans une écluse bien remplie : "les horaires, stupide" aurait pu dire Bill Clinton. Le calme ambiant nous incite à sortir nos appareils photos. Ce sont toujours les moments intéressants qui manquent à notre album photo : les grains ou l'écluse de la Rance aux heures de pointe par exemple. Nous bavardons avec nos voisins qui viennent de l'océan Atlantique par les canaux bretons : presque une semaine de voyage. |
Arrivés comme d'habitude avant l'heure nous prenons un corps mort devant l'écluse du barrage de la Rance. La prochaine ouverture est annoncée si la hauteur d'eau le permet, sinon ce sera à la suivante. Les portes s'ouvrent un peu plus tôt que prévu et nous larguons notre corps mort. Le vent a légèrement fraîchi et est traversier ; on vise donc le bajoyer au vent pour ne pas rester plaqués contre si le vent monte encore. Par comparaison avec notre passage à l'aller, nous sommes nettement moins nombreux. Pas de cris, chacun s'amarre prestement. Le niveau de l'eau est très bas et comme elle est claire nous voyons le radier proche sous la surface. Les spectateurs sont par contre presque à la hauteur de notre tête de mât. Nous sortons finalement, accueillis par la meute des entrants : c'est assez spectaculaire. Nous nous faufilons dans l'étroit passage laissé libre sur tribord, moteur presque plein gaz pour être plus manoeuvrants. Le courant de jusant est un véritable torrent qui secoue le cordon de flotteurs qui délimite la zone interdite près du barrage. | ![]() |
En définitive il y a assez d'eau pour rentrer au port des Bas Sablons. L'employé du
port nous demande notre tirant d'eau, nous fait croire qu'il n'y a plus
de place et nous indique un emplacement libre. Bébé et le reste de la
famille nous attendaient sur le ponton. Ils embarquent dînent avec nous
et passent la nuit à bord. Il a plu pendant la nuit et tout est trempé sur le pont. Bébé débarque définitivement avec poussette pliante, couffin, couches et autres objets encombrants et c'est l'appareillage. Nous empruntons cette fois le chenal de la Bigne pour rejoindre Granville et finalement Carteret. |