Le mystérieux assassinat de Suzanne Furimond






Un ami intime



De nouveau entendu, son neveu dit qu'il venait la voir très souvent (il se coupe). Il dormait même chez elle à l'occasion. Selon lui, il connaissait les fréquentations de sa tante, car il participait aux conversations du soir.

Léon Portale ignore si la disparue se livrait au trafic de pièces d'or. Au sujet de son enfant, Suzanne Furimond lui a dit un jour que le père était quelqu'un de sa parenté. Elle était très heureuse d'avoir cette enfant.

On voit que désormais la police va s'intéresser sérieusement à la piste crapuleuse en rapport avec le trafic de pièces d'or, florissant à cette époque, car les possesseurs de billets de 5 000 francs étaient désignés comme des profiteurs du marché noir (ils avaient été le plus souvent payés avec ces coupures), et cherchaient à toute force à se débarrasser de ces billets compromettant en achetant de l'or.

Le jeudi 24 mars, déclarations de Félix Jourdan, 48 ans, ingénieur électricien à Salon-de-Provence. Il a connu Suzanne Furimond en 1941, à Nimes, au mess des officiers du terrain d'aviation. Ils ont entretenu de bonnes relations jusqu'en 1943. Il allait souvent chez elle, à Avignon, au 40, rue Saint-Lazare. Elle était devenue son amie.

A l'époque, il travaillait pour les réseaux "Fer" et F2 de la Résistance. La disparue était au courant de son activité clandestine et lui rendait à ce sujet de grands services. Ses camions étaient souvent réquisitionnés pour la milice ou les Allemands. Il pouvait ainsi connaître la nature et la destination des transports et des travaux effectués. Elle lui avait dit être en rapport avec un certain Martin, milicien, chef du groupement des transports d'Avignon.

Il précise qu'il séjournait chez elle parfois deux à trois jours de suite, mais pas plus. Il a été arrêté en 1943, pour fait de résistance et détenu six mois. Après sa libération les relations avec Suzanne Florimond se sont beaucoup espacées. Ils se revoyaient encore quelquefois, mais il comprit qu'elle ne souhaitait plus avoir avec lui de rapports intimes. Il a totalement cessé d'aller la voir chez elle depuis au moins deux ans, soit en 1946. Il l'a revue pour la dernière fois le 1er octobre 1947. Elle était à bicyclette et elle ne lui a pas parlé. Il ne peut rien dire de ses relations. Il cite les noms de certaines amies de Suzanne Furimond, toutes d'Avignon. Il ignore si elle possédait des pièces d'or et si elle en faisait le trafic : entre eux, ils ne parlaient jamais affaires. Il connaissait certains membres de sa famille, en particulier son neveu, Jean Daude qu'il avait incité à s'engager dans l'armée du général de Gaule. Le neveu était en bons termes avec sa tante, et comme elle, assez renfermé.

Il ajoute que la disparue était très méfiante et très avare. A priori, elle n'aurait jamais laissé chez elle un sac contenant tant d'argent. A sa connaissance, elle ne buvait pas de pastis. Mais elle fumait beaucoup. Lui ne fume pas. Elle ne lui confiait jamais les clefs de sa maison. Il devait sonner et s'annoncer à chaque visite. Elle l'exigeait. Il a appris sa disparition par la presse.