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Les mots sont les substituts des choses et R. Jakobson, entre autres linguistes, souligne les difficultés posées par le signe linguistique puisque nous avons rarement l'occasion d'avoir une relation directe entre le mot et la chose. "Dans tous les cas nous substituons des signes à des signes".
Les mots sont en effet des légisignes : "un légisigne est une loi qui est un signe. Cette loi est d'ordinaire établie par les hommes. Tout signe conventionnel est un légisigne (mais non l'inverse)..." (Peirce, C.P. 2-246).
Dans les textes, nous avons des occurences (des sinsignes qui sont des répliques de légisignes). "Comme nous employons le terme" mot "dans la plupart des cas, quand nous disons "le", "le" est "un mot", que "un" est un autre "mot", un "mot" est un légisigne. Mais quand nous disons d'une page d'un livre qu'elle a deux cent cinquante mots, le "mot" est un sinsigne."(Peirce C.P.2-246)
Le mot est un sinsigne en contexte, dans toutes ses significations.
C'est toute la différence entre le mot qui est une entrée de dictionnaire et ses différents emplois répertoriés. En tant que type général, légisigne, le mot résulte d'une convention sociale dans une culture donnée. Son sens évolue, ce qui signifie que le consensus social autour du sens de chaque mot est remis en cause à chacune de ses utilisations. La signification acquise par le mot dans un nouveau contexte peut introduire un écart par rapport aux règles et aux habitus. Les écrivains et les poètes ont joué de cette pratique soit qu'ils visent des effets de sens nouveaux ou au contraire qu'ils entreprennent comme Francis Ponge un travail de resémantisation pour retrouver des sens originels. Dans l'un ou l'autre cas, le but est le même qui est de bouleverser, de casser des habitudes langagières. C'est bien parce que c'est un signe conventionnel que cette entreprise est possible et c'est parce que c'est "un représentant" qu'on peut le détourner du sens d'usage pour lui faire désigner un nouvel objet. C'est ainsi qu'il faut comprendre et apprécier ce que nous disent des écrivains comme Sartre, Colette, Marcel Pagnol lorsqu'ils racontent leur plaisir d'enfants aimant jouer avec les mots, savourant toutes les possibilités de les faire "parler" au gré de leur imagination.
Une exception à ce qui vient d'être dit : le nom propre car les constatations ci-dessus présupposent que les mots sont des signes "immotivés", c'est-à-dire qu'il n'existe pas de relations réelles entre le mot-signe et son objet : c'est ce que Saussure appelle "l'arbitraire du signe", qui peut cependant être contesté dans certains cas (celui des onomatopés et des verbes crés à partir de là).
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