Le pronom n'est pas défini comme un substitut du nom et on peut donc d'emblée remarquer que C.S. Peirce ouvre des perspectives radicalement différentes sur les rapports qu'entretiennent noms et pronoms (C.P. 2-287). Les pronoms sont classés suivant ce qu'ils font : ils dirigent l'attention sur l'objet, de façon contraignante, sans laisser de choix à l'interprète. Le nom, quant à lui, s'il désigne une classe en dirigeant l'attention sur celle-ci laisse la liberté du choix quant au représentant de cette classe, un individu ou une chose singulière.
C'est dans ce sens qu'il faut comprendre "une chaise est une chaise quelconque"; l'interprète a le loisir d'imaginer n'importe laquelle, alors que "celle-ci" désigne cette chaise en liaison directe avec l'auditeur (dans la situation réelle) ou avec le lecteur (dans le texte; on parle dans ce cas de la fonction anaphorique de "celle-ci").
Peirce envisage deux catégories de pronoms, c'est-à-dire "de ces prescriptions indexicales de ce qu'il faut faire pour trouver l'objet signifié". Il y a ceux qui "dirigent l'attention sur...", il faut suivre cette sorte de "doigt pointé" vers l'objet : ce sont les démonstratifs, les possessifs, les relatifs (ceux-ci fonctionnant seulement comme anaphores). Il y a ceux qui "informent l'auditeur sur la manière dont il doit choisir un des objets visés", ils sont sélectifs ou quantificateurs. On peut distinguer les sélectifs universels (tout, aucun, n'importe quoi, n'importe qui, quiconque, personne) et les sélectifs particuliers (quelque, quelque chose, quelqu'un, un, un certain, un seul). Proches des pronoms ci-dessus sont des expressions comme: tous sauf un, un ou deux, quelques-uns, presque tous, un sur deux, etc..(C.P. 2-289).
Peirce fait remarquer l'inadéquation du qualificatif "indéfini" attribué traditionnellement à ces pronoms car "l'auditeur a la liberté de choisir le cas qui l'intéresse (seulement) dans les limites exprimées ou comprises" par le pronom.
Enfin, il est à noter que C.S. Peirce règle aussi le problème de "je" et "tu", c'est-à-dire des pronoms de première personne qui ne sont plus donnés comme des substituts de nom. "Je, tu, ceci, cela, ne sont pas mis pour des noms, ils indiquent des choses de la manière la plus directe possible".
Mais remarquons que la dénomination actuelle de je/tu : "noms personnels" n'est pas plus pertinente au regard de ce qui précède puisqu'elle entretient la confusion sur le fonctionnement sémiotique des noms et des pronoms.
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