L'homme de Cro-magnon s'intéressait-il aux astres? Probablement mais faute de preuves, l'histoire de l'astronomie ne commence réellement qu'avec les Sumériens. Dès 2800 av. J.-C., ils consignaient sur des tablettes d'argile des observations très précises de la voûte céleste dans laquelle ils lisaient leur destin. Cinq "étoiles" sillonnant le ciel nuit après nuit retinrent particulièrement leur attention. Cinq "étoiles qui ne se reposent jamais" comme disaient leurs voisins égyptiens. Deux mille ans plus tard, les Grecs parleront de "planêtês", terme qui signifie "vagabonds". Assimilés à des divinités, les planètes porteront le nom d'un dieu grec puis romain.
Les sciences antérieures (Égypte, Mésopotamie...) étaient essentiellement empiriques et pratiques. Il s'agissait principalement d'un ensemble de recettes, de procédés peu - ou pas - formalisés. Les essais d'explication (quand ils existent) font appel aux forces surnaturelles, aux Dieux. Le grand changement apporté par les physiciens grecs est leur tentative de rendre compte de l'ordonnance de l'univers d'une façon purement positive et rationnelle. Il ne faut pas s'attendre à trouver, dans la rationalité du Ve siècle av. J.-C. toutes les caractéristiques de notre rationalité actuelle. Le concept a bien évidemment une histoire, conditionnée par l'évolution de la science et de ses méthodes. Il s'agit d'ailleurs davantage d'une Philosophie de la Nature que d'une science au sens donné à cette notion depuis le XVIIe siècle. Les philosophes sont également parfois mathématiciens (Pythagore) ou médecins (Hippocrate), parfois encyclopédiques comme Aristote, dernier grand auteur de cette période et probablement le plus important pour l'histoire des sciences. Des présocratiques à Aristote, c'est le début d'une science qui ressemble beaucoup plus à ce que nous connaissons qui se met en place.
Succédant aux estimations antérieures d'Aristarque de Samos distances de la Terre au Soleil et à la Lune, dimensions du Soleil et de la Lune, Eratosthène, au IIIe siècle av. J.-C., conçoit une méthode de détermination de la circonférence terrestre qui dénote, outre un sens certain de l'observation, d'incontestables compétences en géométrie. Le résultat 252 000 stades égyptiens soit environ 40 000 km est excellent, surtout compte tenu des moyens de l'époque. L'Ecole d'Alexandrie marque ainsi le début de l'introduction de la mesure dans les sciences. L'astronomie était auparavant essentiellement descriptive. Même si Aristote évoquait, dans son traité Du ciel, la possibilité de mesures, il ne les avait pas réellement effectuées. De plus, déterminer les dimensions de corps célestes qui, dans le cas du Soleil et de la Lune, conservaient un caractère divin (même chez les Grecs), marque une avancée certaine vers davantage de rationalité, au sens où nous l'entendons aujourd'hui. Le pas décisif est probablement celui qui est accompli au XVIIe siècle par Galilée mais l'oeuvre d'Alexandrie constitue aussi, de ce point de vue, une étape capitale.
D'après Hérodote, il semble que les Grecs héritent des Babyloniens le gnomon et la division du jour en douze parts : qui dira ce que la numération sexagésimale de ces derniers doit à leur division de l'année en trois cent soixante jours ? Chaque angle ou segment de trente degrés divise le ciel en zones que la langue grecque nomme zôdion de zôon, animal, et odos, voie, c'est-à-dire figurine de bête ou de tout autre être vivant ; l'adjectif correspondant désigne l'orbite, la route, le chemin zodiacal.
L'aiguille du cadran solaire ou gnomon projette des ombres sur le sol ou le plan de lecture, selon les positions, au cours de l'année, des astres et du sol. Comme nul, en ces temps, n'avait vraiment besoin d'horloge et que les heures variaient beaucoup, puisque les jours d'été ou d'hiver, quelles que soient leur longueur ou leur brièveté, invariablement se divisaient en douze, le cadran solaire servait peu à dire l'heure, de sorte que la montre ne l'a pas du tout remplacé, mais, en tant qu'instrument de recherche scientifique, il montrait un modèle du monde, donnant la longueur de l'ombre à midi aux jours le plus long et le plus court et donc indiquant équinoxe, solstices et latitude du lieu, par exemple : plus observatoire, donc, qu'horloge. Les astronomes alexandrins disposent d'un modèle perfectionné, inventé à Babylone, où le bâton est remplacé par un globule placé au centre d'une surface hémisphérique. Les systèmes de mesure du temps utilisent aussi l'horloge à eau, dont la précision était de l'ordre d'une demi-heure par jour.
Le calcul des latitudes d'après l'ombre du Soleil aux solstices et aux équinoxes, première liaison mathématique entre l'astronomie et la géographie, donne lieu à l'établissement, par Hipparque puis Ptolémée, de ce que l'Antiquité appelle des tables de cordes : longues listes des rapports entre la mesure des côtés de triangles rectangles et celle de leurs angles, où on peut lire la naissante trigonométrie.
Pour donner une idée plus exacte des performances que les Grecs tiraient du gnomon, voici comment calcule Ératosthène (276-195 av. J.-C.). Il en pose un à Syène en Égypte non loin de la première cataracte du Nil, ville située sur le tropique du Cancer. En ce lieu, il n'y a pas d'ombre à midi le jour du solstice d'été. Le même jour à la même heure, Ératosthène mesure l'angle que fait le Soleil avec un second gnomon posé dans la ville d'Alexandrie qu'il pensait située sur le même méridien. Les deux angles alternes-internes sur la figure sont égaux, or celui qu'il a mesuré vaut la cinquantième partie d'un cercle, il suffit donc de multiplier par cinquante la distance d'Alexandrie à Syène pour obtenir la longueur entière du méridien terrestre. Résultat grandiose obtenu avec des moyens minimaux. Pour améliorer la mesure, Ératosthène estime l'ombre du gnomon non point projetée sur un plan, mais sur une sphère.
Pour les mesures d'angle, il n'y a évidemment pas de système optique, et les visées se font à l'alidade, simple règle (de l'arabe alidada) angulaire que le Grec Hipparque (IIe siècle av. J.C.) munira d'un système de visée dit à pinnules (du latin pinnula "petite aile"). Ce sont deux plaques de cuivre fixées perpendiculairement, par des charnières, aux extrémités de l'alidade, et percées d'orifices étroits : petit trou, fente étroite sans fil, fente avec fil médian (dioptre).
On place l'alidade sur une table ou une planchette.
Un repérage consiste à mettre en coïncidence deux orifices
avec un point visé au loin. On vise ensuite un second point. Passant
ainsi d'une visée à l'autre, on mesure et on marque sur la table
l'angle que font les deux directions choisies, que l'on peut mesurer ensuite
au rapporteur.
D'ordinaire, l'alidade est employée comme composante des appareils de géodésie. Dans la plupart des cas, l'alidade est montée de façon à pivoter au centre d'un cercle gradué, comme sur le graphomètre ou l'astrolabe. On attribue à Thalès de Milet (640-548 avant J.C.) les débuts de la géodésie ; il aurait rapporté d'Egypte les fondements de la géométrie. Hipparque (IIe siècle avant J.C.) se servait des pinnules (ou dioptres) et de l'astrolabe dont on lui attribue l'invention.
Deux alidades articulées constituent
un compas. Muni d'un arc de cercle gradué, ce compas devient un instrument
de mesure en forme de secteur, d'autant plus précis qu'il est plus
grand.
Le triquetrum ou trigomètre est composé de 3 règles articulées. Il est essentiellement un instrument d'arpentage utilisé par Ptolémée.
Dioptre d'Archimède (viseur fixe et cylindre mobile) dont le nom arabe est l'alidade. Cet instrument de visée, sans lentilles de verre, alors inconnues, est employé pour les mesures à distance (arpentage, astronomie). Inventé par Archimède (IIIe s. av. J.-C.), le dioptre se compose dune règle, armée de deux pinnules, qui pivote dans le plan dun cercle gradué. Sur larmille, lastrolabe ou le quadrant, elle permet dévaluer la distance angulaire dun astre à lhorizon, ou celle de deux astres. Hipparque (IIe s. av. J.-C.) mesure le diamètre apparent du Soleil ou de la Lune avec un dioptre perfectionné.
Dioptre d'Hipparque : tige de « 4 coudées de longueur » munie d'un viseur fixe à 1 fente, curseur mobile à 2 petits trous superposés permettant de mesurer le diamètre apparent d'un astre (soleil ou lune).
Enfin,
la sphère armillaire est un assemblage de plusieurs cercles gradués,
mobiles et munis d'alidades à pinnules, utilisée pour les observations
astronomiques. Elle atteint, avec Hipparque, 2 à 3 m de diamètre.
Elle est constituée de cinq cercles de métal.
Ces
différents cercles représentent :
L'observateur peut ainsi représenter le mouvement apparent du ciel selon toutes les latitudes. Ptolémée utilisera de plus grandes sphères pour faire des mesures.
Hipparque conçoit également
l'astolabe, qui est une représentation plane de la sphère armillaire. Ptolémée
l'étudiera 3 siècles plus tard. Il est construit pour une latitude donnée
et permet de repérer la position des astres.
Il est constitué :
L'astronomie grecque est par la suite transmise aux Syriens, aux Hindous et aux Arabes, à la suite des conquêtes d'Alexandre le Grand.
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