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Les vertiges

Le vertige est un symptôme qui peut se manifester dans un très grand nombre d’états morbides ; c’est une sensation qui fait croire au sujet, qui a conservé toute sa conscience, que les objets tournent autour de lui, ou que c’est lui qui tourne ; dans le vertige vrai, il n’y a pas de chute, car le sujet prend immédiatement un point d’appui. Il y a, en effet, des accidents, parfois qualifiés de vertiges, qu’il ne faut pas confondre, tels les éblouissements, avec perte momentanée de la vision, les malaises avec légère absence cérébrale ou les sensations qui précèdent parfois la chute dans la crise d’épilepsie.

L’organe chargé d’assurer l’équilibre, le labyrinthe avec ses canaux semi-circulaires, se trouve profondément dans le crâne, au niveau de l’oreille interne, et tout vertige est conditionné par un trouble des fonctions de cet appareil ultrasensible.

Un vertige peut donc reconnaître comme cause, soit une maladie du labyrinthe, soit un trouble apporté dans son fonctionnement, par voie nerveuse, directe ou réflexe ou encore par voie sanguine.

Le premier soin, chez un malade se plaignant de vertiges doit être d’examiner l’oreille, toutes les parties de l’appareil auditif pouvant réagir sur le labyrinthe ; un simple bouchon de cérumen, une injection poussée trop fort dans le conduit auditif, un massage du tympan un peu violent, peuvent déterminer un vertige en modifiant la pression dans l’oreille moyenne ; une otite moyenne suppurée ou non, une obstruction de la trompe d’Eustache, agissent dans le même sens, à plus forte raison, une maladie de l’oreille interne ; dans tous ces cas, on observe une surdité plus ou moins accusée et souvent des bourdonnements.

Parmi les affections du labyrinthe, la plus grave est ce qu’on appelle le vertige de Ménière, survenant brusquement, avec vertige intense, surdité complète et bourdonnements ; il peut être dû à une hémorragie foudroyante intra-labyrinthique, ou à une inflammation chronique, souvent de nature syphilitique.

Si donc l’examen superficiel de l’oreille (examen du conduit, recherche de la surdité) ne donne pas d’explication, il faudra recourir au spécialiste pour faire pratiquer les diverses épreuves fonctionnelles du labyrinthe.

Cet organe peut être affecté par voie nerveuse directe, c’est-à-dire par les nerfs qui émanent du cerveau, qu’ils soient atteints ou comprimés par une plaque de méningite ou par une tumeur. En pareil cas, il y a généralement des signes surajoutés comme des paralysies locales et des vomissements.

Le moindre trouble de l’irrigation sanguine du labyrinthe occasionne également des vertiges, par anémie, chez les hypotendus, dans l’insuffisance aortique, par spasme, chez des artério-scléreux, des urémiques, des diabétiques, par congestion, chez des hypertendus, dans l’insuffisance mitrale ; lorsqu’on soupçonne une de ces causes, il faut donc ausculter soigneusement le cœur, prendre la tension et pratiquer un examen du sang.

L’appareil sensoriel qui règle l’équilibre peut être affecté, par voie réflexe à la suite de troubles survenant dans des organes fort éloignés ; le cas le plus fréquent est ce qu’on appelle le vertige stomacal ; mais l’estomac est loin d’être le seul organe responsable ; l’intestin, le foie, la vésicule biliaire, peuvent donner lieu à ce retentissement ; il s’agit souvent d’affections légères : dyspepsies, ptôses abdominales, aérophagie, colites, appendicite chronique, cholécystite ou lithiase biliaire, parfois simple constipation.

Évidemment, il y a une cause, une susceptibilité particulière, dont la nature nous échappe, qui fait que certains sujets présentent des vertiges au cours d’affections des voies digestives, alors que d’autres n’en présentent pas. Tout comme il est des personnes sujettes au mal de mer et d’autres qui ne le sont pas.

Enfin, le vertige peut être dû à une cause toxique, provenant de l’organisme lui-même, comme ce peut être le cas chez les goutteux, les diabétiques, les urémiques, ou qu’elle soit d’origine étrangère. L’alcoolisme en est la plus fréquente et n’est que l’exagération de la titubation bien connue de l’ébriété; d’autres toxiques peuvent agir de la même façon comme l’oxyde de carbone, les champignons vénéneux et certains médicaments comme la quinine, le salicylate.

Certes, au seul aspect du malade et d’après l’interrogatoire, un médecin expérimenté éliminera d’emblée le plus grand nombre de ces causes ; n’empêche que, pour prescrire un traitement logique, il lui faut, tout au moins, examiner l’oreille, ausculter le cœur, prendre la tension, palper l’abdomen avant de rédiger son ordonnance.

Dr A. GOTTSCHALK.

Le Chasseur Français N°596 Février 1940 Page 120