La suspension des véhicules automobiles a toujours été
l’objet de recherches, d’essais et de mises au point, très poussés de la part
des constructeurs. Plusieurs facteurs sont influencés directement par cet
organe. Il y a tout d’abord la tenue de route qui varie suivant la souplesse ou
la rigidité de la suspension, d’une part, et la position du centre de gravité
du véhicule, d’autre part. Enfin, il s’agit de rechercher pour les usagers le
maximum de confort en regard de la vitesse normale de la voiture. Une
automobile « très vite » exigera une suspension dure, alors qu’un
châssis de ville pourra se permettre une souplesse de ressorts plus grande.
L’habileté des fabricants de modèles de série « à tout faire » pourra
s’employer à fond, afin d’établir des types acceptables dans tous les cas extrêmes.
Les ressorts de suspension, utilisés dans la construction
automobile d’hier et d’aujourd’hui, ont pris les formes les plus diverses. Nous
avons connu les ressorts à boudin, à lames, à barre de torsion, etc. Leur montage
a été, de son côté, établi suivant des dessins particuliers ; ainsi, pour
le ressort à lames, nous connaissons le ressort droit entier, le demi-ressort,
le cantilever, la crosse, etc. Le montage sur le châssis peut varier. Par
exemple, le ressort entier peut être monté dans le sens de la longueur du
châssis. Dans ce cas, il y a un ressort par roue. Ou encore transversalement
(Ford, Renault, etc. ) : il y a alors un ressort par paire de roues.
De nos jours, le ressort à lames a su garder la faveur des techniciens.
Pourtant, depuis quelques années, nous avons pu voir grandir le nombre des
partisans de la barre de torsion : Citroën, Amilcar, Salmson, etc.
Le ressort à lames se compose, comme chacun le sait, d’un
certain nombre de lames d’acier. Il y a la lame maîtresse dont le rôle est
d’assurer, outre la suspension, la liaison du châssis à l’essieu. Puis les
lames secondaires, dont l’épaisseur et la longueur, et par suite l’efficacité,
diminuent à mesure que l’on s’éloigne de la lame maîtresse. Sous l’effet de la
charge et des dénivellations de la route, l’ensemble du ressort voit sa flèche
en perpétuel mouvement. Comme les flèches de chacune des lames sont
différentes, il en résulte un frottement continuel des lames les unes sur les
autres. Ce fait nous amène à tirer deux conclusions. La première est qu’il est
nécessaire de graisser et d’entretenir les lames des ressorts, si l’on veut
être à l’abri de toute surprise, tel que rupture, durcissement de la
suspension, etc. La seconde est qu’avec la présence de lames multiples, il se
produit entre celles-ci un frottement très énergique, les unes sur les autres,
entraînant, de ce fait, un auto-freinage des oscillations du ressort. Certes,
il serait téméraire de prétendre que l’on supprime le fameux « coup de
raquette », ou réaction violente du ressort faisant suite à un
affaissement de celui-ci ; ce rôle est, comme nous le verrons plus loin,
dévolu aux amortisseurs.
Pratiquement, l’entretien du ressort à lames se limite à une
visite tous les 10.000 kilomètres. On soulèvera le châssis en agissant avec le
cric sur les longerons, afin de débander le ressort. Le pulvérisateur garni
d’huile ou d’un mélange pétrole-huile, permettra d’injecter le lubrifiant entre
les lames.
La gaine de cuir ou de métal ne connaît plus la grande
faveur auprès du public. Elle avait pourtant de sérieux avantages.
La disposition classique des quatre ressorts entiers donne
une grande rigidité à l’ensemble châssis et essieux. La tenue de route y est
excellente. Pourtant il est bon de noter que le cantilever, ou demi-ressort
renversé, qui trouve son emploi le plus souvent au droit des roues arrière, a
de très grandes qualités. De nombreux constructeurs lui sont restés fidèles.
La barre de torsion connaît de son côté une belle faveur.
Ici, c’est une barre en acier spécial à haute élasticité qui travaille, non
plus à la flexion, mais à la torsion. Une extrémité de cette barre est clavetée
sur l’essieu ou le demi-essieu, suivant que l’on se trouve, ou non, en présence
de roues indépendantes ; l’autre extrémité est solidaire du châssis.
La barre de torsion a pour elle de grands avantages. Elle
est simple, peu coûteuse, d’un entretien nul. Elle permet de réaliser des
châssis surbaissés d’une sobriété de lignes remarquable : encombrement
d’une barre et d’un ressort à lames étant nullement comparable. Une simple vis
permettra souvent de régler plus ou moins la hauteur de coque ou de la
carrosserie au-dessus du sol.
Pourtant la barre de torsion a donné pas mal de déboires. Il
a fallu tout d’abord se pencher sérieusement sur la question des aciers à
employer. La qualité de ceux-ci, leur composition, leur traitement thermique
ont fait l’objet de quantité d’essais, tant au laboratoire que sur la route.
Puis l’on s’est trouvé devant un ressort qui marquait sans retard la moindre
réaction des roues. Ici, plus de frottement des lames les unes sur les autres.
La barre de torsion enregistre et restitue les moindres chocs. Il a fallu aussi
se pencher sérieusement sur les amortisseurs, ceux-ci venant soulager celle-là.
La barre de torsion s’est toujours très bien comportée avec les amortisseurs à
friction, ceux-ci entrant en action dès la moindre torsion de la barre. Les
amortisseurs hydrauliques, dont les qualités propres sont bien connues, ont
demandé dans leur réalisation des soins attentifs et même redoublés, afin de
faire disparaître la course morte inhérente à tout jeu dans leur mécanisme.
Nous avons vu que, suivant l’état de la route et la vitesse,
il y a intérêt à posséder des ressorts plus ou moins énergiques. Cet aspect de
la question a poussé certains constructeurs à réaliser des amortisseurs à
réglage variable au tableau. On serre plus ou moins un bouton moleté pour agir
sur le serrage des disques dans le cas des amortisseurs à friction, ou sur le
diamètre du trou de débit d’huile dans le cas d’amortisseurs hydrauliques.
C’est là une solution très heureuse. Pourtant sa réalisation se heurte aux
difficultés d’obtenir un équilibre parfait dans l’amortissement des roues du
même train.
L’entretien des amortisseurs est assez limité. Avec des
hydrauliques, on s’assurera que le niveau d’huile est suffisant. Une visite
tous les 10.000 kilomètres sera suffisante. Un trou ou un graisseur de
remplissage est prévu pour assurer le plein. On a adjoint aux amortisseurs à
huile un système à thermostat, qui agit sur le diamètre du trou de
communication des chambres à huile. Plus la température de l’huile s’élève, et
plus la surface de ce trou diminue. On reste ainsi dans les mêmes conditions,
quelles que soient la température de l’air ambiant et la durée de fonctionnement
des amortisseurs. Le réglage de ce genre d’appareil consiste à trouver un
diamètre de trou assurant la suspension désirée. Certains amortisseurs
hydrauliques sont du système télescopique. Ils ne sont pas réglables. En cas
d’usure, une révision complète et sérieuse doit être effectuée.
L’amortisseur à friction se règle, en serrant plus ou moins
les unes sur les autres les rondelles de frictions plates ou coniques, suivant
le cas. On agit pour cela sur un écrou de réglage. Ces rondelles sont le plus
souvent en amiante tressé avec du fil de cuivre et comprimé ou en bois spécial.
L’usure est combattue ici, en échangeant ces rondelles dès que leur efficacité
diminue.
Un bon réglage des quatre amortisseurs sur un châssis doit
tendre à assurer un équilibrage parfait dans le degré d’action de ceux-ci. Sans
appareil spécial, il est assez difficile d’arriver à une telle mise au point.
Pratiquement, on pourra accepter le moyen de fortune suivant. Vous exercerez le
même effort violent sur le châssis et au-dessus de chaque ressort. Vous vous
assurerez que, sous l’effet de cette charge, les ressorts s’affaissent de la
même quantité et gardent leur flèche, grâce à l’action des amortisseurs.
Des amortisseurs bien réglés assurent un confort parfait aux
usagers, tout en préservant l’usure prématurée des pneumatiques, cardans,
châssis et carrosserie.
G. AVANDO,
Ingénieur E. T. P.
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