Accueil  > Années 1940 et 1941  > N°600 Juin 1940  > Page 337 Tous droits réservés

Calendrier pour juin.
La pêche dans la zone des armées.
Quand peut-on maintenant pêcher ?
L’appétit de la truite.

Calendrier pour juin.

Voici les grands jours, le soleil, la chaleur et aussi l’ouverture : mot magique qui fait battre plus vite le cœur du pêcheur même le plus insensible en apparence.

Les ablettes mordent bien à l’asticot et à la mouche de maison.

Les goujons prennent bien le petit ver rouge et le caset.

On pêche le barbeau à la pelote d’asticots, au gruyère, à la grosse noquette.

La carpe a un faible pour le morcelet de pomme de terre cuite et pour la fève de marais.

La brème mord fort bien au blé cuit et à l’asticot.

Les chevennes n’ont pas de place fixe ; là où ils abondent, ils sont partout. Ceux de taille moyenne préfèrent les insectes vivants et les larves dodues. Les gros se pèchent au vif, à la noquette, et surtout à la cerise pour laquelle ils délaissent les autres esches.

Le gardon mord bien au blé cuit, à l’asticot, au caset ; mais il est encore plus avide de la graine de chènevis bouillie, ou même simplement détrempée et germée.

Le rotengle chasse plus souvent en surface que le gardon ; il aime les mouches, les araignées, les petites sauterelles, l’asticot et mord aussi à la mouche artificielle.

C’est avec cet appât qu’on pêchera aussi la vandoise, dans les courants d’allure moyenne où elle aime se tenir. Sa touche est rapide, fugitive et rappelle beaucoup celle de l’ombre commun. On peut dire que le pêcheur à la mouche qui manque peu de vandoises ne ratera guère non plus les truites ; pêcher ainsi la vandoise est donc un exercice à recommander pour se faire la main.

La perche se prend au ver rouge, à l’asticot, au cherfaix, à la petite bête.

Le brochet préfère à tout les poissons vivants ; mais il ne dédaignera nullement un poisson mort ou un leurre artificiel manœuvrés habilement et passant assez près de lui.

La truite mord aux insectes vivants, et notamment au grillon ; on la capture également à la mouche artificielle, flottante ou noyée.

L’ombre ne prend que les petites mouches et son toucher est très délicat.

L’anguille ne se capture, à la ligne et pendant le jour, que si les eaux ne sont pas bien claires ; la nuit, elle s’accrochera plus volontiers aux gros hameçons des cordées de fond.

R. PORTIER.

La pêche dans la zone des armées.

— Pour l’armée et les services rattachés, la pêche comme la chasse est absolument interdite dans la zone des armées. Le « Service en Campagne », qui régit tous ces personnels, dans son article 306, interdit la pêche dans la zone des armées aux militaires de tout grade et aux personnes n’appartenant pas effectivement à l’armée, mais qui sont employées dans un service militaire (infirmiers, infirmières, téléphonistes, secrétaires).

Mais, nous apprenons que le Ministre de la Guerre, à la suite des démarches faites, aurait envoyé dernièrement des instructions aux chefs de corps leur prescrivant d’autoriser la pêche aux militaires de la zone des armées, dans toute la mesure compatible avec les besoins du service et les considérations de la stratégie.

Quant à la population civile, ce sont les arrêtés préfectoraux qui, pour elle, continuent à réglementer la pêche. À noter cependant que le commandement peut interdire à la population civile l’exercice de la pêche à tout moment dans certains secteurs, suivant les nécessités militaires.

Quand peut-on maintenant pêcher ?

— Dans notre numéro de janvier, nous avons donné les nouvelles tailles réglementaires pour le poisson pêché. Voici les dispositions qui sont dorénavant applicables en ce qui concerne le temps où la pêche peut se pratiquer :

Périodes d’interdiction de la pêche.

— D’après la réglementation nouvelle, les cours d’eau sont divisés en deux catégories : la première, qui comprend ceux qui sont principalement peuplés de truites, et la deuxième, tous les autres cours d’eau.

Dans la première catégorie, la pêche est interdite 100 jours pris entre le 1er octobre et le 15 mars.

Dans la deuxième catégorie, la pêche est interdite 60 jours pris entre le 1er février et le 13 juillet.

Ce sont les préfets qui, dans chaque département, fixent les dates exactes d’interdiction dans les limites prévues.

Il existe également des périodes supplémentaires d’interdiction pour certaines espèces de poissons : brochet, 45 jours entre le 1er février et le 15 mai ; saumon, truite et omble-chevalier, du 1er octobre au 10 janvier ; esturgeon, du 1er juin au 31 juillet ; écrevisses, du 16 octobre au 13 juillet. Ce sont également les préfets qui fixent ces périodes.

Tant pour l’ouverture, fermeture, que périodes spéciales d’interdiction, il y a donc lieu de consulter les arrêtés préfectoraux qui doivent être affichés dans chaque mairie.

Heures pendant lesquelles la pêche est permise.

— L’ancienne législation autorisait la pêche du lever au coucher du soleil. C’est toujours Phébus qui sert à régler l’exercice quotidien de la pêche ; mais dorénavant la pêche peut se pratiquer une demi-heure avant le lever du soleil et une demi-heure après son coucher. L’heure officielle du lever et du coucher du soleil sert donc toujours à fixer le temps pendant lequel il est permis de pêcher et il est utile de la connaître, par conséquent.

Il faut ajouter que les préfets peuvent, par arrêté, apporter certaines dérogations à ces limites pour certaines pêches. De ce côté, il est donc nécessaire également de consulter les arrêtés préfectoraux dans chaque département.

L’appétit de la truite.

— Sait-on ce qu’une truite mange chaque jour, au moins théoriquement, car il doit lui arriver de jeûner quelquefois !

Il en est qui sont persuadés que ce poisson peut dévorer, chaque jour, trois à cinq fois son propre poids ; et si l’on croit au cannibalisme normal érigé en loi, on suppute les ravages qu’un seul de ces gros poissons doit exercer autour de lui parmi ses congénères.

Évidemment, cette théorie est fausse, encore que l’on ignore, non pas « ce que » mange une truite, mais « combien » elle mange.

Il est établi que, en truiticulture, il faut 8 à 10 kilogrammes de nourriture à une truite pour qu’elle augmente de un kilo. Calculez : un poisson qui augmente de 100 grammes, doit donc manger un kilo ; celui qui a augmenté de 500 grammes a donc mangé 5 kilos. Mais c’est en 365 jours. Par jour, cela nous donne 15 grammes ; cette moyenne est évidemment théorique. Chez les poissons, comme chez les humains, les jours se suivent et ne se ressemblent pas : les lendemains de liesse sont généralement peu dinatoires. Une truite de 500 grammes, qui a avalé une dizaine de vairons, ou un poisson de 100 grammes, n’a pas la chance ni la puissance peut-être de recommencer pareil festin « chaque jour ».

Au reste, sa santé en pâtirait, et peut-être aussi, plus intelligente que beaucoup d’entre nous, la truite sent-elle quand elle doit manger ou s’en abstenir. Il est curieux, en effet, de constater que, sur deux de ces poissons capturés presque au même moment et au même endroit, l’un a le ventre plein, et l’autre vide ; la nourriture était pourtant aussi facile à prendre par le second que par le premier, puisqu’elle se trouvait au même endroit : bancs de vairons, amas de larves diverses, etc.

Que la truite soit parfois atteinte d’une boulimie étonnante, cela, les pêcheurs le savent bien. On a cité des cas où l’un de ces poissons, dont l’estomac était déjà garni de deux à trois vairons, dont un autre dépassait encore sa gueule, s’était encore précipité sur une pauvre imitation de mouche lancée par un pêcheur. C’est là, véritablement, une aberration de l’instinct. Et il y en a combien dans le monde ichthyen !

Le Chasseur Français N°600 Juin 1940 Page 337