Les conseils que vous trouverez à cette place, chaque mois,
sont basés sur des conditions de culture correspondant à la moyenne de
l’ensemble de notre pays. Il faut naturellement y apporter des correctifs,
suivant la région, l’altitude, ou même l’exposition du terrain. C’est une
question d’opportunité que chacun résout au mieux avec de l’expérience et du
bon sens.
Nous vous recommandons de tenir votre carnet de cultures,
sur lequel vous noterez les circonstances de vos travaux et leurs résultats,
réussites ou insuccès. Cet aide-mémoire, enrichi chaque année de vos
expériences successives, vous évitera de retomber dans les mêmes erreurs, de
persister dans des cultures sans rendement. Vous y noterez toutes vos dépenses,
graines, plants, fumier, engrais. Vous y coucherez en regard la valeur
approximative de vos récoltes. En fin de saison, vous établirez votre bilan et
aurez en main tous les éléments qui vous permettront d’améliorer le rendement
de votre jardin.
Efforcez-vous de cultiver dans votre jardin tout ce qu’il
faut pour approvisionner la table familiale ; apportez dans vos cultures
la plus grande variété possible. Que nulle parcelle de votre jardin ne soit
inutilisée ; qu’à chacune, au contraire, soit demandé le maximum de ce
qu’elle peut produire. En travaillant ainsi à votre propre bien-être, vous
contribuerez au relèvement économique du pays.
Dans les conseils qui suivent, nous mettons à votre
disposition une longue expérience pratique. Certains d’entre vous détiennent
peut-être d’utiles recettes. Qu’ils nous les communiquent, nous en ferons
bénéficier tous nos lecteurs.
Travaux généraux du mois.
C’est l’automne, jardiniers et amateurs récoltent avec joie
et même une pointe de fierté — bien légitime du reste — les résultats
de leurs efforts persévérants.
Les différents bulbes sont mûrs ; arrachez, si vous ne
l’avez fait le mois dernier, et aussi suivant les régions, les diverses
variétés d’oignons jaunes, les échalotes et peut-être encore l’ail.
Mais, avant de les rentrer, laissez les bulbes se ressuyer, puis mettez-les en
bottes ou en tresses que vous suspendrez au grenier.
Vous aurez marqué à l’aide d’un tuteur les plus belles
trochées de pommes de terre ; en arrachant ces pieds sélectionnés,
mettez de côté, pour la semence du printemps prochain, tous les tubercules
aptes à être plantés ; ne les rentrez pas tout de suite, laissez-les sur
le terrain une dizaine de jours, retournez-les pour qu’ils prennent une teinte
verte très foncée.
Récoltez soigneusement les graines potagères ou de fleurs.
Faites-les sécher, nettoyez-les et conservez-les dans des sacs à l’abri de
l’air.
Dans plusieurs régions, les haricots, pois, pois
chiches, lentilles, soya ont été ramassés vers la moitié du
mois dernier, mais, dans le Centre et le Sud-Est, voici le moment de faire
cette récolte. En les arrachant, liez-les par petites poignées que vous
suspendrez au grenier. Pour bien les conserver, gardez-les le plus longtemps
possible dans les cosses, ne prenez que ce qui vous est nécessaire au fur et à
mesure de vos besoins ; c’est facile en petite culture. Si vous ne pouvez
agir ainsi, conservez tous ces grains à l’abri de l’air dans une caisse,
mettez-y un peu de naphtaline, ou, mieux, quelques gouttes de sulfure de
carbone ; vous éviterez ainsi les dégâts occasionnés par les bruches.
C’est aussi le moment de la cueillette des haricots
semés au début de juillet, des pois hâtifs et mange-tout, des choux
cabus et de Milan, des choux-fleurs d’été, des choux de
Bruxelles, si vous avez eu soin d’en étêter quelques-uns, des betteraves
à salade, céleris, cardons, poirée ; des salades,
tomates, cornichons, melons, des premiers épinards,
de la tétragone, de l’arroche, des radis d’été et
d’automne.
On récolte encore les fraises de quatre-saisons
et à gros fruits remontants ; il est bon de biner ces derniers et
de leur distribuer un peu d’engrais pour avoir une dernière récolte en octobre
et même plus tard, à condition de mettre des châssis.
Pour votre consommation, faites blanchir des céleris
à côtes, feuilles vertes ou dorées, quelques beaux cardons, les poirées
ou bettes à cardes, dont les côtes sont meilleures et plus tendres si elles ont
été blanchies. Généralement, on empaille ces légumes, mais, si vous pouvez vous
procurer des sacs en papier ayant contenu du ciment, chez un entrepreneur de
maçonnerie, ils pourront remplacer la paille pendant plusieurs années.
Suivant vos besoins, vous continuez à lier des scaroles,
chicorées, laitues, romaines, au raphia, jonc ou paille
légèrement humide ; ne faites cette opération que lorsque les feuilles
sont sèches.
Coupez les tiges des potirons, citrouilles, courges,
giraumons à une feuille au-dessus des fruits, supprimez les pousses
inutiles, sans déplacer les autres ; elles ont des racines à chaque
nœud ; arrosez copieusement ; il faut que les fruits grossissent pour
pouvoir les récolter à la fin du mois ou au début d’octobre. Enlevez les
feuilles de base aux céleris-raves ; les racines grossiront mieux,
supprimez les feuilles qui gênent la maturité de vos tomates.
Brûlez toutes les fanes de pommes de terre qui seraient
envahies par le Peronospora ou qui auraient été attaquées par les
doryphores, quelques-uns auraient pu échapper et pondre.
Il faut prendre déjà des précautions pour l’hiver ;
faire provision de feuilles de fougère, etc., pour garantir les divers légumes.
Si vous devez faire des couches plus tard, procurez-vous d’avance du fumier que
vous abriterez pour en éviter la fermentation.
Semis.
— Vous pouvez semer tout ce que vous croyez susceptible
d’être encore récolté avant les gelées : radis rose, cresson
alénois, épinards ; sachez que, en plus de la variété
Monstrueux de Viroflay, vous avez le vert de Massy, rustique pour l’hiver, et
le Zénith d’hiver, rustique et à très larges feuilles, semez également les mâches,
que vous récolterez tout l’hiver et jusqu’en mars, et aussi les navets
hâtifs, race Marteau et autres.
Vers le milieu du mois, vous sèmerez également des carottes
demi-longues nantaises ou autres ; vous les abriterez avec des
feuilles pendant l’hiver, et, au printemps, après une distribution de nitrate
de soude ou de sulfate d’ammoniaque, vous récolterez sans châssis de très
belles carottes nouvelles.
Il faut déjà penser à vos récoltes de printemps : semez
choux cabus Express, d’York hâtif, Joanet ou Nantas hâtif, Cœur de
bœuf éclair ou autres hâtifs, puis des Milans très hâtifs, Milan à pied
court, Milan d’Aubervilliers, choux-fleurs hâtifs, Sans Rival, ou
l’excellente variété d’Erfurt vrai.
Si votre premier semis de laitues pommées d’hiver, de
la Passion, Gotte ou laitue romaine d’hiver n’avait pas réussi, recommencez
sans tarder ; après des pommes de terre ou des haricots, ce sera parfait.
Dans une plate-bande que vous pourrez abriter facilement,
semez du cerfeuil, du persil, de l’oseille ; vous
serez heureux de les trouver par les grands froids.
À bonne exposition ou encore en prévoyant l’utilisation de
châssis, faites un dernier semis de haricots : Noir hâtif de
Belgique, Roi des Belges, Souvenir de Deuil ; en tout cas, des variétés
hâtives. Dans l’Ouest, en Bretagne, dans le Midi, on sème à bonne exposition
les pois, variétés : Caractus vrai. Petit Provençal, Unique, Chemin
long, William Hurst, Mammouth.
Plantations.
— On peut déjà planter, sans fumure fraîche, après des
haricots ou des salades, les premiers bulbes d’ail : repiquez les oignons
blancs, les chicorées frisées, les scaroles à feuille en cornet,
les laitues romaines, les pissenlits, ces derniers pour consommer
au printemps.
Repiquez de même en plate-bande, à bonne exposition, des laitues
d’hiver semées après le 15 août : Passion blonde, verte ou brune,
rouge d’hiver, de Trémont, Savoyarde. Si vous avez des cloches, mettez un chou
Express ou Cœur de bœuf au milieu et autour des laitues gotte : vous les
abriterez par grands froids.
Vous pouvez planter les fraisiers repiqués le mois
dernier ; si vous ne l’aviez fait, il est encore temps de choisir les plus
beaux stolons et de les mettre en terre bien préparée et terreautée.
Actuellement, refaites toutes vos bordures : thym,
marjolaine, oseille, ciboulette, cive.
Les conserves.
— Ne laissez rien perdre ; vous vous souvenez de
la pénurie de légumes l’hiver dernier ; actuellement, faites des conserves
de toutes sortes et de toutes façons. Ce n’est pas mon rôle d’apprendre à nos
ménagères et cuisinières la manière d’opérer, tant sont nombreux les moyens et
les méthodes. Nous devons tirer parti de tout, et, si vous avez en abondance,
donnez : il y a bien des misères au pays de France.
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