Avec novembre, nous allons entrer dans ce qu’on a coutume
d’appeler la mauvaise saison, et cette perspective n’a rien de réjouissant pour
le pêcheur à la ligne dont l’activité va devenir moindre d’abord, puis tout à
fait nulle dès que les neiges apparaîtront. S’il est impossible de poursuivre
les Salmonidés, dont le frai a commencé et dont la pêche est interdite, s’il ne
faut plus envisager la capture des anguilles qui ont fui nos contrées, ou sont
profondément envasées, il n’est pas encore téméraire de compter sur la capture
de quelques poissons.
Les touches de barbeaux, de carpes, de tanches surtout, sont
devenues chez nous un tait assez rare. Cependant, en cas de crue, on peut en
accrocher par hasard en péchant aux vers de terre.
La brème est un peu moins réfractaire, mais ne mord plus aux
farineux.
Il en est de même du gardon qui, cependant, prendra encore
la graine de chènevis en eau claire et pas trop froide.
Les chevesnes, surtout les gros, ont conservé une partie de
leur appétit : ils s’attaquent aux vers, au vairon, au raisin sec
détrempé, aux asticots et surtout au sang caillé, dont ils raffolent.
La plupart des hotus ont disparu de nos rivières et regagné
les profondeurs des grands fleuves, où ils passeront l’hiver.
Mais deux poissons de choix, le brochet et la perche,
consoleront le pêcheur de ses déboires. Le premier est toujours aussi
vorace ; embusqué près d’un obstacle ou sous les berges creuses, il se
jette avec violence sur le vif attaché à la ligne. Il attaque presque aussi
bien un poisson mort ou un leurre artificiel que le pêcheur fait passer à sa
portée assez lentement en lui donnant apparence de vie.
La perche, à peu près insensible au froid tant qu’il n’est
pas excessif, recherche un beau ver de terre, la grappe d’asticots ou une larve
dodue. Avec presque autant de voracité, elle saisit la petite cuillère
brillante, le petit devon ou le poisson d’étain. Il ne s’agit que de lui
présenter ces leurres pour qu’ils lui paraissent doués de vie.
R. PORTIER.
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