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Le jardin potager en janvier

Travaux généraux.

— Pour beaucoup de jardiniers, janvier semble être le mois du repos. C’est peut-être vrai pour le possesseur d’un petit jardin de 100 ou 200 mètres carrés, mais, pour des superficies de 500, 1.000 mètres carrés ou plus, il en est tout autrement. Et si vous avez des châssis ou des bâches, nous pouvons vous assurer que leur seule surveillance n’est pas une sinécure en cette saison.

C’est l’époque des grands froids, c’est entendu ; il faut s’y attendre. Cependant, chaque année nous apporte un hiver d’aspect particulier. Nous pouvons avoir des périodes pluvieuses et douces, dont un jardinier avisé sait tirer parti en activant bêchages et défoncements. Le but à atteindre est d être prêt aux premiers jours de printemps et même dès la fin de février. Continuez donc activement ces travaux, qu’une gelée de -5° ne vous arrête pas. Pour parer au durcissement du sol, vous aurez couvert le terrain d’une couche de fumier, de terreau, de feuilles, que vous enfouissez en bêchant à deux profondeurs de bêche, ce qui est parfait pour tous les légumes.

S’il fait vraiment trop froid, amenez cependant à pied d’œuvre fumier et terreaux dont vous aurez besoin au dégel.

Si l’argile domine dans votre potager, que par conséquent la terre soit compacte et que le sous-sol ait tendance à être humide, établissez des drainages en épis. Vérifiez ceux qui sont déjà installés, si vous avez constaté trop d’humidité l’été dernier. Surtout, nettoyez et approfondissez les fossés d’écoulement.

C’est aussi le moment de consulter votre carnet de notes, de tenir compte des observations faites au cours de l’année, d’établir votre compte dépenses et profits, de vous rendre compte enfin de ce que vous a rapporté ce jardin, que vous cultivez avec tant de soins.

Établissez, d’autre part, votre plan de campagne pour 1942. Éliminez certaines variétés, choisissez-en de nouvelles ; c’est le moment d’établir vos listes d’achats si ce n’est déjà fait : graines diverses, engrais, outils, insecticides, poudres, etc. ...

C’est ainsi seulement que vous vous préparerez de belles récoltes ; ne pas improviser, mais prévoir, est la première qualité du bon jardinier, le meilleur facteur de réussite ; vous réussirez, c’est ce que nous vous souhaitons au début de cette année nouvelle.

Il est temps également de procéder à un inventaire et à une révision complète de tout votre matériel de jardinage : outils et leurs manches, brouette, échelles, planches de coffres, etc. Il faut repeindre, réparer les châssis ; avec des bandes de toile, consolider les cloches fêlées et même remettre en service celles qui ont été brisées, mais dont les morceaux ont été conservés.

Utilisez vos loisirs forcés à la confection des paillassons, si vous avez pu vous procurer de la bonne paille de seigle ; ou bien des claies de roseaux, de bruyère ou de genêt pour abriter repiquages et semis, ainsi que la floraison des espaliers.

Songez un peu aux petits oiseaux, ces gentils auxiliaires bénévoles ; à leur intention, installez de petites plates-formes abritées, où vous disposerez quelque nourriture, miettes de pain ou menues graines ; préparez-leur des nids artificiels, auxquels ils s’habitueront avant les beaux jours.

Les artichauts que vous avez abrités craignent plus la pourriture que le froid ; profitez d’une journée ensoleillée pour les découvrir, faire sécher le cœur, puis remettez de la paille ou des feuilles sèches.

Ouvrez une fosse de la profondeur d’un fer de bêche, en rejetant la terre à droite et à gauche ; la terre du fond prendra l’air et, dès mars-avril, vous pourrez y planter vos griffes d’asperge.

Nous pouvons encore récolter en ce moment les dernières chicorées frisées et les scaroles, mais nous allons avoir à notre gré : endives, barbe-de-capucin, pissenlit amélioré ; nous vous recommandons la salade de feuilles de scorsonère blanchies.

Nous avons aussi à notre disposition les cardons, céleris verts et dorés, poirées ou bettes, à condition toutefois d’en surveiller la conservation ; évitez la pourriture et consommez les plus avancés.

Semis.

— À l’abri d’un mur, à bonne exposition et en terre bien préparée et terreautée, semez toutes les variétés de choux à récolter au printemps, c’est-à-dire d’avril à fin juin : Express, Hâtif d’Étampes, Cœur de bœuf, d’York hâtif. Lyonnais extra-hâtif, Joannet ou Nantais hâtif, Bacalan, hâtif de Rennes ou de Saint-Brieuc. Les divers Milans : Milan hâtif précurseur. Milan d’Aubervilliers, Milan hâtif de la Saint-Jean.

Pensez déjà aux choux-fleurs d’été : nain très hâtif, hâtif de Paris, Incomparable ou chou-fleur d’Alger, Lenormand à pied court.

De même, semez quelques variétés de pois, mais les plus hâtives, telles que : Rapide, Prince Albert, Express, Hâtif d’Arras, Caractacus, Avant-garde, Super-Annonay, Petit Provençal, Unique.

Par grands froids, surveillez et augmentez les moyens de protection de vos semis repiqués : choux divers, laitues et romaines, oignons blancs.

En général, nous ne cultivons pas assez les fèves ; les grains, qui ont une grande valeur alimentaire, se préparent de différentes façons une fois débarrassés de leur peau, soit à l’état frais, soit en sec. Les cosses jeunes se consomment comme les haricots. Semez-les actuellement en terre un peu forte et bien fumée ; vous auriez pu le faire en novembre et vous éviteriez ainsi les pucerons noirs. Vous en avez plusieurs variétés : pour le Nord, celle des marais et de Bunyard, puis de Séville, d’Aguadulce, Goliath.

Continuez les plantations d’ail blanc ou rose, de bulbilles d’oignons jaunes.

Semis et plantations sur couche.

— Pour ces cultures, le fumier est l’élément principal ; c’est pour cela qu’il est bon d’en constituer dès l’automne une réserve qui, mélangée à des feuilles et d’autres débris, le tout brassé et arrosé, donnera au bout de quelques jours une bonne chaleur.

Le coffre que vous aurez placé dessus sera garni jusqu’aux bords par de bons réchauds. Lorsque le coup de feu sera passé, semez sur la couche de terreau, qui aura une épaisseur de 20 centimètres : carottes hâtives, Grelot, Bellot, de Hollande, Davanture ; jetez parmi quelques graines de radis à forcer (du reste, ajoutez-en à tous vos semis, comme nous vous l’avons déjà recommandé), chicorée frisée, choux divers, fève hâtive (la variété naine spéciale), joignez-y des pois et des haricots, mais actuellement cette culture n’est pas à recommander, parce qu’il faut trop de place ; du reste, un jardinier ayant des châssis a dû prévoir et faire des conserves.

Semez également les variétés de laitues printanières et laitues romaines blondes ; surveillez-en l’aération et repiquez sous châssis à froid. L’excellente laitue gotte peut se planter serrée et ne demande pas beaucoup d’air pour se développer.

Faites un premier semis de poireaux, mais des variétés : gros du Midi, jaune du Poitou, monstrueux de Carentan, qui sont les plus hâtives ; des oignons blancs, si vos semis d’automne n’avaient pas réussi ; quelques pommes de terre : Belle de Fontenay, Express, Mayolin, mais faites-les germer au préalable.

Mettez également sur couche chaude de vieux pieds d’asperges que vous désirez remplacer ; en peu de temps (dix ou quinze jours environ), vous aurez des pousses vertes ou blanches suivant l’épaisseur du terreau que vous aurez mis.

M. E.

Le Chasseur Français N°605 Janvier 1942 Page 29