Tout au long de l’hiver nous avons surtout mangé pommes de
terre et légumes secs : par nécessité direz-vous. Oui, les légumes frais
manquent en hiver ; les fruits frais sont rares et chers. Et, par les
grands froids, pommes de terre et légumes secs, riches en féculents, nous
permettent de lutter contre l’abaissement extérieur de la température.
Mais, dès les premiers rayons tièdes du soleil, notre
organisme, lassé de cette nourriture trop consistante, aspire à une nourriture
plus légère, plus fraîche, plus riche en vitamines et sels minéraux. Juste à ce
moment apparaissent sur nos marchés les premières laitues, les premiers
épinards ; dans les prairies commencent à poindre les pissenlits :
hâtons-nous d’agrémenter nos menus de salades diverses ; sachons profiter
de leurs remarquables qualités.
Elles nous apportent en abondance vitamines et sels
minéraux, qui donnent de la vigueur et sont indispensables à l’utilisation par
l’organisme des autres aliments. Les féculents, qui furent à la base de notre
alimentation pendant tout l’hiver, ont appauvri notre organisme en vitamines et
sels minéraux ; il n’est que temps de renouveler ces provisions
épuisées !
Les salades excitent l’appétit et favorisent la sécrétion
des sucs digestifs ; mastiquons-les bien d’abord, afin de les bien
imprégner de salive ; c’est tout au long de l’appareil digestif ensuite
que les glandes digestives, excitées par la présence seule de la salade,
déversent abondamment leurs sucs, qui servent non seulement à la digestion de
la salade elle-même, mais aussi de tous les aliments ingérés au cours du même
repas. Une salade fraîche est le meilleur des apéritifs ; voilà pourquoi
il est souhaitable de servir les salades au début du repas, comme on le fait
habituellement dans le Midi, et non à la fin. Un autre avantage encore à cette
habitude : la salade est très facilement digérée ; mangée au début du
repas, elle passe très vite dans l’appareil digestif, ouvrant la voie aux
autres aliments ; à la fin du repas, au contraire, surtout à la fin d’un
repas riche en viande, la salade, très vite digérée, risque de pousser devant
elle des aliments incomplètement digérés ; ceux-ci sont non seulement
perdus, mais risquent de se décomposer dans la fin de l’appareil digestif.
On conseille de manger les salades sans pain :
l’acidité de l’assaisonnement se combine mal à l’amidon contenu dans le pain,
qui a besoin, lui, pour être digéré, d’un milieu alcalin (qu’il trouve
normalement dans la salive et dans le suc pancréatique additionné de bile).
Rejetons complètement la moutarde et le poivre de leur assaisonnement : si
cela est possible, remplaçons le vinaigre par le jus de citron ; en tout
cas, n’employons jamais que du vinaigre de vin.
Si nous recueillons nous-mêmes les salades dans un jardin
que nous savons ne jamais être arrosé par des eaux sales, nous pouvons nous
contenter de les laver soigneusement à l’eau claire, feuille par feuille, pour
en chasser : chenilles, limaces, terre et sable. Si nous ne connaissons
pas l’origine des salades, il est prudent d’ajouter, dans la dernière eau de
rinçage, trois ou quatre gouttes d’eau de Javel par litre et de laisser tremper
quelques minutes : la salade ne conserve aucun goût, et les microbes de la
typhoïde qui auraient pu être disséminés par arrosage avec eaux d’épandage sont
détruits.
N’oublions pas que la salade verte est la plus riche en
vitamines et sels minéraux. Sa cellulose est utile au bon fonctionnement de
l’intestin.
N’hésitons pas à en faire une consommation quotidienne.
L’huile manque, direz-vous ? Certes ! On peut en
diminuer la quantité, surtout on peut la remplacer par de la crème de lait (si
on a la chance d’en avoir), ou par du lard fondu.
Il est enfin souhaitable d’ajouter de fines herbes
hachées : persil, cerfeuil, estragon, ciboulette, ail, oignon ; ces
condiments sont aussi très riches en sels minéraux, vitamines, et, par leurs
essences diverses, ils favorisent les sécrétions gastriques.
Voici maintenant quelques recettes de préparation :
Salade de laitue à la crème.
— Après avoir soigneusement nettoyé les feuilles, les
égoutter et les mettre dans un saladier au fond duquel on aura mis un peu de
crème, du jus de citron, du sel, des fines herbes. Remuer la salade seulement
quelques instants avant de servir.
Salade de pissenlits au lard.
— Éplucher et laver des pissenlits. Saupoudrer de sel
et de fines herbes. Dans une poêle, faire fondre un peu de lard coupé en petits
cubes. Quand il a commencé à fondre, ajouter un peu de vinaigre et verser très
chaud sur les pissenlits. Remuer et servir aussitôt.
On peut augmenter la valeur nutritive de cette salade en
ajoutant des pommes de terre préalablement cuites à l’eau, refroidies, coupées
en tranches et mélangées aux pissenlits.
Salade de cresson.
— Le cresson est un aliment délicat, riche en sels minéraux
et vitamines ; il est même un remède précieux contre les troubles de la
digestion.
Éplucher le cresson, le bien laver, l’apprêter avec huile,
jus de citron ou vinaigre ; inutile de mettre du sel.
Les pommes de terre forment un excellent accompagnement.
Salade d’épinards.
— Débarrasser de leurs tiges des épinards tendres et
jeunes. Les laver soigneusement. Les hacher grossièrement, les arroser de sauce
à l’huile et au vinaigre ; les manger avec des pommes de terre rôties.
Pour les personnes auxquelles les crudités sont défendues,
voici un excellent moyen d’utiliser les laitues :
Laitues braisées.
— Choisir des laitues bien pommées, les laver, les
mettre dans l’eau bouillante salée. Cuire cinq minutes. Les rafraîchir à l’eau
froide, les presser de façon à faire sortir l’eau. Les mettre dans une
casserole ou une cocotte avec une cuillerée d’huile, ou une noix de beurre, ou
quelques tranches fines de petit salé. Ajouter une pincée de sel et un bouquet
garni (thym, laurier, persil). Laisser cuire à petit feu une heure au moins. Au
moment de servir, faire une liaison à la farine pour épaissir le jus.
A. PEYREFITTE.
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