Petite maison saintongeaise

Contrairement à la « Petite Maison familiale » publiée précédemment par Le Chasseur Français, cette petite maison ne comporte pas d’étage. Elle a été étudiée pour un ménage d’un certain âge ; qui désire avoir toutes les pièces de plain-pied — disposition moins fatigante, mais plus coûteuse, — et qui possède de nombreux meubles dont il ne veut point se séparer, car ils représentent pour lui tout à la fois des habitudes et des souvenirs.

Vestibule, salon et salle à manger communicants, cuisine près de la salle à manger, lavabo-vestiaire et w.-c. près de l’entrée, deux chambres et salle de bains, penderie ou placards, ainsi devait se résumer le programme, complété par une cave, une chaufferie et une buanderie au sous-sol.

La façade vers la route étant sensiblement au sud, et la largeur étant limitée, j’ai placé l’entrée sur le côté, face à l’est, la façade étant occupée entièrement par le salon et la salle à manger. J’ai relégué les deux chambres en arrière avec salle de bains intercalée. Ainsi, l’une des chambres pouvait naturellement s’éclairer à l’est. Mais, pour l’autre, le nord et l’ouest, tous deux indésirables, étaient seuls possibles. J’ai donc modelé mon plan pour faire dépasser en arrière la chambre 2 et avoir une fenêtre à l’est.

Distribution.

— Nous gagnons, en longeant la façade est, le perron d’entrée latéral, marqué par un large socle sur lequel repose une grosse jarre fleurie. Après avoir monté quatre marches, nous nous trouvons devant la porte du vestibule, porte vitrée à deux vantaux fermée le soir par de gros contrevents. Dans le vestibule (1^m,50 de large), nous trouvons à gauche les portes du salon et de la salle à manger, à droite, la porte du lavabo qui commande le w.-c. Dans le retour à l’équerre du vestibule, nous trouvons, à gauche, la porte de la cuisine, à droite, la porte d’un placard-penderie, au fond, les portes des deux chambres et d’un placard-penderie.

Le salon (4m. x 3^m,70 dans sa partie rectangulaire) s’agrandit d’un bow-window en demi-tourelle de 2^m,70 d’ouverture et de 1^m,60 de profondeur. Ce bow-window permet la vue côté route de trois côtés et permet de recevoir le soleil du matin au soir. Deux faces sont pourvues de fenêtres, la troisième comporte une porte-fenêtre, donnant sur une terrasse circulaire agrémentée d’une pergola. Le salon communique avec la salle à manger par une porte pliante vitrée à trois vantaux de 2^m,10 de large. Malgré toutes ces ouvertures, il reste de grands panneaux pour les meubles (un de 3 mètres, un de 3^m,70, un de 1^m,10). Ainsi peuvent trouver place une grande bibliothèque, un piano avec un ou deux casiers à musique, une vitrine pour objets d’art. Une grande table peut se placer dans la partie carrée du salon, et une petite table ronde dans le bow-window. Les baies sont fermées par des volets roulants.

La salle à manger (5m. x 3^m,70 dans sa partie rectangulaire) s’agrandit d’un bow-window semblable à celui du salon. Là aussi nous trouvons un grand panneau de 3^m,70 pour le buffet, un panneau de 2 mètres pour la desserte, un panneau de 4 mètres pour la grande cheminée décorative. Une grande table permet de recevoir dix convives, une table ronde se place dans le bow-window.

De la salle à manger nous passons également sur la terrasse-pergola, dont l’avant circulaire s’agrémente de deux colonnes où grimpent des rosiers. Cette terrasse mesure 4m. x 2^m,40 dans ses plus grandes dimensions. La partie avant est bordée par un mur-banquette de 0^m,40 de haut garni de pots de fleurs.

La cuisine (3^m, 90 x 3m.), placée à côté de la salle à manger, s’éclaire par trois fenêtres juxtaposées à l’appui élevé, au-dessous desquelles se trouve l’évier avec double égouttoir. Sur la paroi qui la sépare de la salle à manger se trouvent : table à épluchage, cuisinière électrique, cuisinière à bois et à charbon. Tous les appareils sont groupés pour faciliter le travail. Au-dessus de la table, se trouve un petit passe-plat communiquant directement avec la salle à manger. Sur la paroi opposée, se développe un placard à quatre portes de 3 mètres de long. À côté du placard se trouve une porte donnant sur un palier, d’où l’on prend, à droite l’escalier de cave, à gauche le perron descendant au jardin. Ce petit palier forme ainsi tambour isolant.

Le lavabo-vestiaire (2m,30 x 1^m,40) comporte un petit lavabo, un placard-penderie, des portemanteaux. Du lavabo-vestiaire on passe au w.-c., qui est ainsi bien séparé du vestibule.

La chambre 1 (4m. x 3^m,30) est éclairée à l’est par une fenêtre de 1^m,40 x 1^m,50 garnie de volets pleins en bois. On y trouve un grand lit et deux tables de chevet, deux armoires, une table.

La chambre 2 (4^m,40 x 3^m,90) s’éclaire par deux fenêtres d’angle de 1m. x 1^m,50, l’une au nord, l’autre à l’est. Elle comporte deux lits jumeaux et deux tables de chevet, deux armoires, une commode, une table.

Les deux chambres communiquent directement avec la salle de bains (2^m,40 x 1^m,80), éclairée par une large fenêtre à l’appui élevé (1^m,80), sous laquelle se trouvent le lavabo et le bidet, une glace avec tablettes occupant l’espace entre lavabo et appui. La baignoire occupe la paroi opposée et se trouve encastrée entre trois cloisons.

L’espace disponible entre les deux chambres était un peu plus grand qu’il ne convenait pour la salle de bains : j’ai repoussé la cloison du fond de 0^m,60, et j’ai trouvé du côté du couloir, entre les portes des deux chambres, un troisième placard-penderie. Cela porte à 3^m,60 le développement des placards-penderie de cette maison, tous prévus à une profondeur nette de 0^m,55 permettant la pose des porte-manteaux dans le sens transversal, donc avec le maximum d’utilisation.

L’escalier nous conduit à un sous-sol partiel comprenant cave, chaufferie pour chauffage central, buanderie.

Construction.

— Le principe général est très simple : plan rectangulaire, toit à deux pentes couvert en tuiles creuses. Les deux murs de refend transversaux montent jusqu’au toit et portent les solives du plancher du comble et les pannes de la charpente ; pas de poutres, pas de fermes. L’avancée de la chambre 2 est couverte par le simple prolongement du versant ouest du toit.

Seules, les demi-tourelles des bow-windows comportent un travail plus minutieux avec leurs formes rondes et leurs arêtiers. Mais leur volume est peu important.

Aspect extérieur.

— J’ai retrouvé ici, en façade, avec les deux demi-tourelles et la pergola centrale, ce triple mouvement circulaire que j’ai appliqué plusieurs fois, notamment à Paris et à Nancy, et qui donne au visage de la maison beaucoup de souplesse et de vie. Les deux demi-tourelles rappellent les absides des églises romanes saintongeaises et s’accrochent ainsi naturellement à la carcasse simple qui est celle de la maison saintongeaise. Les toits peu saillants, suivant la coutume de la région, sont bordés par la dentelle traditionnelle des génoises en tuiles creuses superposées. Au-dessus du toit, émerge l’unique et importante souche de cheminée où se trouvent réunis tous les tuyaux de fumée et qui rappelle ainsi celle des maisons paysannes. Sur le pignon de façade, j’ai prévu un cadran solaire. Les crépis extérieurs ton pierre, le vieux rose très pâle de la tuile seront rehaussés uniquement par les rosiers grimpants et les pots de géraniums de la pergola. Point de bariolage, point de détails malencontreux : telle est la leçon que semblent nous donner les paysages d’une région demeurée, avec la Provence, l’une des plus classiques de France.

Gérard TISSOIRE,

Architecte.

Le Chasseur Français N°625 Mars 1949 Page 372