De toutes les maladies auxquelles est sujet le lapin, la
coccidiose, ou « gros ventre », est certainement la plus répandue :
chaque année, elle fait des dégâts considérables dans les clapiers. Élevages
d'amateur, élevages de fermes, élevages plus ou moins « industriels »,
tous redoutent ce fléau qui risque de vider un clapier en quelques semaines.
Adultes et jeunes peuvent être atteints, mais ce sont
généralement ces derniers qui succombent ; les premiers résistent mieux,
tout en n'en transmettant pas moins le terrible germe. Dans certains clapiers
où règne la coccidiose, tous les jeunes peuvent mourir entre quinze jours et
quatre mois. Leur aspect est alors caractéristique : maigreur extrême, œil
terne, ventre anormalement et continuellement ballonné. Et, en quelques
semaines, la mort survient, précédée de convulsions qui peuvent durer pendant
des heures.
Les éleveurs sont absolument désarmés devant une telle
hécatombe ; et la lutte est souvent rendue plus malaisée contre cette
maladie par le fait que l'on en ignore l'origine parasitaire. On parle de
météorisation, d'herbe mouillée : il serait bien plus utile d'examiner de
près un tel problème.
Si l'on regarde le foie d'un lapin mort de la
coccidiose, on remarque que sa surface est parsemée de nombreuses taches
blanchâtres ; taches qui sont dues à la présence de parasites appelés
coccidies. Ces dernières peuvent, du reste, passer dans l'intestin, où elles
continuent à se développer, et nombreuses seront celles que l'animal expulsera
avec ses excréments.
On comprend donc aisément (par la pollution des litières)
pour quelle raison la contagion est si rapide et si meurtrière.
Le traitement curatif ne donne pas toujours les résultats
attendus, l'intervention arrivant généralement trop tard, la multiplication des
coccidies étant très rapide. On peut toutefois le tenter, mais on ne gardera
aucun des sujets guéris pour la reproduction, en cas de réussite de ce
traitement. Certains produits venant de laboratoires sérieux, et qui sont
souvent à base de thymol, donnent de bons résultats. Pendant le traitement, on
changera les litières tous les jours et on les brûlera pour détruire les
parasites qui s'y trouvent. Les sujets guéris reprendront assez vite de
l'appétit, mais on devra alors les soumettre à un régime spécial, pour éviter
tout nouveau développement, encore possible, de la coccidiose. L'injection
sous-cutanée est très efficace, mais beaucoup ne voudront faire une telle
piqûre, par appréhension ou crainte de ne savoir comment s'y prendre. Dans ce
cas, on se contentera donc d'ajouter un antiparasitaire avalable, que l'on
mêlera aux pâtées, lesquelles seront de préférence humectées au sérum de
fromage ou au lait caillé.
Il est indéniable que le moyen le plus rapide d'enrayer avec
efficacité cette maladie consiste dans le renouvellement de tous les
reproducteurs, (mesure énergique et coûteuse, mais des plus efficaces) ;
on les remplacera alors par d'autres sujets provenant d'un clapier très sain et
où la coccidiose n'existe pas. Avant de mettre les nouveaux sujets dans les
cases, celles-ci seront désinfectées au crésyl et enduites ensuite d'un lait de
chaux ; les litières seront brûlées, les augettes et les abreuvoirs
ébouillantés. Installer des animaux sains dans des locaux contaminés serait une
perte de temps et d'argent : les décès se renouvelleraient, et tout serait
à recommencer une fois de plus.
On appliquera, par précaution, un régime préventif comme
celui indiqué ci-dessus ; cela est indispensable : les coccidies sont
très résistantes et peuvent vivre en dehors de l'organisme animal — d'une
manière ralentie il est vrai, mais qui n'en est pas moins redoutable. C'est
pour cela que des litières infectées ne doivent jamais être mêlées au fumier
que l'on répandra sur les prairies ou les champs de légumes : car lorsque
les lapins consommeront betteraves, carottes, luzerne, ils pourront introduire
dans leur foie et leur intestin des coccidies provenant de la fumure contaminée
par de la paille venant d'un clapier malsain — et tout est alors (dans ce
cas encore) à recommencer — surtout si l'on n'a pas vacciné ses sujets ou
distribué un médicament efficace.
Comme on le voit, les précautions à prendre pour éviter la
coccidiose doivent être constantes. Si l'on n'agit pas ainsi, on peut voir
réduite à néant la production de son clapier.
E. DE JEANAY-CHALENS.
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