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Arbres d'agrément

réussissant en ville

L'atmosphère confinée des villes importantes, et surtout des villes industrielles, constitue un milieu fort peu favorable aux végétaux, et, bien que la généralisation de l'emploi de l'énergie électrique ait, depuis un demi-siècle, grandement amélioré cet état de fait, les plantes sont encore loin de s'y développer comme à la campagne.

Les fumées, les vapeurs, les poussières et émanations de toute nature ne manquent pas, en effet, d'apporter des troubles dans la végétation en entravant plus ou moins la respiration et l'assimilation chlorophyllienne, fonctions importantes pour la vie des plantes.

Les arbres d'agrément, sur lesquels on compte pour meubler les espaces libres et pour fournir, pendant la belle saison, un ombrage bienfaisant, n'échappent pas, malheureusement, à ces conditions défavorables, et fort nombreux sont ceux que l'on ne peut songer à y planter sans risque d'insuccès. Aussi est-il nécessaire de connaître ceux, de tempérament robuste, qui sont à même de résister.

Incontestablement, le platane d'Orient vient en première ligne. C'est un arbre de grande vigueur, s'adaptant à toutes sortes de terrains, même calcaires, et y poussant rapidement. Il ne convient que pour les grands jardins, les larges avenues, car ses racines puissantes s'en vont au loin fouiller le sol et passent même souvent sous les fondations des murs. Il a, entre autres avantages, celui de supporter les tailles les plus sévères, celles-ci permettant de le maintenir sous une forme déterminée et, en tout cas, moins grande que s'il végétait librement. De reprise très facile, le platane peut être transplanté en exemplaires déjà forts, surtout s'il est possible de conserver une motte de terre autour des racines.

De végétation moins puissante, mais tout aussi accommodant sous le rapport du terrain, est l'érable sycomore, qui devient cependant un grand arbre dans les sols profonds et riches et peut former de belles avenues. La variété à feuilles pourpres est plus décorative que le type à feuilles vertes et peut faire de beaux groupes ou des isolés magnifiques.

Le marronnier d'Inde, à fleurs blanches, est aussi un très bel arbre, peu exigeant sous le rapport de la nature du sol. Son port régulier, ses larges feuilles, ses grandes grappes de fleurs, sa végétation rapide et sa grande longévité (quatre cents ou cinq cents ans) constituent autant de qualités qui le font apprécier. Régulièrement taillé depuis son jeune âge, il se prête à la formation de superbes rideaux, de salles de verdure, d'avenues somptueuses. Dans ces divers cas, on est évidemment privé de sa magnifique floraison.

Le tilleul argenté, l'une des plus belles espèces du genre tilleul, est aussi d'une parfaite rusticité. Il peut servir à faire des avenues, des rideaux, des mails, des salles de verdure aussi bien que des groupes ou des isolés sur pelouses. C'est assurément l'arbre qui supporte le mieux la taille. Aussi est-il très recherché, notamment pour meubler le jardin à la française. Lorsqu'on le plante isolément, il se fait remarquer par son port régulier et sa pousse rapide, ses larges feuilles, argentées en dessous, ne tombant qu'assez tard à l'automne ; son seul inconvénient est de reprendre assez difficilement, ce qui oblige à ne le planter qu'en jeunes sujets, à moins de prendre, pour les sujets plus forts, des précautions spéciales telles que le cernage préalable en pépinière.

L'orme à larges feuilles, arbre vigoureux, supporte également l'air vicié des grandes agglomérations et s'accommode de tous terrains. Il devient très grand et ses racines, qui s'étendent fort loin, sont très incommodes pour les potagers voisins. Comme le tilleul argenté, il reprend difficilement en forts exemplaires. Il se taille moins facilement que le tilleul, de sorte qu'on n'en fait que rarement des rideaux. D'autre part, il est souvent attaqué par un insecte dont la larve creuse des galeries sous l'écorce, dévorant l'aubier et faisant périr un bel arbre adulte en fort peu de temps.

Plusieurs espèces de deuxième grandeur peuvent encore trouver place dans les petits jardins de ville, où il ne saurait être question de planter les grands arbres dont il est fait mention ci-dessus. Ce sont surtout :

Le prunier de Pissard, très décoratif au printemps par ses nombreuses fleurs blanc rosé, et davantage encore par son feuillage rouge brillant passant plus tard au pourpre foncé et persistant jusqu'à l'entrée de l'hiver. Fort peu délicat, il est précieux pour isoler ou pour former des groupes dans le but de créer des oppositions de couleur avec d'autres arbres à feuillage vert clair ou blanc, comme, par exemple, l'érable negundo panaché blanc.

Le sorbier des oiseaux, fort joli avec ses feuilles composées très élégantes, ses fleurs blanches auxquelles succèdent de nombreux fruits rouge-corail, persistant une partie de l'hiver et fort recherchés par les oiseaux. Il prospère fort bien dans les terrains frais et légers.

L'alisier de Fontainebleau, petit arbre à port touffu, à tête arrondie, dont les larges feuilles, blanc grisâtre en dessous, et les nombreux petits fruits jaunâtres ponctués de roux font encore une des plus belles espèces ornementales.

Le cytise faux ébénier, improprement appelé acacia jaune, qui se plaît particulièrement bien à l'ombre et en sol calcaire. Il est très décoratif par ses longues grappes de fleurs jaune vif répandant, en mai, une odeur suave dans le jardin.

L'acacia boule, au port compact, au feuillage léger, d'un beau vert gai, dont les branches, un peu fragiles, cassent assez facilement, obligeant à rechercher pour lui des situations abritées des vents violents, mais dont la rusticité est très grande et qui s'accommode des plus mauvais terrains.

Il nous serait possible, sans beaucoup de difficulté, d'allonger notablement cette liste, nous préférons la limiter aux seules essences susceptibles de donner toute satisfaction.

E. Delplace.

Le Chasseur Français N°647 Janvier 1951 Page 36