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Au jardin d'agrément

Semis, boutures et pelouses

« Longs jours, longs froids », dit-on couramment en parlant de février. Et, de fait, si, en ce mois, les jours s'allongent très sensiblement, le froid est encore redoutable.

Aussi est-ce seulement vers la fin du mois que l'on peut commencer à semer en plein air, les unes en pépinière bien exposée, les autres en place, quelques plantes à fleurs dont les graines germent à basse température : clarkia, souci double, thlaspi annuel, pavots doubles, coquelicots doubles, pieds d'alouette, etc.

Dans le Midi de la France, on peut semer sur couche, ou même sous châssis à froid pour quelques-unes, un certain nombre d'espèces que l'on veut voir fleurir de bonne heure : sauge éclatante, penstémons hybrides, coréopsis élégant, dahlias, verveines hybrides, œillets de Chine, nigelle de Damas, œillets d'Inde, roses d'Inde, zinnias doubles, lychnis croix-de-Jérusalem, ainsi que quelques plantes à feuillage coloré : cinéraire maritime, périlla de Nankin, pyrèthre doré, etc.

Les plantes vivaces rustiques fleurissant à la fin de l'été et en automne : asters variés, verge d'or, héléniums, soleils vivaces, chrysanthème des lacs, anémones du Japon, peuvent, vers la fin du mois, être divisées et replantées dans des emplacements bien préparés. On peut aussi, si le temps s'y prête, refaire les bordures de plantes naines : véronique petit chêne, œillet mignardise, gazon d'Espagne, aubriétia, céraiste tomenteux, pyrèthre gazonnant, saxifrages divers, etc.

Dans la serre à multiplication, on bouture les plantes pour garnitures d'été dont la croissance est assez lente : achyranthes, géraniums, anthémis, fuchsias, lantanas, héliotropes, réservant pour mars et avril celles à croissance plus rapide : salvias, coléus, agératums, etc.

C'est encore en février que l'on s'occupe des pelouses.

Il est relativement facile de créer, dans tous les terrains, des pelouses bien garnies. Mais il faut, pour cela, choisir avec soin et en connaissance de cause les plantes qui doivent composer les gazons. Il faut aussi prendre quelques précautions dans l'établissement de ceux-ci.

C'est à la famille botanique des Graminées qu'appartiennent la majorité des plantes composant les pelouses. Les espèces en sont très nombreuses et d'aptitudes très diverses. De façon générale, il convient de donner la préférence à celles de ces graminées qui, possédant des feuilles très fines et très nombreuses, repoussent rapidement après le fauchage ou la tonte.

En terrain sec et de médiocre qualité, celles qui remplissent le mieux cette condition sont : la fétuque ovine, le pâturin des prés, le brôme des prés et l’agrostis stolonifère.

En sol humide, on s'adressera de préférence au pâturin commun, au cynosure à crête et à la fétuque des prés.

Dans les parties ombragées par de grands arbres, on aura recours à d'autres espèces capables de s'y maintenir. La fétuque hétérophylle, la flouve odorante, le pâturin des bois seront les plus indiqués.

Le ray-grass anglais, graminée également, s'adapte, tout au moins provisoirement, à presque tous les sols. Malheureusement, du fait qu'il n'est qu'annuel, il disparaît presque entièrement après le premier hiver, faisant place à d'autres plantes adventices qui n'ont pas les qualités requises pour faire une bonne pelouse et obligent à refaire celle-ci très peu de temps après sa création.

Aussi ne peut-on établir de pelouses durables qu'en semant, en même temps que le ray-grass, les graminées susceptibles de réussir sur le terrain dont on dispose.

Il existe dans le commerce des mélanges tout faits, dits lawn-grass, spéciaux pour chaque sorte de terrain, dans lesquels le ray-grass entre pour moitié au moins. Germant très vite, ce dernier garnit le terrain peu après le semis et s'oppose à l'invasion des mauvaises herbes en attendant que les autres graminées ou légumineuses qui entrent dans le mélange, plus lentes à croître, prennent à leur tour possession de ce terrain.

On sème à l'are, en général, 1 kilogramme, de lawn-grass dans les grandes pelouses, tandis qu'il faut compter 1kg,250 pour les petites.

Si l'on veut une pelouse durable, il faut que le sol à engazonner soit aussi propre que possible. Dans les propriétés où des mouvements de terre importants ont été faits, ou qui ont été longtemps négligées, on aura le plus souvent avantage à cultiver, pendant au moins une saison, sur le terrain, des légumes demandant de nombreuses façons d'entretien : pommes de terre ou haricots par exemple.

Le terrain ayant été bêché profondément à l'automne, un léger labour, effectué peu de temps avant le semis, permettra de terminer le nivellement. Un bon coup de fourche crochue terminera l'ameublissement. Pierres et racines, s'il s'en trouve, seront ramassées et transportées dans les allées. Puis, à l’aide d'un piquet, on délimitera de façon très nette le contour de la pelouse en traçant, en bordure de l'allée, un rayon ou filet de quelques centimètres de profondeur.

On répandra alors la graine régulièrement, un peu plus abondamment sur la bordure et surtout dans le filet. Ainsi la limite de l'allée, que marque ce dernier, apparaîtra nettement lorsque le gazon sera levé et facilitera le découpage.

S'il s'agit d'une partie peu étendue, mais très soignée — jardin de ville par exemple, — on pourra avec avantage épandre un peu de terreau fin si on en a sous la main, puis, dès que la surface se sera parfaitement assainie, on plombera le sol à l'aide de la batte ou du rouleau, suivant qu'il s'agit de bordures ou de pelouses plus importantes.

L'époque la plus favorable pour semer le gazon s'étend du 15 mars au 20 avril. On sème un peu plus tôt en sol sec, un peu plus tard en terrain humide et froid.

Une fois établi, le gazon ne doit pas être négligé. S'il est bien soigné, il peut durer longtemps ; si, au contraire, il est négligé, les mauvaises herbes l'envahissent rapidement, et on se retrouve souvent, au bout d'une année ou deux, dans l'obligation de le retourner.

Les soins à donner aux pelouses sont :

  • 1° Les tontes, qui se font, au début, à l'aide d'une faux bien aiguisée, ensuite, quand le gazon a pris de la force, à la tondeuse. Il ne faut, de toute façon, pas trop attendre pour couper les gazons, qui jauniraient à la base et se dégarniraient.

  • 2° Des roulages donnés, au début, immédiatement après les tontes.

  • 3° Des arrosages aussi fréquents que l'imposent les conditions climatiques.

  • 4° Des sarclages pour enlever les mauvaises herbes à enracinement profond et à végétation rapide, qui tendent à étouffer les graminées : plantain, pissenlit, oseille, luzerne lupuline, etc.

  • 5° Des apports de terreau ou d'engrais chimiques, selon la nature du terrain et l'état d'entretien antérieur.
    On emploie soit du fumier très décomposé, que l'on étale sur la pelouse avant l'hiver et dont on enlève les parties pailleuses à l'aide d'un râteau, soit des cendres de bois, soit tout autre engrais. Des arrosages au purin coupé d'eau produisent également les meilleurs effets.

Quand une pelouse commence à vieillir, elle est bien souvent envahie par la mousse. On peut l'en débarrasser en répandant, au début de mars, par temps pluvieux, 5 à 6 kilos par are de sulfate de fer en neige, qui brûle la mousse tout en respectant les graminées. Quelque temps après, on donne un coup de râteau, puis on répand un peu de graine dans les parties les plus claires et on recouvre cette graine avec un centimètre environ de terre mélangée de terreau.

Les engrais à base de chaux sont également très efficaces sur les gazons, surtout quand le terrain est acide.

E. Delplace.

Le Chasseur Français N°648 Février 1951 Page 100