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La germination des graines

Pour que la germination d'une graine se produise, plusieurs conditions doivent être remplies ; les unes ont rapport à la graine elle-même ; les autres au milieu où elles se trouvent placées.

Les graines parfaitement constituées sont toutes susceptibles de germer. Or il arrive fréquemment que des semences ayant une apparence extérieure convenable ont une constitution interne imparfaite et ne peuvent germer. Leur légèreté permet le plus souvent de les séparer des bonnes graines, par un vannage énergique ou en les jetant dans l'eau et en prenant soin de retirer les graines qui surnagent. Ce dernier procédé n'est toutefois applicable qu'aux graines lisses et ne donnerait aucun résultat avec des graines velues ou plumeuses comme celles des carottes, des laitues, etc., qui tiennent de l'air emprisonné dans leurs tissus et sont, par cela même, plus légères que l'eau.

Pour germer, la graine doit en outre être mûre ; mais la maturité physiologique ne correspond pas toujours avec la maturité apparente. Parfois elle la précède ; quelquefois elle ne se produit qu'assez longtemps après.

C'est ainsi que les graines de mâche sont rarement récoltées à maturité complète, aussi la levée en est-elle meilleure la seconde année que la première.

D'autres graines ne germent qu'après avoir passé l'hiver, ce qui est le cas du cerfeuil tubéreux. Dans ce dernier cas, pour obtenir une germination convenable, il est indispensable de conserver ces graines en stratification dans du sable frais dès l'automne.

D'autre part, la graine perd avec le temps sa faculté germinative, sa longévité varie avec les espèces ; elle est généralement influencée par les conditions de conservation. Elle atteint son maximum de durée lorsqu'elle est récoltée à parfaite maturité et conservée dans un local sec et à l'abri de la lumière.

Dans la pratique courante, les graines des principales espèces de légumes conservées dans les conditions ordinaires ont les durées germinatives suivantes :

Artichaut 8 à 10 ans | Laitues 5 à 8 ans
Asperge 6 à 8 ans | Haricot 4 à 6 ans
Betterave 8 à 10 ans | Mâche 5 à 8 ans
Cardon 6 à 8 ans | Navet 5 à 6 ans
Carotte 4 à 8 ans | Oignon 2 à 5 ans
Céleri 6 à 8 ans | Oseille 2 à 3 ans
Cerfeuil 4 à 5 ans | Poireau 3 à 5 ans
Chicorée : frisée et scarole 9 à 10 ans | Pois 8 à 10 ans
Choux 5 à 8 ans | Radis 5 à 8 ans
Épinard 4 à 6 ans | Salsifis 2 à 4 ans
Tomate 5 à 8 ans | Scorsonère 1 à 2 ans

Même avec les espèces qui conservent longtemps leur faculté germinative, il n'est pas indifférent d'utiliser des graines jeunes plutôt que des vieilles. La germination de ces dernières est lente, irrégulière; les plantes auxquelles elles donnent naissance restent chétives. Chaque fois que la chose est possible, il est donc préférable d'avoir recours à des graines de récoltes récentes.

En dehors de leur bonne constitution, les graines ne peuvent germer qu'à la condition d'être placées dans un milieu présentant un degré d'humidité suffisant, une température et une aération convenables.

Mais, si l'eau est indispensable à l'évolution des graines, l'excès d'eau est toutefois nuisible ; les graines noyées pourrissent sans germer, il ne faut donc pas exagérer les apports d'eau en la circonstance.

Les grosses graines : betterave, pois, haricot, fève, asperge, etc., demandent un temps assez long pour s'imprégner de l'humidité du sol. On en accélère la germination en les immergeant dans l'eau pendant quelques heures.

La germination est également tributaire de la température et ne peut avoir lieu au-dessous d'un certain degré de chaleur ; mais elle cesse de s'accomplir lorsque celle-ci dépasse un maximum. Minimum et maximum varient d'ailleurs avec les espèces. Voici ceux qui correspondent à quelques graines potagères :

Températures : Minimum Maximum Idéale
Betterave 4° à 5° 28° à 30° 20°
Carotte 4° à 5° 30° 20°
Pois 1° à 2° 35° 15°
Fève 3° à 4° 30° 15°
Haricot 10° 37° 20°
Melon 12° à 15° 40° 22°

Les graines ne germent enfin qu'en présence de l'air, d'où la nécessité de ne les confier qu'à une terre bien ameublie et saine, où l'air circule facilement.

Une autre conséquence en découle, c'est celle qui a rapport à la profondeur des semis. Trop enterrées, les graines ne germent pas, soit par excès d'humidité, soit par manque d'air. La profondeur à laquelle il y a lieu d'enterrer les graines doit être proportionnée à leur volume. Les plus fines, comme la mâche, la raiponce, le thym, doivent être simplement enfouies par un léger coup de râteau suivi d'un plombage.

Les plus grosses, par contre : fève, pois, haricot, potiron, etc., doivent être recouvertes sous une couche de 3 à 4 centimètres de terre.

Généralement, on a tendance à trop enterrer les semences. Cette manière d'opérer ne va pas sans présenter de sérieux inconvénients.

Suivant les espèces auxquelles appartiennent les graines, la rapidité de germination diffère. Toutes les semences d'un même lot ne lèvent pas non plus en même temps. Pour le cresson alénois, la levée est complète au bout de vingt-quatre heures ; elle se prolonge jusqu'au septième ou huitième jour pour la betterave, les choux, les laitues, les pois ; jusqu'au quinzième jour pour le poireau, l'oignon ; jusqu'au vingtième jour pour la carotte, le salsifis, plus encore pour le persil. De toute façon, la germination est toujours plus lente chez les graines d'un certain âge. Sa promptitude dépend d'ailleurs pour beaucoup de la température.

A. GOUMY,

Ingénieur horticole.

Le Chasseur Français N°651 Mai 1951 Page 289