Cette maison a été composée pour loger deux ménages de la
même famille : au rez-de-chaussée s'installeront les vieux parents, dans
un appartement comportant une seule chambre avec salle de bains.
Le 1er étage sera occupé par le jeune ménage,
ayant à sa disposition deux chambres et salle de bains, mais avec la
possibilité d'utiliser en outre une ou plusieurs des quatre chambres du comble.
Cette formule, appliquée parfois auparavant, est devenue tout à fait
d'actualité depuis la mise en application de la nouvelle loi pour
l'encouragement à la construction. En effet, la prime à la construction de 500
francs par mètre carré pendant vingt ans s'applique seulement aux premiers 110
mètres carrés de surface habitable de chaque logement. Bien mieux, lorsqu'un
appartement dépasse 200 mètres carrés de surface habitable, ou lorsque une
maison individuelle dépasse 220 mètres carrés, le propriétaire constructeur
perd son droit à la prime. Il est donc préférable, quand il s'agit de loger une
famille de quelque importance, de prévoir un appartement pour chaque ménage.
Dans une maison familiale que j'édifie actuellement sur
semblable programme, l'appartement du rez-de-chaussée comporte environ 100
mètres carrés de surface habitable ; l'appartement du 1er étage
comporte environ 130 mètres carrés.
L'Inspection départementale de l'urbanisme a accepté comme
base à la prime 100 mètres carrés au rez-de-chaussée, 110 mètres carrés au 1er
étage, soit 210 mètres carrés en tout. Mon client recevra donc une prime de 105.000
francs par an, soit 2.100.000 francs en vingt ans, c'est-à-dire presque la
moitié du prix de sa construction.
Distribution.
— Le rez-de-chaussée étant surélevé pour permettre l'accès
du garage au sous-sol, nous accédons à la maison par un perron latéral de sept
ou huit marches. Après avoir ouvert la porte d'entrée, nous pénétrons dans la
cage d'escalier. Nous nous trouvons à trois marches en contrebas du palier du
rez-de-chaussée, ce qui nous permet d'échapper largement sous les dernières
marches de l'escalier du 1er étage. Nous gravissons trois marches et
nous nous trouvons sur un palier carré, où nous avons à gauche le départ
d'escalier et devant nous la porte d'entrée du vestibule de l'appartement du
rez-de-chaussée. Cette disposition, que j'ai maintes fois utilisée et exposée
dans de précédents articles, permet, à confort égal, de réduire la surface
bâtie et d'économiser quelques centaines de mille francs. Mais c'est là un
détail, parmi bien d'autres, que ne comprennent pas les apprentis sorciers de
l'architecture, capables — croient-ils — de faire une maison « à leur idée »
et « à leur goût » et qui dépensent des millions en surcroît pour
obtenir des résultats infâmes. Autour du vestibule, carré, se trouvent les
portes des pièces de l'appartement du rez-de-chaussée : salon et salle à
manger communicants, lavabo-w.-c., cuisine, grande chambre avec salle de bains.
Le salon et la salle à manger prennent jour en
façade principale par deux grandes fenêtres en arc avec volets pleins
décoratifs. Le salon comporte en outre une petite fenêtre latérale du côté de
l'entrée. Dans le salon, nous trouvons deux grands panneaux de 3 mètres pour
placer : grande bibliothèque, piano avec casier à musique, et deux autres
panneaux pour placer de petits meubles.
La salle à manger comporte des panneaux semblables à ceux du
salon où trouvent place desserte, grand buffet, pendule, radio. On y trouve, en
outre, une cheminée d'angle. Une grande baie en arc donne large communication
entre les deux pièces. Les radiateurs du chauffage central sont placés sous les
appuis des fenêtres.
Le lavabo comporte un petit lave-mains, le w.-c. une cuvette
à chasse d'eau.
La cuisine ouvre en façade latérale par une
porte-fenêtre qui permet de descendre au jardin, et par deux petites fenêtres
Une paroi est occupée par trois placards juxtaposés, une
autre paroi par l'évier avec double égouttoir et la cuisinière mixte.
Une autre paroi permet de placer un meuble. Au milieu, se
trouve la grande table où peuvent manger plusieurs personnes.
La grande chambre ouvre en façade postérieure par
deux fenêtres et en façade latérale par une fenêtre. Sur une très large face
s'adossent les deux lits jumeaux et leurs tables de chevet. Sur trois autres
panneaux se trouvent : grande armoire, grande penderie, commode. Une table
trouve place dans l'angle près des deux fenêtres. Le radiateur est sous une
fenêtre.
Dans la salle de bains, qui communique directement
avec la chambre, nous trouvons : baignoire encastrée, lavabo, bidet,
radiateur.
L'escalier nous conduit au 1er étage. Arrivés sur
le palier, d'où l'on repart pour le 2e étage, nous ouvrons la porte
d'entrée du petit hall carré qui distribue les pièces : salon et
salle à manger communicants, cuisine, lavabos-w.-c., deux chambres avec salle
de bains.
Le salon s'éclaire en façade principale par une
batterie de quatre fenêtres juxtaposées et par une porte-fenêtre ouvrant sur la
loggia centrale. La batterie des quatre fenêtres se complète par une cinquième
fenêtre en façade latérale. Il y a deux très grands panneaux pour les meubles,
et un placard en emprise sur le devant de la cage d'escalier.
La salle à manger, semblable au salon, comporte en
outre une grande cheminée flanquée par deux placards dessertes. Elle ouvre
également par une porte-fenêtre sur la loggia centrale.
Une large baie réunit les deux grandes pièces, qui forment
un vaste et lumineux ensemble de réception.
La cuisine s'éclaire en façade latérale par trois
fenêtres juxtaposées à l'appui élevé sous lesquelles se trouvent l'évier, avec
son égouttoir, et la cuisinière. Un grand placard de 2m,65, une table où
peuvent manger quatre ou six personnes, un radiateur complètent l'équipement de
la pièce.
Le lavabo-w.-c comprend lave-mains, cuvette à chasse
d'eau.
La grande chambre s'éclaire par une batterie de quatre
fenêtres sur l'angle (trois en façade postérieure, une en façade latérale). Sur
une paroi s'adosse le grand lit avec tables de chevet. Sur trois panneaux
prennent place penderie, armoire, commode ; dans l'angle une table, et un
radiateur sous une fenêtre.
La deuxième chambre s'éclaire par une batterie de
quatre fenêtres semblable à la précédente. Elle comprend : grand lit avec
tables de chevet, armoire, penderie, commode, table.
La salle de bains, placée entre les deux chambres et
communiquant directement avec elles, comporte lavabo sous la fenêtre à l'appui
élevé, baignoire encastrée, bidet.
L'escalier nous conduit au 2e étage, où nous
trouvons deux chambres devant, deux chambres derrière, un w.-c,, une salle de
bains. Les chambres sont flanquées latéralement, sous la pente du toit, de
grands placards avec portes à coulisse. Le w.-c. et la salle de bains
s'éclairent par les fenêtres d'une lucarne symétrique à celle de l'escalier.
Les chambres du 2e étage peuvent compléter les
appartements du rez-de-chaussée et du premier, ou constituer un troisième
logement, avec hall indépendant, donnant droit à la prime à la construction
comme les deux autres.
L'escalier descend au sous-sol, où nous trouvons :
garage, chaufferie, buanderie, cave.
Construction.
— Les murs du sous-sol et du rez-de-chaussée sont en gros
murs de 50 d'épaisseur, en pierres apparentes. Les murs du 1er et du
2e étage sont en pans de ciment armé de construction analogue à
celle des anciens pans de bois, avec remplissage à double paroi de briques creuses.
Les planchers sont en béton armé, avec encorbellement du 1er
étage semblable à celui des anciens pans de bois ; la charpente du toit en
béton armé, avec couverture en petites tuiles plates rustiques du pays, que les
anciennes tuileries locales continuent à fabriquer. Les carrelages sont en grès
cérame, les parquets en chêne. La loggia est en chêne.
Aspect extérieur.
— Puissante et massive dans sa silhouette générale, légère
par ses détails et son ajourage lumineux, rationnelle par sa distribution et
par sa construction, fantaisiste par ses encorbellements, cette maison rappelle
les anciennes demeures des pays champenois. Malgré les guerres et les
incendies, il en subsiste encore un certain nombre. On en voit quelques-unes,
bien conservées, à Troyes. Il y en avait de fort belles à Reims. Elles ont été
presque toutes détruites pendant la guerre de 1914-1918.
Gérard TISSOIRE,
Architecte.
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