Accueil  > Années 1952  > N°661 Mars 1952  > Page 157 Tous droits réservés

Conseils aux campeurs

Nous avons commenté dans notre dernière chronique (1) les conseils aux campeurs donnés, l'an dernier, par une circulaire de M. A. Morice, alors Secrétaire d'État à l'Enseignement technique, à la Jeunesse et aux Sports. Le paragraphe 4 est relatif au feu et à la protection contre l'incendie.

Après avoir attiré l'attention sur les dégâts causés ces dernières années par des imprudences qui « ont été rarement commises par des campeurs », la circulaire rappelle l'article 148 du code forestier interdisant de « porter ou d'allumer des feux à l'intérieur des forêts ou à moins de 200 mètres de leur lisière » ; et elle ajoute :

« Cette disposition est applicable également aux bois appartenant à des particuliers et est encore renforcée dans certaines zones où les précautions doivent être des plus sévères. C'est ainsi qu'il est absolument interdit de camper dans les forêts du Var, dans celles de Versailles, de Meudon, Fosses Reposes et la Malmaison.

» Ce n'est que par tolérance que des autorisations exceptionnelles d'allumer un feu en forêt peuvent être accordées. Il faut toujours, auparavant, se mettre d'accord avec le garde des Eaux et Forêts pour allumer un feu, et le faire seulement à l'endroit choisi par ce dernier, après avoir débarrassé le sol, sur une large étendue, des brindilles, feuilles et herbes.

Cette question du feu a fait, et fera encore, couler beaucoup d'encre. Les campeurs ont été chargés de tous les péchés d'Israël, et cependant la circulaire reconnaît que bien rarement les campeurs ont été les coupables. Et cela nous a fait beaucoup de plaisir de voir qu'officiellement on savait le reconnaître.

L'accusation contre les campeurs d'avoir mis le feu à un bois n'est pas récente. Et cependant, dans l'immense majorité des cas, ceux-ci ne sont pas coupables.

D'abord parce qu'ils font attention beaucoup plus que d'autres à l'incendie, dont ils seraient les premières victimes. Un équipement de camping coûte cher, très cher même, et le campeur sait qu'il serait le premier lésé par un incendie ...

D'un autre côté, il est tellement normal de faire attention au feu allumé pour la cuisine que ce n'est pas de ce côté qu'est le danger le plus réel ...

La plupart des feux de forêts sont le fait d'une imprudence de touriste en promenade, cigarettes jetées encore allumées, ou même tesson de bouteille laissé dans un fourré par les pique-niqueurs du dimanche. Ce dernier forme loupe et met le feu à de la mousse sèche avec une facilité effarante.

Certes, des précautions sont à prendre, principalement avec le feu de bois, qui est à proscrire dans nos régions. Je sais bien que ce dernier est rempli de poésie et que rien ne la remplacera pour griller un steak ou une entrecôte, mais les réchauds sont bien pratiques et moins dangereux. Il faut néanmoins déblayer la place où ils seront posés et, si possible, les isoler d'un sol forestier par des pierres, ou un support quelconque.

Revenons à la circulaire qui indique, en quelques mots, ce que le campeur doit faire si ; par malheur, un commencement d'incendie se déclare.

« Pour éteindre le feu, séparer légèrement les braises, les écraser, les noyer, puis les recouvrir de terre humide. Ne jamais disperser ni enterrer les braises sans s'assurer qu'elles sont éteintes et refroidies. Le feu peut se propager dans le sol par les feuilles mortes ou les racines. En cas de commencement d'incendie, se munir de branchages garnis de leurs feuilles et de leurs rameaux et d'environ 1m,50 de longueur. Battre avec ces branchages les parties du sol gagnées par le feu, en entourant le foyer et en le réduisant vers le centre. Supprimer les branches menacées par le feu.

» Prévenir en tout cas immédiatement le garde, ou toute personne se trouvant dans le voisinage. La rapidité d'intervention des secours est décisive. »

Rien à ajouter à ces conseils fort pertinents. Mais répétons une fois de plus qu'il vaut mieux prendre cent précautions avant que d'avoir à éteindre un incendie !

Le paragraphe 5 de la circulaire recommande à juste raison de respecter la forêt et les récoltes. Le bois utilisé pour le feu — si celui-ci est toléré — doit être du bois mort ramassé à terre. Une autorisation de le ramasser est d'ailleurs nécessaire. Respecter les arbres. Ne pas couper de branches et ne pas enfoncer des clous dans les troncs.

Quant au respect des récoltes, il ne peut y avoir aucun commentaire à faire à ce sujet. Cela va de soi. Recommandons toutefois de respecter les prairies à foin. Certains campeurs citadins respecteront un champ de blé, mais piétineront de l'herbe, sans se rendre compte du dommage causé. Or, bien souvent, le propriétaire est le premier à proposer de faucher un espace pour permettre à son hôte provisoire de s'installer ... Cela m'est arrivé à de nombreuses reprises.

Enfin, les conseils officiels font mention de la bonne tenue et des règles d'hygiène à respecter. Je renverrai le lecteur à l'article que j'ai écrit, ici même, dans le n°638 d'avril 1950, et que j'avais consacré au « savoir vivre du campeur ». En ce qui concerne l'hygiène, les précautions à prendre sont évidemment différentes dans le cas d'un camp organisé groupant de nombreux campeurs, ou dans le cas d'un camp volant et ne groupant qu'une équipe familiale ou que quelques amis. De toute façon, il y a à faire attention à ne pas polluer des puits ou des sources ... Pour des isolés, il y aura toujours intérêt à confectionner une petite feuillée, recouverte après le départ.

« C'est à ces détails d'hygiène et de propreté que l'on reconnaît les vrais campeurs », dit, in fine, la circulaire ministérielle. Nous ne pouvons qu'applaudir à ce propos !

J.-J. BOUSQUET,

Président du Camping-Club de France.

(1) Voir Le Chasseur Français de janvier 1952.

Le Chasseur Français N°661 Mars 1952 Page 157