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La culture des asperges

Cultivée depuis les temps les plus reculés, cette plante croît à l'état sauvage dans le Midi de l'Europe, dans les sols sableux qui avoisinent les bords de la mer.

Quoique les terrains légers et sains soient ceux qui conviennent le mieux pour faire une plantation d'asperges, il est cependant possible d'établir une aspergerie avec succès dans toutes les terres qui ne présentent pas une humidité excessive en profondeur ou qui ne sont pas imperméables, l'humidité stagnante étant ce que la plante redoute le plus ; par contre, elle ne souffre aucunement des sécheresses les plus prolongées.

Avides d'engrais, il faut fumer copieusement les asperges.

Avant la plantation, il est donc nécessaire de donner au sol une forte fumure susceptible de se faire sentir pendant de nombreuses années. À cet effet, lors du labour préparatoire, on incorpore, en moyenne, à l'are :

Fumier 400 à 500 kg.
Scories de déphosphoration 6 kg.
Sulfate de potasse ou chlorure de potassium 2kg,500

Des fumures d'entretien sont en outre indispensables pour maintenir le terrain en bon état de fertilité et assurer une production régulière de la part des plantes ; aussi est-il avantageux d'enfouir tous les deux ans, en novembre, les engrais suivants :

Fumier de ferme bien décomposé 200 kg. à l'are.
Scories de déphosphoration ou superphosphate de chaux 3 — —
Chlorure de potassium ou sulfate de potasse 1 — —

D'autre part, sur cette même surface, un épandage de 1 kilogramme de nitrate de soude, fait au moment du buttage, produit le meilleur effet.

En ce qui concerne les variétés d'asperges, il n'en est que deux nettement différenciées : l'asperge hâtive et l'asperge tardive. Le choix entre elles sera dicté par des considérations personnelles ou climatiques, faciles à déterminer. La sélection a fait naître des races locales de chacune de ces variétés : asperge d'Argenteuil, de Pologne, de Hollande, de Brunswick, etc. Toutes peuvent donner satisfaction, mais il est cependant préférable d'utiliser l'asperge d'Argenteuil, la plus répandue et la plus renommée ! En dehors de quelques cas particuliers, recherches de races nouvelles, grande culture, etc., il est préférable d'avoir recours à la plantation de griffes plutôt qu'au semis ; cette manière d'opérer permet de gagner deux ans sur la production, et elle évite, à peu de frais, bien des soins. Il est, en outre, avantageux de planter des griffes de deux ans plutôt que des griffes de trois ans ; la reprise en est mieux assurée.

On plante généralement les griffes à 1 mètre d'écartement, en tous sens, dans des tranchées de 20 à 30 centimètres de profondeur, selon le degré d'humidité du sol. Il est important, le développement des racines étant horizontal et superficiel, de ne pas planter trop profondément.

Chaque griffe est posée sur un petit monticule de terre, et ses racines soigneusement étalées autour d'elle de façon à bien les allonger pour assurer un contact parfait avec la terre. Entre les tranchées, on conserve un ados qui, ultérieurement, permettra le buttage, et qu'on peut utiliser, au moins les deux premières années, pour des cultures intercalaires à faible développement en hauteur et à système radiculaire réduit : salades, navets, radis, haricots nains.

L'époque de la plantation des asperges est variable : on peut planter dès le mois de janvier en Algérie ; en février dans le Centre et le Nord de la France ; en avril dans les régions froides.

Toutefois, dans les pays précoces et secs, comme celui des régions méridionales, on réussit mieux par les plantations d'automne.

Après la plantation et pendant toute la durée de l'aspergerie, de fréquents binages sont nécessaires, mais ils doivent, étant donné le peu de profondeur des racines, demeurer superficiels.

Les asperges étant rustiques, c'est une erreur de les couvrir de fumier ou de feuilles sèches, qui peuvent occasionner la pourriture des griffes. Un léger buttage de 15 à 20 centimètres suffira ; on l'accroîtra au printemps, au moment de l'entrée en végétation ; on le réduira, au contraire, à l'automne, pour faciliter l'hivernage.

Il est, d'autre part, préférable de tuteurer les tiges laissées sur le pied. On les coupe à l'automne, par temps sec, à 20 centimètres au-dessus du sol. Il est indispensable de brûler ces tiges afin de détruire les insectes (larve de la mouche de l'asperge).

On peut commencer à récolter dès la deuxième ou la troisième année, à raison de deux à trois asperges au maximum par pied. La quatrième année, on récolte encore modérément, et ce n'est qu'à partir de la cinquième année qu'on peut prolonger la cueillette une cinquantaine de jours.

L'aspergerie, bien soignée, pourra avoir une durée de douze à quinze ans.

A. GOUMY,

Ingénieur horticole.

Le Chasseur Français N°661 Mars 1952 Page 158