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Les arrosages au potager

Le rôle de l'eau.

— Nul n'ignore que l'eau est nécessaire à la vie et à la croissance des végétaux, plus particulièrement à celle des légumes feuillus, dont la teneur aqueuse atteint et dépasse 90 p. 100.

C'est grâce à l'eau que les principes nutritifs, captés par les poils absorbants des racines, peuvent véhiculer dans les vaisseaux capillaires à l'état de sève, laquelle apportera avec elle ses constituants, c'est-à-dire l'oxygène et l'hydrogène nécessaires à l'élaboration de tous les tissus des légumes feuillus, des légumes racines et des légumes fruits.

Si, en général, dans la grande culture, les plantes en sont réduites à la portion congrue des apports de l'atmosphère, sous la forme de pluie, de brouillard, de rosée ... souvent aléatoires, dans les jardins exploités d'une façon intensive, on supplée à leur insuffisance par des arrosages appliqués au moment opportun et en quantité raisonnée.

Choix de l'eau.

— Quelle que soit son origine, qu'elle provienne d'un ruisseau, d'une mare, de la concession, des puits, des citernes, de forages, etc., l'eau doit être neutre, et à la température extérieure, si on ne veut pas intoxiquer les plantes ni les réfrigérer.

Les meilleures sont celles qui proviennent des pluies, et que l'on canalise dans des bassins aériens, en prolongeant les chêneaux des toitures par une tuyauterie spéciale et où elles prennent la température de l'ambiance. Ces eaux entraînent avec elles les poussières de l'atmosphère et des produits nitratés quand il survient des orages, ce qui augmente leur valeur fertilisante. Dans le cas où on ne les utiliserait pas tout de suite, il suffirait d'y jeter du charbon pulvérisé pour empêcher leur croupissement.

Les eaux de ruisseau et celles des mares sont également excellentes, parce qu'elles apportent avec elles des matières organiques, mais, comme elles peuvent contenir des microbes pathogènes, il est prudent de laver soigneusement à l'eau potable les légumes destinés à être mangés crus, tels que salades, radis, fraises, etc.

Les eaux de source et de puits sont de qualité très variable, cela dépend de la nature et de la composition des roches où elles ont circulé. Certaines d'entre elles sont séléniteuses ou calcaires par excès ; d'autres contiennent des sels nuisibles à la vie des plantes. C'est pourquoi, avant de les employer, il convient de les faire analyser.

Dans tous les cas, quelle que soit leur origine, les eaux souterraines devront séjourner à l'air libre, de manière qu'elles prennent la température ambiante, surtout s'il s'agit de les appliquer sur des plantes frileuses telles que tomates, haricots, melons, etc.

Les modes d'arrosage.

— Dans les petits jardins, les arrosages se font le plus souvent en puisant l'eau dans les bassins ou les ruisseaux au moyen d'arrosoirs en tôle galvanisée ou en zinc, pourvus de pommes perforées de trous plus ou moins gros, et l'épandage se fait à la main. Sur les semis délicats, pour éviter de les déterrer, on se contente de bassinages avec des pommes à très petits trous.

Sur les légumes foliacés à grand développement, on utilise des pommes largement perforées et, après les repiquages de choux, de salades et autres plants, on arrose généralement au goulot.

Plus il fait chaud et sec, plus les plantes sont assoiffées, plus elles demandent d'eau, et l'on se rappellera que le défaut de fraîcheur rend les légumes ligneux, coriaces, durs à cuire et d'une mauvaise digestion.

En outre, on tiendra compte que les végétaux à fort développement foliacé, tels que les épinards, les laitues, etc., exhalent énormément d'eau et que, pour empêcher qu'ils ne montent prématurément à graine, il faut forcer les distributions, non pas en multipliant leur nombre, mais en augmentant les doses. Un seul arrosage copieux sera plus efficace que dix arrosages superficiels qui mouilleraient seulement les feuilles.

En effet, ces derniers, par l'évaporation intense qu'ils provoquent à la surface du feuillage, occasionnent un refroidissement qui fait plus de mal que de bien aux légumes ainsi arrosés, tandis qu'un mouillage copieux, descendant jusqu'aux racines, donnera de bons résultats.

Dans les jardins modernes, annexés aux maisons de plaisance, et chez les maraîchers, les arrosages se font habituellement d'une façon automatique, soit à la lance ou au moyen d'appareils distributeurs appelés tourniquets, lesquels exigent pour fonctionner le concours de machines élévatoires et de réservoirs aériens.

En toute saison, les mouillages à fond devront être suffisamment espacés pour qu'il se produise un égouttage partiel, car un terrain maintenu constamment humide à saturation favoriserait la pollution des moisissures et l'incubation de toutes sortes de maladies.

En principe, pendant l'été, on arrosera de préférence le soir, tandis qu'au printemps et à l'arrière-saison il vaut mieux le faire le matin. Mais il est instamment recommandé de ne jamais arroser au milieu du jour, parce que les gouttelettes d'eau restées sur les feuilles pourraient occasionner des brûlures, en concentrant les rayons du soleil à la manière d'une lentille.

Adonis LÉGUME.

Le Chasseur Français N°666 Août 1952 Page 481