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Camping

Feux de bois et réchauds

J'ai donné, dans ma dernière chronique, les raisons pour lesquelles je préférais — dans le camping « civilisé » que nous sommes obligés de pratiquer en Europe — les réchauds au feu de bois, comme mode de chauffage pour la cuisine.

Mais il n'en reste pas moins vrai que, dans certains cas, il peut être intéressant de recourir au feu de bois.

Rappelons seulement que ces derniers sont strictement prohibés non seulement à l'intérieur, mais jusqu'à 200 mètres au moins des forêts domaniales, sauf sur autorisation tout à fait spéciale d'un garde forestier.

En terrain non domanial, rappelons que l'autorisation de faire du feu de bois doit toujours être sollicitée à l'avance, en se mettant d'accord avec le propriétaire du terrain sur l'emplacement le plus adéquat et le moins dangereux.

Ceci dit, comment monterons-nous notre feu ? ...

Cela dépendra de plusieurs facteurs.

En camping de randonnée, et si le feu ne doit servir qu'à la cuisine, il faut, avant tout, se souvenir que le feu doit uniquement chauffer la popote et qu'il n'est donc pas nécessaire de faire un grand feu.

Le meilleur système consiste à creuser légèrement le sol. Dans le cas d'une prairie, détacher au couteau une motte d'herbe que l'on mettra de côté et qui servira le lendemain au départ non seulement à éteindre les dernières traces de feu, mais à faire disparaître jusqu'à la trace du feu de cuisine (fig. 1).

Dans le creux ainsi formé, placer quelques allume-feux : écorce de bouleau (le meilleur), bois échardés au couteau, feuilles mortes très sèches, puis quelques brindilles ; une fois le feu pris, quelques branchettes plus grosses. Une petite provision de ces branchettes suffit pour le dîner du soir et le petit déjeuner du lendemain. Ne pas oublier de faire sa petite provision de bois sec, dès l'arrivée, si le temps est douteux, pour le lendemain matin. Sinon, que de temps perdu pour le départ matinal.

Pour un camp fixe, le feu peut être plus grand, car il servira pendant plusieurs jours, et quelquefois à plusieurs campeurs. Dans ce cas, le feu pourra être monté de plusieurs façons :

a. En cône.

— Placer trois branches en cône et disposer les branches tout autour, en laissant cependant une ouverture du côté d'où vient le vent. Au centre, disposer des allume-feux et, lorsque ceux-ci sont pris et que le cône commence à flamber, ajouter des bûchettes, et même des bûches.

Lorsque le feu est écroulé et qu'un bon tas s'est formé, suspendre au-dessus les popotes ou les placer sur un gril portatif. Les grosses bûches seront alors disposées en étoile et avancées sur le feu au fur et à mesure de leur combustion (fig. 2).

Ce système de feu en cône est celui à employer si l'on veut monter un feu de camp. Dans ce cas, autour du cône initial, on dispose en carré des bûches, les grosses en bas, les plus petites en haut.

b. Procédé de la bûche inclinée.

— Disposer en terre une bûchette inclinée et soutenue par deux autres morceaux de bois (fig. 3).

Le long de ce support, installer brindilles, branchettes et bûchettes, l'ouverture dans le sens du vent. Allumer comme indiqué plus haut.

Loiseau indique dans son livre Manuel de Camp fixe une autre méthode qu'il appelle : méthode des deux bûchettes. Il dispose deux bûchettes sur le sol. La seconde posée sur la première forme avec celle-ci un angle de 30 à 35°. Sur le sommet de l'angle, disposer brindilles, etc. Les allume-feux sont au-dessous. C'est une excellente méthode d'allumage, que j'ai expérimentée souvent avec succès.

D'autre part, les feux pourront être soit à même le sol (toujours déblayer les alentours des feuilles mortes, aiguilles de conifères, etc.), soit en tranchées, soit entre des pierres, soit surélevés. L'hiver, les feux à réflecteur (méthode canadienne) seront très agréables. Ce sont des feux faits devant un écran réflecteur, le plus souvent un rocher ou un talus de terre. La chaleur dégagée est alors réfléchie vers le campeur et le feu sert au chauffage en même temps qu'à la cuisine.

Il y aurait bien d'autres choses à dire sur les feux de bois, mais cela dépasserait le cadre de cet article.

Insistons seulement, pour finir, sur la nécessité absolue qu'il y a à ne jamais quitter un camp où l'on a fait un feu de bois sans s'assurer qu'il est bien éteint. Arroser soigneusement les braises et recouvrir de terre tassée. Ne pas oublier qu'un foyer même recouvert de terre, mais mal éteint, peut couver sous terre et transmettre le feu par des racines. L'art du feu de bois est une des techniques les plus difficiles à acquérir, et seuls les vieux campeurs confirmés devraient se permettre de les utiliser ...

Les réchauds.

— Ces derniers restent donc le moyen le plus simple et le moins dangereux pour la cuisine de plein air. Il y en a de toutes sortes, qui utilisent tous les combustibles : réchauds à bois et à charbon de bois, à alcool liquide ou solidifié, à pétrole, à essence, et les derniers-nés au gaz butane.

Ceux à alcool liquide et à essence sont les plus couramment employés par les randonneurs. Les premiers sont très légers, mais la provision de combustible doit être plus importante. C'est le contraire pour les réchauds à essence petit modèle : réchauds plus lourds, mais provision d'essence plus légère.

Les automobilistes ayant le combustible à portée de la main utiliseront de préférence les réchauds à essence à deux becs. Mais le réchaud à gaz butane est de plus en plus employé (modèle standard prévu pour quarante heures de chauffe. Échange standard de bouteille dans de nombreuses stations service).

Les accidents de réchauds sont très rares. Mais ils existent. Suivre attentivement les modes d'emploi de chaque réchaud et les entretenir en parfait état de marche. Cela évitera non seulement les accidents, mais les pannes d'allumage, bien désagréables. Prendre enfin toutes précautions contre l'incendie : dégarnir le sol des feuilles, etc., avant de l'allumer, et autant que possible isoler le réchaud en le plaçant sur une plaque incombustible ou, à défaut, sur des cailloux ou une pierre plate.

Tout ceci a l'air compliqué, mais n'est au fond qu'une question de bon sens et de prudence élémentaire, et tout vrai campeur prend ces précautions sans même y réfléchir.

Jacques-J. BOUSQUET,

Président du Camping-Club de France.

Le Chasseur Français N°669 Novembre 1952 Page 671